Les bandes violentes, cibles des services secrets
La police recense 222 bandes organisées en France, comme le rappelait le jour même la ministre de l'Intérieur: "Vous avez aujourd'hui en France 222 bandes recensées. Ces 222 bandes sont à 79 % en région parisienne et elles comportent environ 2 500 individus qui sont des permanents de ces bandes, 2 500 autres qui sont des occasionnels, parmi eux vous avez 47 % de mineurs". Et Alliot-Marie complète : "53 % des membres de ces bandes sont donc majeurs et la grande majorité d'entre eux sont des gens désocialisés et cette désocialisation se marque par des attaques contre tout ce qui représente l'autorité, l'Etat et notamment les policiers". Fichtre ! On attendrait presque qu''elle nous les nomme un par un. Que fait la police ? Elle travaille. La ministre a en effet justifié la création de la fameuse DCRi, la Direction Centrale du Renseignement Intérieur comme la véritable réponse de l'Etat à cette menace. Après l'ultra-gauche et Julien Coupat, les bandes violentes sont le nouveau totem de la Sarkofrance sécuritaire. Cette fois-ci, le président français ne pourra pas décemment jouer de la "rupture". Il a été deux fois ministre de l'Intérieur entre 2002 et 2007. Rappelons cette évidence. Les victimes des bandes violentes seront heureuses de savoir que Nicolas Sarkozy a dû créer une "National Security" à la Française, cette DCRI, pour lutter enfin efficacement contre 2 500 jeunes organisés.
Délinquance en hausse en Sarkofrance
Michèle Alliot-Marie, et son président de tutelle, se gardent bien de commenter deux tristes faits : la délinquance, surtout violente, augmente. Et le système sécuritaire mis en place est également utilisé de façon disproportionnée et douteuse sur des cas mineurs. Apprendre que la DCRI s'est penché sur le cas de lycéens blogueurs qui commentaient sur leur site les mesures Darcos est risible et inquiétant à la fois. Concernant la délinquance, Michèle Alliot-Marie s'est fendue d'un joli demi-mensonge mercredi dernier, en préambule de l'intervention présidentielle à Gagny : "Dans le même temps où il y a une baisse de la délinquance, à l'intérieur de la délinquance, vous avez des montées de certaines actions, par exemple les escroqueries […], une montée des vols à main armée et une montée de la violence de la part d'un certain nombre de jeunes ou de moins jeunes". Faudra-t-il lui rappeler que la délinquance générale a stagné l'an passé, tandis que la hausse frappait les toutes les catégories d'actes violents ?
Les nouvelles mesures du Président
Mercredi après-midi, après un passage par la Préfecture de police de Paris, le cortège présidentiel est parti sur Gagny. Là-bas, Nicolas Sarkozy a fait ses annonces: "Ce qui s'est passé à Gagny doit nous servir de leçon. On n'est pas décidé à accepter qu'il y ait un autre événement de cette nature". La presse reprend allègrement le communiqué officiel, et avec une telle précision qu'il nous fallait bien lister ces mesures une par une. Grande nouvelle, il n'y pas 16 mais 11 mesures. Au programme, davantage de police de proximité (pardon, d'"UTEQ"), de fichage, et des peines aggravées:
1. "Création d'un fichier dédié aux violences urbaines et au phénomène de bandes"
Commentaire présidentiel: "Le choeur des bien-pensants va sans doute se déchaîner au seul mot de fichier, a-t-il ironisé, mais cela n'a aucune importance." Simple annonce marketing, puisque l'outil existe déjà depuis 1996. Comment sinon la ministre pouvait-elle recenser avec autant de précisions 222 bandes organisées en France ?
2. Mise en place d'une "police d'agglomération avec un état-major à l'échelle des agglomérations", chargée de coordonner la collecte du renseignement et l'action de la police.
Cette gestion serait confiée aux SDIG départementales, les sous-directions de l'information générale (SDIG) rattachées à la DCRI.
3. Création "de groupes spécialisés pour traiter les violences urbaines et les agissements des bandes, au sein des directions départementales de la sécurité publique".
4. Création de 100 nouvelles unités territoriales de quartier (Uteq, comme il en existe déjà huit en France dont trois en Seine-Saint-Denis). En d'autres termes, c'est un renforcement de la police de proximité que Nicolas Sarkozy avait supprimé en 2002, même s'il s'en défend: «Ces forces sont aux antipodes de feu la police de proximité. Il s'agit de connaître le terrain, et non de jouer au foot avec des délinquants».
5. Création de 23 compagnies de sécurisation (avec chacune 150 fonctionnaires spécialement formés au maintien de l'ordre dans les "quartiers sensibles").
6. Mise en place de 75 systèmes municipaux de vidéo protection et surveillance dans 400 établissements scolaires.
7. Création d'une peine de 3 ans d'emprisonnement "pour participation en connaissance de cause à un groupement, même formé de façon temporaire, poursuivant le but de commettre des atteintes volontaires contre les personnes ou contre certains biens". On voit poindre un délit de mauvaise fréquentation, dont la constatation sera éminemment subjective et contestée, sur le modèle de la législation antiterroriste. "Je demande la création d'une peine de trois ans d'emprisonnement pour participation, en connaissance de cause, à un groupement, poursuivant le but de commettre des atteintes volontaires contre les personnes ou certains biens. Le fait même d'appartenir à une bande doit être un délit" a déclaré Sarkozy.
8. Transformation en délit l'intrusion dans un établissement scolaire
9. Peine aggravée pour les agressions contre les personnels de l'Education nationale.
10. Identification sous dix jours des 100 à 200 établissements les plus touchés par des intrusions.
11. Renforcement du filtrage et du contrôle aux entrées des établissements. En particulier, le président a prévu l'extension aux enseignants, à l'intérieur des établissements scolaires comme à l'extérieur comme les transports en commun -, de la même protection que celle dont bénéficient les "agents dépositaires de la force publique".
Bref, cette dizaine de mesures ne méritait aucune annonce présidentielle. Mais Sarkozy ne pouvait se passer d'un tel déplacement symbolique. Côté sécurité, le président est parfois mal entouré, comme en témoigne le Canard Enchaîné. Mais cela, c'est une autre affaire...
Dans son édition du 18 mars, Le Canard Enchaîné révèle que la sécurité du colloque organisé le 11 mars à Paris à l'Ecole militaire autour de Nicolas Sarkozy - le chef de l'Etat y a annoncé le retour de la France dans le commandement intégré de l'OTAN - a été assurée par une société de vigiles privée particulière, Vendôme Sécurité. Cette société est dirigée par Axel Loustau, un ancien cadre du GUD (Groupe Union Défense), mouvement d'extrême droite musclée et violente, qui a gardé des liens avec ce milieu. Axel Loustau est l'un des contributeurs des Rats Maudits, ouvrage dans lequel plusieurs générations de "Gudards" relatent leurs hauts faits. Il avait été candidat FN aux législatives 1997 dans les Hauts-de-Seine (source LE MONDE).