Cela n’aura échappé a personne en lisant ce blog, je suis particulièrement friand de films fantastiques et horrifiques. Mais ce dont je parle rarement, c’est du fait que j’apprécie aussi énormément ces genres en littérature. Stephen King est mon auteur préféré, mais ces dernières années, je me suis ouvert à d’autres écrivains, comme Clive Barker, Peter Straub, Brett Easton Ellis ou Chuck Palahniuk. Aujourd’hui j’ai eu envie d’écrire un petit article sur un auteur que je n’ai découvert que récemment (bien qu’il écrive depuis un certain temps maintenant) et que je considère de plus en plus comme un des meilleurs auteurs contemporains, tous genres confondus. Cet auteur, c’est Neil Gaiman, dont j’ai appris l’existence en 2007 lorsque j’ai vu en salle le fabuleux Stardust, adapté de l’un de ses romans.
Neil Gaiman a débuté en tant que journaliste, avant de connaitre la célébrité en tant que scénariste de comics. C’est lui qui a notamment créé l’étrange personnage du Sandman. Je n’ai lu que le premier des 11 volumes consacrés à l’intégrale de la série, mais déjà on retrouve le style de Gaiman, cet habilité à créer un univers parallèle mais proche de nous, à cheval entre le réel et le rêve. Ce qui frappe le plus chez Gaiman, c’est la facilité avec laquelle il parvient à créer des mondes tangibles et vivants. Neverwhere, son premier roman en solo, est très représentatif de cela. Ce livre suit les traces de Richard Mayhew, un jeune businessman écossais qui découvre un monde alternatif dans le Londres moderne, le « Londres d’en bas ». A ce propos, la scène du marché secret de Hellboy 2 m’a fait fortement penser à une scène similaire de Neverwhere. Je me demande si del Toro ne se serait pas inspiré du roman de Gaiman pour son excellent film… Neverwhere, comme la plupart des romans de Gaiman, emprunte énormément à la structure d’un conte de fée. On y retrouve le héros investi d’une mission et poursuivi par de dangereux hommes de main, il est secondé par des compagnons apportant chacun une capacité spéciale, il doit utiliser des objets magiques pour progresser, etc. Extrêmement facile à lire, ce roman se dévore d’une traite, et surtout, on en redemande une fois la lecture terminée, tant on a l’impression d’avoir seulement effleuré la surface de ce monde étonnant et fascinant.
Mais si les mondes créés par Gaiman semblent si proches et familiers, c’est certainement parce que celui-ci adore intégrer de nombreuses références à des mythes populaires dans ses livres. Son roman le plus frappant à ce niveau est l’excellent American Gods, dans lequel l’auteur plonge son héros au milieu d’une guerre entre anciens et nouveaux dieux en plein cœur des Etats-Unis. Les nouveaux dieux, ce sont les médias, l’internet, les grosses voitures, la carte bleue, etc. Quant aux anciens dieux, il s’agit de toutes ces créatures mythologiques et dieux païens que les premiers immigres américains ont « ramenés » avec eux et qui ont petit à petit été oubliés : les leprechauns irlandais, les dieux nordiques, les dieux égyptiens, la déesse Easter (Pâques), etc. Un véritable melting pot pourtant tout à fait cohérent et qui non content de divertir le lecteur, lui apprend en plus énormément de choses sur tous ces mythes du monde entier…
Dernière œuvre de Gaiman que j’ai pu apprécier récemment, le recueil de nouvelles Miroirs et Fumée est une passionnante plongée dans la carrière de l’auteur. Commentées par celui-ci en début d’ouvrage, ces histoires courtes permettent de saisir toutes les facettes du talent de Gaiman ainsi que d’approcher au plus près ses sources d’inspiration. On y croise des histoires tour à tour drôles ou effrayantes, des poèmes ou des nouvelles « à la manière de » (entre autres quelques histoires écrites en hommage à Lovecraft), le tout dans un joyeux foutoir pourtant très représentatif du style Gaiman. Si tout n’est pas exceptionnel dans ce recueil, celui-ci recèle tout de même quelques perles, comme cette extraordinaire relecture de Blanche-Neige et les sept Nains, racontée du point de vue de la « méchante » belle-mère et qui donne un éclairage troublant sur cette histoire éternelle.
En tout cas, le phénomène Neil Gaiman ne cesse de prendre de l’ampleur, puisqu’il s’attaque depuis quelques années au cinéma. Son roman Stardust a été porté à l’écran d’une bien belle façon par Matthew Vaughn, et Gaiman a écrit les scenarii du troublant Mirror Mask et de l’épique La Légende de Beowulf (pas étonnant vu son amour pour les mythes et son intérêt pour la déconstruction de ceux-ci). Cette année, l’événement cinéma provient de l’adaptation sur grand écran de son livre pour enfants Coraline, dirigée par le génial Henry Selick (réalisateur du superbe L’Etrange Noel de Monsieur Jack). On ne pouvait définitivement pas trouver meilleur réalisateur pour faire vivre cette histoire d’une petite fille qui se retrouve transportée dans un monde magique et dangereux (et oui, encore une histoire de monde parallèle !). Bref, après avoir conquis le monde des comics, Neil Gaiman s’apprête maintenant à conquérir Hollywood et on ne va pas s’en plaindre !