Minot-Gormezano. "Les miroirs III, 3, 2005".
J'ai attendu, j'ai hésité pour vous en parler... Par peur de maladresse parce qu'il m'a tellement envouté, par peur que vous pensiez: "quel sujet, non, c'est trop dur, je passe, merci bien".
C'est Clarabel qui m'a fait découvrir cet auteur et je lui dis mille mercis.
Monsieur Madone, c'est un surnom attribué par une jeune femme amoureuse, à son homme. Avec monsieur Madone la narratrice Clémentine, trente-cinq ans, a connu
l'amour, profond, sincère pendant cinq ans.Loin de toutes ses précédentes aventures, loin de tous ces hommes qu'elle catégorisait de façon désabusée, en monsieur "Putain" ou monsieur "Salope".
Mais monsieur Madone est malade. A trente huit ans. Il se sait condamné, ne peut le supporter. Il se donne la mort.
Elle croise la famille de Monsieur Madone, une famille qu'elle a aimé aussi et qu'elle n'a pas revu depuis... Car pendant cinq ans, de combats intérieurs, en fuites amoureuses ou professionnelles (elle est photographe et voyage dans le monde entier), elle essaie de l'oublier pour finalement s'effondrer.
Le temps d'une promenade dans le parc du Château de Versailles avec le frère de Monsieur Madone, ils trouvent tous les deux, les mots pour exprimer enfin l'immense vide, le spleen, crée par l'absence de cet être cher.
Maité Bernard effleure avec justesse cet échange, d'une plume fine et vigoureuse. Les langues se délient prenant la forme d'un recueillement pudique, une sorte d'hommage entre rire et larmes pour celui qu'ils aimeront toujours. Au cours de cette promenade, la nature simple qui sert de décor, renforce le naturel de cette discussion, sans jugement, sans fard. Le bonheur de se souvenir des instants du quotidien avec Monsieur Madone est plus fort que tout. Car tout est tendresse, douceur. Point de mélancolie, elle nous entraine simplement dans un flot d'émotions pures, tout en mesure, sur la route du souvenir d'un être cher. Et sous sa plume talentueuse, Monsieur Madone, cet absent si présent, est un magnifique personnage de roman.
Parfois, à la lecture d'un livre, un film me vient à l'esprit, comme pour le précédent...Pour Monsieur Madone, Editions Le Passage, peut-être est-ce l'influence de la narratrice photographe, la description ds paysages, mais c'est de photographie dont j'ai envie de vous parler pour conclure ce billet. Juste une émotion, un ressenti entre deux univers pour lesquels j'ai envie de faire un pont. Allez donc voir l'exposition sur "L'ombre et le reflet" de Minot-Gormezano à la MEP. Tout en noir et blanc, de très beaux moments d'évasions entre le réel et l'imaginaire...