Pour celles et ceux qui auraient raté l'épisode précédent, je reprends le pitch, comme dirait l'homme en noir. Gran Torino, c'est l'histoire d'un retraité de l'Amérique profonde (même si l'histoire se déroule à Détroit) un peu carrément raciste sur les bords et qui vit encore dans les années 50, comme pensent ses fils : il regrette l'ancienne grandeur des Etats-Unis, et ne supporte par exemple qu'un de ses enfants roule en Nissan (lui qui a travaillé pour Ford). Sans compter que c'est un des derniers WASP – oui, je sais, il est catho, mais on me comprendra – et vétéran de la guerre de Corée de surcroît, du quartier ; celui-ci étant de plus en plus habité par des Asiatiques Hmongs.
Hmongs ? Kezaco ? - et c'est sûrement ce qui me tient le plus à cœur dans le film - car le détail a son importance, et ce ne sont pas de « simples » asiatiques comme je l'ai trop souvent lu. Heureusement y'a Libé - dont on ne manquera pas de saluer l'originalité du titre de l'article, comme bien souvent - et Les Inrock pour informer brièvement que cette ethnie sans pays fixe (à cheval sur le Laos, la Chine, et le Vietnam) après avoir aidé les Français contre les Vietnamiens lors de la guerre d'Indochine, puis les Etatsuniens contre les Vietcongs, est encore actuellement pourchassée - voire exterminée - dans la plupart des pays du Sud-Est Asiaitique susmentionné (auxquels il faut rajouté la Thaïlande)... Du coup, beaucoup de ces montagnards – peuple des collines comme dit, Sue, la sœur du second personnage principal, Thao, et non pas de la jungle comme le croit KOWALSKI, et sûrement pas mal de spectateurs – ont dû fuir, aux USA et en Guyane essentiellement (mais on en trouve aussi en France hexagonale).
Voilà, la minute culturelle passée, revenons en au film proprement dit.
Manque de bol pour Walt, sa voiture, la fameuse Gran Torino du titre, attire pas mal de convoitise. Dont celle de son jeune voisin, Thao, qui essaye de la lui voler pour intégrer un gang, plus ou moins contre son gré... Bien évidemment il échoue, mais son cousin veut qu'il intègre le gang absolument, au désespoir de sa soeur et de sa mère, qui tentent de s'y opposer. En vain... jusqu'à ce que ça dégénère sur la pelouse de Walt qui ne tolère pas « rats des marais » comme il les appelle affectueusement, et les menace de son fusil. Il n'en faut pas plus pour qu'il devienne aussitôt le héros du quartier. Qui le lui rend bien (« c'est bien les Hmongs ça de donner autant de ce genre de cadeaux – de la nourriture et des fleurs, en guise de remerciement – » dixit ma douce et tendre, qui m'a traduit deux ou trois petits trucs qui ne l'étaient pas aussi ^___^). De plus, la soeur et la mère de Thao insistent pour que ce dernier paye sa dette. Commence alors une histoire d'amitié que nul n'aurait jamais soupçonné, à commencé par Walt, même s'il reconnaît très vite qu'il a « plus en commun avec ces rats des marais qu'avec ses propres fils » (à commencer par le respect envers les aînés dont ses petits-enfants sont incapables même à l'enterrement de leur grand-mère...). Ainsi, Thao devient-il un fils de substition qu'il prend sous son aile, car il sent qu'il pourra faire de grandes choses...
Mais c'est sans compter sur le gang, qui veut avoir le dernier mot... Sauf que le Walt, c'est le genre à résoudre les problèmes, comme il dit : The right man in the right place...
OK. le film est on ne peut plus conventionnel, les ficelles sont grosses (dès le début, il grogne comme un chien à qui on aurait pris son os, même que ça en devenait irritant, mais c'est parce que le personnage devait l'être, tout simplement), tourné de manière académique, sans aucune nouveauté, mais quand bien même on se doute de la fin, on ne peut s'empêcher de penser : « non, putain, il va y avoir un truc, ça peut pas finir comme ça, c'est Clint EASTWOOD quand même !!! » Eh bien justement, c'est Clint EASTWOOD, il a pris de l'âge, la sagesse est là, et son personnage paye pour ce qu'il a fait en Corée, et surtout permet d'éradiquer une sale vermine pour qu'un gosse dont il ignorait tout, même si c'était son plus proche voisin, puisse s'en sortir, parce qu'il a encore des valeurs (il aide cette vieille femme qui a trop de courses) dans ce monde de plus en plus égoïste et superficiel où tout va à vaux-l'eau.
Franchement un très beau film, qui m'a tiré une petite larmichette, saleté de poussière dans l'oeil - et je ne suis pas le seul, visiblement !!! à deux reprises en plus !!! pfiou !!! n'empêche j'irai soit le revoir soit le prendre en DVD.