Anthologie permanente : Heidi Pataki

Publié le 19 mars 2009 par Florence Trocmé

pied de guerre
en marche ! hop hop ! au trot !
(.. car je serait déjà dire trop)
quand la haine bloque notre langue
la haine pure folle et démente
sur des cals frappés par la vie
à vous en faire craquer la couenne

le maître braille d’un air d’angelot
« la vieille couverture en flanelle
c’est un cadeau pour caritas
et puis le sommier pourquoi pas
tout infesté de vermine.. » 
à not’ bon dieu ça lui ira : un régal pour les mites

dans ce puits jamais assouvi
tout le pieux lait s’est écoulé
va voir par chez toi, calicot !
(car je serait déjà dire trop..)
quand la rage guide notre doigt
la rage pure folle et démente
en marche !hop hop ! au trot !
ce grognement dans l’air : merci
à la patrie ? lassé de tous ces traîne-misère
rote le général..tandis que sur pestes démentes
pistes morsures ecchymoses
l’œil de la loi roule &
  trébuche

kriegsfuß
marschmarsch ! zackzack ! trabtrab !
(denn ich wär schon zuviel gesagt)
wenn uns der haß die zunge lähmt
der blanke wahnsinns irrsinns haß
auf schwielen die das leben schlug
daß alle schwarten knacken

mit engelsmiene brüllt der herr !
« die alte decke aus flanell 
kriegt als geschenk die caritas
und eventuell das bettgestell
worin viel ungeziefer saß.. »
es paßt zum herrgottl : so mottenfraß

in diesem nimmersatten bronnen
ist alle fromme milch geronnen
schau haimwärts, ladenschwengel !
(denn ich wär scho zuviel gesagt..)
wenn uns die wut den finger führt
die bloße wahnsinns irrsinns wut

marschmarsch !zackzack !trabtrab !
dies murren in der luft :ein dank
ans vaterland ? der armenschlucker müde
rülpst der general..indes auf irren zicken
bissen trampelpfaden blutergüssen
das auge des gesetzes rollt &

  stolpert

malaria
il tient son écouteur à l’oreille du temps
tandis qu’une virgule sur la ligne craque
les dents grincent retentissent comme un lancé de bombes
à l’ouïe du scarabée luisant sur le linge noir

il veut nous montrer de quel bois il se chauffe ?
nous sommes plongés dans la fange jusqu’au cou

cependant des cadavres dérivent à la surface :
ce sont les mêmes chapeaux de styrie
presque les mêmes fonctionnaires
une épine dorsale sans os..

dans la maison du bourreau, il ne parle que de corde

lorsque les livres brûlent, ça lui fait chaud au cœur
cette fumée épaisse et grasse qui n’aurait pas voulu y cuire
sa propre petite soupe ?

ce sont les mêmes vieux mots de terreur
les mêmes marches invétérées
les bourgeonnements incessants..

alors hurler avec les loups ! et devancer les chiens !
celui qui partout fourre ses pattes prend,
impatient, le balai en main, donne un bon coup :
sympathisant !

il nettoie la scène de fond en comble,
sépare la gauche de la gauche purifie la lumière
de l’ombre : cet idiot utile
qui lui-même a du sang sur les mains

nous sommes loin encore d’être quittes..

de l’occupation illégale à l’infiltration
n’y aurait-il qu’un tout petit pas ?
sans doute à travers ce marécage
où reprisaient les enfants morts

une foule de lin blanc sur la table immaculée

sumpffieber
er hält sein hörrohr an das ohr der zeit
während ein komma in der leitung knackt:
und zähneknirschen klingt wie bombenschmeißen
dem käfer, der auf schwarzer wäsche schillert..

will er uns zeigen was ’ne harke ist?
wir stecken bis zum hals im schlamm

doch leichen treiben an die oberfläche:
es sind die alten steirerhüte noch
beinah die gleichen funktionäre noch
ein rückgrat ohne knochen..

im haus des henkers spricht er nur vom strick

wenn bücher brennen wird ihm warm ums herz
wer wollte nicht an diesem fetten qualm
ein eigenes süppchen kochen ?

es sind die alten schreckensworte noch
die eingefleischten märsche noch
die blüten ungebrochen..

drum mit den wölfen heulen ! vor die hunde gehn !
der überall die pfoten drinhat, nimmt
mit ungeduld den eisenbesen in die hand :
sympathisant !

er putzt die szene blank
trennt links von links & säubert licht
von schatten : der nützliche idiot
dem selber blut am stecken sitzt

wir sind noch lang nicht quitt..

von hausbesetzung zur zersetzung
wärs nu rein kleiner schritt ?

vielleicht durch jenen sumpf
darin toten kindlein stickten

ein haufen weißes linnen auf dem reinen tisch

Heidi Pataki, deux poèmes, dans une traduction inédite de l'allemand (Autriche) de Lucie Taïeb.
Contribution Lucie Taïeb

bio-bibliographie de Heidi Pataki

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