Comme le disait Edgar Morin il y a maintenant quelques années: “la tragédie écologique qui a commencé est la première catastrophe planétaire provoquée par la carence fondamentale de notre mode de connaissance et par la méconnaissance que comporte ce mode de connaissance”.
On peut expliquer la situation actuelle par au moins trois prismes:
- Le premier est, comme le souligne Morin, celui d’une connaissance qui sépare, mutile, néglige la complexité intrinsèque du vivant et ses rétroactions comme ses bouclages à multiples niveaux, qui n’a pas alerté assez tôt sur les effets des gaspillages des bien publics universels que sont l’eau, l’air, les océans et l’occupation de la terre. Qui s’est complue dans “la main invisible du marché”, oubliant que l’économie n’est qu’une science humaine, non-rédictible à des algorithmes. Des connaissance certes très pointue dans chacun de leurs domaines, mais qui négligent les contextes, les crises et catastrophes, les fluctations/oscillations, les rapports centre-périphéries, …ainsi que les effets autres que linéaires dès qu’on entre dans de grandes échelles.
- Le deuxième est celui de la course folle à l’argent fou, où tout est sacrifié à l’opportunité de “faire” du fric et où ceux qui en ont beaucoup se sont ingéniés à casser les pauvres sécurités qui pouvaient exister, sont entrés dans une frénésie de dérégulation, ont fait oeuvre créative pour sophistiquer les mécanismes spéculatifs, dans l’unique souci d’en faire davantage (d’argent), toujours plus, toujours plus de la même chose, jusqu’à ce que le système vacille sérieusement et soit à la limite de l’oscillation. Faisons vivre les pauvres à crédits (car il faut bien que ces chiens consomment sinon le système se bloque), pillons, dégradons, massacrons l’eau, l’air, la mer et la terre, sans retenue et sans scrupules tant que cela peut fabriquer, à court terme, davantage d’argent pour ceux qui en possèdent déjà. Ces cons de pauvres paieront l’addition au nom, eux, de l’intérêt général.
- Le troisième est celui, indissolublement lié de la démocratie et de la citoyenneté. Et de tous ces grands experts et beaux-parleurs qui se sont ingéniés à nous expliquer qu’il n’y avait pas d’alternative aux dérégulations de la mondialisation financière. Les mêmes qui continuent de squatter les plateaux de télévision et les tribunes des journaux pour supplier qu’on laisse les mains invisibles du marché se remettre en marche une fois que les contribuables auront payé les pertes des spéculateurs, qu’il faut “relancer la croissance”, … La démocratie est bafouée depuis une bonne vingtaine d’années, les revendications élémentaires ayant été sacrifiées au nom de la sécurité, de la fracture sociale, de la lutte contre l’immigration, en fait au bénéfice des financiers, rentiers et spéculateurs responsables de la crise actuelle. Mais ces dénis de démocratie n’ont été rendus possibles que par la quasi-disparition des citoyennetés fortes sans lesquelles il n’est pas de démocratie et encore moins de République. Elles ont été aussi possibles par une gauche qui souhaitait la concurrence “libre et non faussée” au niveau européen.
Des citoyennetés qui ne prennent pas pour argent comptant la propagande élyséenne relayée par TF1, des citoyennetés qui travaillent, réfléchissent, échangent, au lieu de consommer, se montrer et se barricader le soir dans la peur de l’autre.
Vaste programme ?
- Paradis fiscaux: la totalité du CAC 40 y est implantée avec pas moins de 1 470 filiales. Marianne/Alternatives Economiques. Cela leur permet de faire “fructifier discrètement et au moindre coût fiscal le patrimoine des personnes aisées, gérer les salaires des cadres à haut revenu en dehors du regard du fisc, accompagner les stratégies internationales des multinationales qui pratiquent “l’optimisation fiscale”".
- Rattitude ? Blog de Ph. Bilger.
- “42% des anciens électeurs du chef de l’Etat affichent désormais leur solidarité avec la mobilisation du 19 mars, contre 54%, preuve s’il en est que les réponses qu’il apporte à la crise ne satisfont guère”. Le Monde/AFP/Reuters. Dans la même dépêche, cette immortelle phrase de F. Fillon: “Toute enveloppe supplémentaire, c’est de la dette supplémentaire”. Que n’y a-t-il pensé plus tôt, lors de la mise en place du “bouclier fiscal” et de la TVA à 5,5% pour la restauration?
- Libertés: on grignote, on grignote… Rue 89.
- OTAN: “Lorsque Jean-Pierre Elkabbach lui a, par exemple, opposé l’argument qui consiste à dire qu’un pays affichant sa proximité avec les Américains acquiert nécessairement force et indépendance, l’ancien ministre des Affaires étrangères s’est presque fait moqueur : «C’est ce qu’ont cru les Britanniques (…). Il faut avoir la foi pour croire cet argument, la foi atlantiste !»”. Marianne.