PARIS (AFP) — Le couturier Franck Sorbier, créateur discret à l’univers poétique et coloré, célèbre ses dix ans de haute couture avec une rétrospective au Musée des Tissus de Lyon qui témoigne de l’imagination et du travail sur la matière de cet artisan passionné. “C’est un moment important de ma vie”, dit Franck Sorbier, 48 ans, également à l’honneur dans les vitrines du ministère de la Culture, au Palais Royal, qui évoquent l’histoire de sa collection haute couture pour l’été 2009. Le couturier, qui a présenté sa première collection il y a plus de vingt ans, est devenu membre invité de la Chambre syndicale de la couture en 1999 avant de faire son entrée dans le petit cercle des maisons de haute couture en 2005.
Cet homme souriant au regard rêveur derrière ses binocles, ancien élève de l’école de stylisme Esmod, a toujours eu une conception exigeante de la couture. “Etre couturier, c’est un état d’esprit, ce n’est pas faire de la mode”, explique-t-il à l’AFP. “La haute couture représente des valeurs. Il faut avoir la volonté de défendre un patrimoine et une exception française”. L’exposition lyonnaise, intitulée “La couture Corps et Ame”, est parrainée notamment par le brodeur François Lesage et le bottier Raymond Massaro, deux artisans d’art dont le talent est souvent mis à contribution par la haute couture.
Fréquemment vêtu d’une blouse blanche, Franck Sorbier “envisage (son) métier à l’ancienne”. Il insiste sur sa volonté de “continuer à avoir un contact direct avec la matière”, parle de la nécessité de faire preuve de “ténacité” et de “beaucoup d’humilité”. Jusqu’au 20 septembre, le visiteur pourra admirer environ 180 modèles de haute couture, des croquis, des échantillons, des maquettes de cartons d’invitation. Ils sont organisés selon un parcours chromatique, d’une pièce et d’une couleur à l’autre, du noir vers le blanc, en passant par le technicolor, le bleu ou des tenues de scène créées pour des artistes comme Johnny Halliday ou Mylène Farmer. “Toutes les pièces sont uniques”, souligne Franck Sorbier.
Les “sortilèges du noir” proposent “une accumulation de noirs dans des techniques et des matières différentes”, dans le désordre chronologique: robe en rubans (hiver 2003-04), robe longue en dentelle rebrodée (été 2006), robe courte à franges en macramé et rubans (été 2007)… Dans la salle “Technicolor”, le “Roi mage africain”, l’un des rares modèles de prêt-à-porter (hiver 1996-97), en macramé de scoubidous multicolores, côtoie “Mère Térésa” (hiver 2008-09), un imperméable en accumulation de sacs de shopping en plastique. Plus loin, Franck Sorbier montre son travail sur le raphia qu’il utilise en macramé pour une robe pagne, compressé pour un bustier, compressé et rebrodé de perles pour une veste.
On retrouve aussi les robes en soie compressée qui sont sa signature. Au fil des vitrines, le visiteur mesure la passion de Franck Sorbier pour la matière qu’il travaille énormément, retrouvant à l’occasion des techniques anciennes. L’exposition de quelques-unes de ses anciennes blouses et de la machine à coudre sur laquelle il a fait ses premiers modèles de haute couture visent à souligner que “le couturier est un artisan mais aussi un technicien”. Parmi les “clous” de l’exposition figure “Le voile du bonheur”, un assemblage de carrés d’organza blanc signés en lettres d’or par des dizaines de personnalités comme Carla Bruni, Philippe Sollers, Jean-Pierre Chevènement ou Line Renaud.