Chers animateurs et animatrices de «La Soupe»,
Je suis un fidèle auditeur de votre émission depuis sa première édition. Pour moi, depuis bientôt dix ans, la vie n’a de sens que parce que je sais qu’au bout d’une dure semaine de labeur, de contrariétés, de vexations, voire d’humiliations, je pourrai me raccrocher à notre rendez-vous hebdomadaire comme un naufragé à son radeau.
Je suis un amateur inconditionnel, un admirateur absolu, un amoureux fou, en un mot comme en cent un toxicodépendant de ce moment de plaisir et de volupté qui nous réunit chaque dimanche à l’heure du culte ou de la messe.
Pour rien au monde je n’accepterais de sacrifier mon heure et demie de jouissance radiophonique.
Je loue, que dis-je, je porte aux nues votre travail journalistique, vos enquêtes fouillées, vos réflexions pertinentes, votre travail acharné, votre déontologie professionnelle absolue, votre passion indéfectible, votre objectivité sans faille, bref votre perfection.
Une perfection jamais prise en faille jusqu’à ce triste dimanche 15 mars 2009 où vous vous en êtes pris au symbole consubstantiel du pays qui vous nourrit : le citoyen-soldat. Un citoyen-soldat que vous avez méprisé, humilié et bafoué en annonçant péremptoirement dans le cadre d’une interview du père de la meilleure armée du monde qui divulguait sa première mesure de modernisation du matériel militaire par la remise à la troupe du nouveau couteau militaire vert :
« Nos soldats seront enfin camouflés pour déboucher leurs bouteilles »
Quel mensonge ! Quelle trahison ! Quelle ignominie ! Quelle infamie ! Quelle abjection que ces propos révisionnistes.
Comment est-il possible que vous, grands déboucheurs de bouteilles du dimanche matin – ne dites pas le contraire, je vous en ai apporté quelques-unes à vos débuts et je sais très bien que vous continuez –, ne sachiez pas que le couteau suisse du soldat ne possède PAS de tire-bouchon. Un tire-bouchon que la meilleure armée du monde réserve à son élite, à sa fine fleur, à sa crème, à son aristocratie … à ses officiers.
Comment se fait-il que vous ayez pu vous fourvoyer de cette manière ? Etes-vous tous des officiers ou des anciens officiers de la meilleure armée du monde ? Avez-vous touché des pots de vin d’Armasuisse ? Etes-vous devenus les taupes radiophoniques de la Société suisse des officiers ? Entretenez-vous des relations inavouables avec le père de la meilleure armée du monde ?
Je n’en sais trop rien, mais une chose est certaine, en insinuant que le citoyen-soldat suisse boit pendant qu’il remplit son devoir tout en vous jetant vous-même une lampée de blanc derrière la cravate, vous m’avez terriblement et irrémédiablement déçu.
Ainsi, à partir de maintenant et dorénavant, vous êtes dissous, fondus dans le paysage médiatique romand comme le couteau suisse s’est fondu dans la grisaille verdâtre du matériel de notre glorieuse meilleure armée du monde. Tout comme lui, vous avez perdu votre magnifique éclat métallique et vous avez disparu phagocyté dans la masse des médias. Vous êtes devenus inexistants, rayés des écrans radars et de mes rendez-vous radiophoniques. Je ne vous écouterai plus jamais, vils et viles fossoyeurs du plus beau symbole de notre pays.
Je vous adresse mes salutations les plus dédaigneuses et vous souhaite vivement de vous retrouver un dimanche matin sans tire-bouchon.