Aveuglement

Publié le 20 mars 2009 par Malesherbes
Au soir de la manifestation du 19 mars, notre premier ministre, droit dans ses bottes, déclarait majestueusement qu’il n’y aurait pas de second plan de relance. Le premier était déjà considérable. Important peut-être, ridicule comparé à d’autres, mais surtout orienté presque exclusivement vers l’investissement. On dirait que, plus lourdes sont les erreurs de notre gouvernement au cours des mois passés, plus il se sent conforté dans la certitude que les mesures qu’il met en œuvre sont les seules propres à nous sortir de cette crise, d’une ampleur inconnue. Un peu de modestie, un soupçon d’humilité ne terniraient pas leur grandeur sans égale.
François Fillon étale fièrement l’immense bénévolence de sa suppression des deux premiers tiers de l’impôt sur le revenu. Cette mesure radicale était supposée redonner du pouvoir d’achat aux petites gens. Est-il apparu à cet Auguste (cette fois, je n’emploie pas l’adjectif mais j’essaie, sauf le respect dû au ministre, d’en appeler à la figure souriante d’un clown, cet ami éternel des enfants, avec lesquels M. Fillon nous confond peut-être), lui est-il donc apparu que plusieurs millions de ménages (je n’ai plus le chiffre en tête, mais il dépasse assurément la dizaine) ne sont pas soumis à l’IRPP ? Ceci laisse supposer, mis à part quelques exonérés chaudement blottis dans des niches fiscales, qu’il s’agit de ceux qui disposent des plus faibles revenus, qui ont donc le plus grand besoin d’un surcroît de pouvoir d’achat et qui ne bénéficient en rien de la somptueuse magnanimité de notre gouvernement.
Il y a quelque temps, une émission de téléréalité dont j’ai oublié le nom montrait deux familles échangeant leur cadre de vie. Si je suis loin d’être un fervent supporter de ce genre de programme, il me semble que ce qui manque le plus à beaucoup de nos politiques, c’est d’avoir ce type d’expérience et de vivre une semaine ou deux, hors du champ des caméras bien sûr, la vie d’un RMI ou d’une femme seule avec trois enfants et mille euros de revenus mensuels. Cela leur éviterait peut-être d’afficher sans cesse leur morgue et leur suffisance, incapables de céder devant leurs insuffisances.
Il est vrai que l’effort d’éducation à consentir est considérable. Dans son édition du 18 mars, le Canard enchaîné, toujours lui, nous révélait que Pénélope Fillon, l’épouse de notre Premier Ministre, aurait emprunté de Morlaix-Ploujean à Roscoff, un Falcon 50 de l’Etec, l’escadrille à disposition du gouvernement. Elle représentait son époux au baptême de l’Armorique, dernier-né de la flottille des Brittany Ferries. A quel titre ? Toujours en se rapprochant du monde de l’entreprise, si cher à notre guide, depuis quand une épouse est-elle qualifiée pour remplacer son mari ? Il est vrai que, depuis certaine campagne libyenne …
Les dieux aveuglent ceux qu’ils veulent perdre.