Je n'irai pas voir Welcome, de Philippe Lioret. D'abord parce que le nom même de ce "Ken Loach français" me fait bailler d'ennui dès que je l'entrevois, confortablement étalé sur un journal ou sur une page du net. Et ça arrive souvent, en ce moment, avec les fameux propos du cinéaste, engagé bien sûr, comparant les immigrés de l'aire Sarkozy aux Juifs de l'Occupation. Bref, si je vais voir le film, il faudra que je me positionne sur ce point, que je dise que non, bon sang, la comparaison est odieuse, et que je concède néanmoins une certaine et louable humanité à ce talentueux conteur, déjà remarqué pour Je vais bien ne t'en fais pas. Trois remarques formelles un peu méprisantes conclueraient cet article insipide, où je ne manquerais pas de m'étonner de l'enthousiasme que suscite le film chez les critiques - peut-être pour dissimuler ma propre incompréhension devant cette forme de cinéma. Tout un programme, qui me fatigue déjà et auquel je préfère renoncer d'avance.
En revanche je suis allé voir L'Enquête - The International, de Thomas Tykwer. C'est un pur chef d'oeuvre. Non, c'est faux: c'est très moyen. Ce qui est vrai en revanche, c'est que Naomi Watts et Clive Owen forment un sacré duo. L'une parce qu'elle est toujours aussi belle, avec sa fausse candeur de blonde (Mulholland Drive, quand tu nous tiens...) complétée par une légère et charmante imperfection de la machoire. L'autre parce qu'il est définitivement la nouvelle gueule du cinéma anglo-saxon - terriblement viril, au dire d'une amie très proche. Il sera aussi bientôt à l'affiche d'un film avec Julia Roberts, appelé Duplicity (il y a fort à parier que la thématique de la duplicité y sera évoquée), dont la bande annonce fait penser dans le même temps à Mr & Mrs Smith et à Ocean's Eleven. L'avant-garde, quoi.
Pour revenir à notre couple qui aurait pu être mythique, il faut préciser que la mise en scène, dans L'Enquête, s'attache à réfrigérer presque méthodiquement toute forme de chaleur, émotive ou sensuelle. C'est le cadre qui veut ça, celui des banques internationales, aux architectures gigantesques et transparentes - le genre d'endroit que Michael Mann aurait pu filmer en mieux. Et tout cela donne étonnamment l'impression d'être enduré, éprouvé du point de vue des comploteurs, des banquiers cosmopolites tirant les ficelles. On voit, comme derrière une vitre, le héros se battre et se débattre en vain contre un système froid, aussi injuste qu'implacable.
"Salauds de banquiers", me semble être le mot de la fin le plus pertinent. PS: Vous remarquerez bientôt l'apparition, à droite, d'une rubrique "Je n'irai pas voir", dans laquelle cet article sera rangé, et où je pousserai la mauvaise foi jusqu'à critiquer des films que je n'ai pas vus. Car c'est plus drôle.