En politique, on appellerait cela "expédier les affaires courantes". Après la déconfiture de Twickenham, amère comme une marmelade, le coeur parait n'y être qu'à moitié chez les sélectionneurs du XV de France. Mais à la différence de la politique, le gouvernement Lièvremont ne paraît pas en position d'être renversé. Le président de la FFR, Pierre Camous, a indiqué qu'il n'était pas question pour lui de demander la démission de ceux qui ont été choisis par son prédécesseur. On sait bien que dans le milieu du sport, la confiance publiquement réitérée par un président à son entraîneur est souvent la première étape vers la destitution.
Pourtant, au cas d'espèce, on serait étonné que Pierre Camous cède à la pression populaire qui exige le départ de Marc Lièvremont, accusé de n'avoir pas donné corps aux espoirs de renouveau qu'il avait fait naître lors de sa nomination fin 2007.
A moins d'un revers en Italie.
La dernière performance des hommes de Nick Mallett face aux gallois peut effectivement laisser penser qu'une défaite, bien qu'improbable, est loin d'être impossible.
Cette donnée peut expliquer le choix des sélectionneurs de ne pas bouleverser une équipe qui doit se racheter de sa piètre prestation de dimanche dernier.
Le groupe n'a donc presque pas évolué, si ce n'est le retour de Frédéric Michalak convoqué comme à regret par le staff de l'équipe de France. Le petit prince de Toulouse ne trouve pas totalement grâce aux yeux de Marc Lièvremont, qui l'a convoqué pour pallier la blessure de Sébastien Tillous-Borde. Placé sur le banc, Fred pourra couvrir les deux postes de la charnière, qui reste inchangée avec Morgan Parra à la mêlée et François Trinh-Duc à l'ouverture.
On peut comprendre le choix du staff tricolore de donner du temps de jeu à une paire de demis prometteurs, d'autant que les occasions de réunir les internationaux ne seront pas nombreuses d'ici la prochaine Coupe du Monde. Car, pour ceux qui en douteraient, Marc Lièvremont et son équipe ont pour mission de préparer la prochaine édition qui se déroulera en 2011. C'est ce qu'a rappelé Pierre Camous il y a quelques jours.
Devant, Lionel Faure cède logiquement sa place à Fabien Barcella. Le grognard Sylvain Marconnet va quant à lui disputer ce qui pourrait bien être son dernier match sous le maillot bleu. Il a souffert dimanche dernier, mais devrait être en mesure de faire parler sa science et son expérience samedi.
Sébastien Chabal revient dans la cage, après son passage à l'aile de la troisième ligne. Il remplace Jérôme Thion, décevant contre l'Angleterre. On ne s'éternisera pas sur la question de savoir si le 3ème ligne de Sale a encore un avenir en bleu. La tournée de juin nous apportera peut-être un début de réponse, à condition que les sélectionneurs clarifient quelque peu leur discours...
La troisième ligne qui débutera samedi sera celle qui a terminé dimanche. Ce choix est logique, même si l'option Picamoles pouvait également se justifier. Maintenant, la vingtaine de minutes au cours desquelles le trio Dusautoir - Harinordoquy - Bonnaire a été aligné face aux Anglais ont été plutôt correctes, ce qui explique que les sélectionneurs aient fait le choix de la reconduire.
Passons sur le retour de Florian Fritz aux côtés de Yannick Jauzion, qui était attendu après la parenthèse Bastareaud.
C'est à l'arrière que le choix des sélectionneurs paraît le plus étonnant, pour ne pas dire discutable. Maxime Médard repositionné sur l'aile, c'est Damien Traille qui enfilera le maillot floqué du n°15. Et ce pour la première fois depuis une certaine demi-finale de coupe du Monde. On lui souhaite, au passage, plus de réussite samedi qu'il n'en eut lors de cette rencontre.
Au-delà de ces légitimes encouragements, on peut s'interroger sur l'intérêt de placer le biarrot à l'arrière. Certes son coup de chausson magistral permet de déplacer le jeu loin dans le camp adverse, ce qui n'est jamais inutile. Mais les performances de Maxime Médard en 15 nous paraissaient être de nature à fixer durablement le jeune Toulousain à ce poste clé du dispositif tricolore.
A un moment où l'on cherche des certitudes, pour ne pas parler de repères, le déplacement de Maxime Médard à l'aile ne nous semble donc pas du meilleur aloi.
Samedi, il est à craindre que le match soit tendu, entre des Italiens qui ne voudront pas d'une énième cuillère de bois, et des Français sous la pression d'une opinion particulièrement remontée après la grosse déception de Twickenham. En guise d'avertissement pour nos bleus, on rappellera que les Gallois ont failli repartir du stade Flaminio avec une lourde désillusion (victoire 20-15 arrachée dans les dernières minutes).
Souhaitons que le XV de France ne connaisse pas un nouveau naufrage. Si cela devait arriver, il n'est pas sûr que Marc Lièvremont puisse compter longtemps sur la confiance présidentielle.
En cas (probable) de victoire, il faudra prendre le temps d'analyser ce qui n'a pas fonctionné lors du Tournoi avant de se projeter sur les tournées d'été et d'automne. Trouver un équilibre, définir un groupe stable et travailler avec lui, voilà le programme que devraient adopter le trio de sélectionneurs.
A condition, évidemment, d'en avoir les moyens.
Sur ce point, on aimerait pouvoir dire que Marc Lièvremont peut faire confiance au Président Camous...
Composition du XV de France:
Traille (Biarritz) - Médard (Stade Toulousain), Fritz (Stade
Toulousain), Jauzion (Stade Toulousain), Heymans (Stade Toulousain)
- (o) Trinh-Duc (Montpellier), (m) Parra (Bourgoin) - Bonnaire
(Clermont), Harinordoquy (Biarritz), Dusautoir (Stade Toulousain) -
Chabal (Sale/ENG), Nallet (Castres, cap) - Marconnet (Stade
Français), Szarzewski (Stade Français), Barcella (Biarritz)
Remplaçants: Servat (Stade Toulousain), Domingo
(Clermont), Thion (Biarritz), Picamoles (Montpellier), Michalak
(Stade Toulousain), Bastareaud (Stade Français), Malzieu
(Clermont)