Je crains fort que le pompon de la bêtise en matière théâtrale ne revienne à Armelle Héliot, honorable publicitaire en charge du théâtre au Figaro.
Laquelle tient blog de ses prétendues critiques de spectacles, sous le titre en l’espèce mensonger, et pas seulement parce qu’il serait voisin du mien : Le grand théâtre du monde.
Le petit monde du théâtre eût été bien plus juste, mais il n’y a pas à attendre d’un critique aujourd’hui un minimum de réalisme, ou simplement d’honnêteté, quant à sa pratique mondaine.
(Je précise qu’il m’est déjà arrivé, en de rares occasions, de partager l’avis d’Armelle Héliot ; mais c’est certainement mon tort, n’étant pas encore parvenu à détester tout de ce que produit le théâtre de mon époque, et me refusant par principe, malgré l’évidence, à un tel systématisme.)
Le pompon de la bêtise, disais-je donc, me semble avoir été décroché par cette dame, non pas en tel ou tel article, mais dans sa définition même du théâtre, celle-là qu’on peut voir figurer dans la colonne de droite de son joli blog au titre mensonger ; ainsi dit-elle, après avoir constaté ce fait que son journal est le seul à porter pour titre le nom d’un personnage de théâtre :
La vitalité de cet art est telle, que, pour en rendre compte, un blog sans cesse remis à jour est idéal pour informer sur les spectacles à l’affiche, les projets, pour mettre en lumière tous les artistes qui constituent ce grand théâtre du monde qui fascine, divertit et enseigne la tolérance.
Voilà une phrase admirable de part en part.
D’abord parce que sa syntaxe est assez critiquable, et pour le moins, hétérodoxe ; et conséquemment très moderne.
Ensuite parce qu’elle a le mérite, certainement involontaire, d’être drôle :
1 Pour trouver au théâtre d’aujourd’hui une vitalité, il faut certainement s’appuyer sur les seuls éléments quantitatifs disponibles.
2 Imaginer qu’un blog est idéal pour, entre autres choses, rendre compte de cette vitalité proclamée fait montre d’une foi naïve et conséquente dans la supériorité intrinsèque des outils de la modernité (je puis même voir là une manière habile de plaindre le théâtre des époques antérieures de n’avoir pas connu notre belle technologie : ah, si les blogs avaient pu offrir à Shakespeare et Molière une notoriété comparable à celle dont jouissent auourd’hui Michel Deutsch ou Jean-Luc Lagarce !).
3 Ce blog se veut non seulement égalitaire mais égalitariste, et peut-être même, dans l’égalitarisme, exhaustif, puisqu’il se donne pour mission de mettre en lumière (Aufklärung un jour, Aufklärung toujours) tous les artistes (vous entendez : tous les artistes !) qui constituent ce grand théâtre du monde… Je ne m’étendrai pas ici sur le contresens, dont je ne saurais dire s’il est ou non volontaire, quant au grand théâtre du monde, dont la définition pour ainsi dire canonique est : TOTUS MUNDUS AGIT HISTRIONEM, c’est-à-dire : tout le monde se comporte en comédien, phrase qui rapporte le monde au théâtre et non l’inverse, et devrait en droit imposer à Armelle Héliot de nommer non seulement « tous les artistes », comme elle dit si mal, mais toutes les personnes de ce monde amenées, fût-ce une fois dans leur vie, à prendre la parole en public. Mais passons…
4 … et venons enfin à notre pompon, lequel tient en la définition qu’au passage Armelle Héliot, véritable successeuse de ce ringard d’Aristote, donne de ce prétendu théâtre :
FASCINER
DIVERTIR
ENSEIGNER LA TOLERANCE
C’est tout bonnement extraordinaire.
D’abord parce que c’est vrai.
Et pas seulement du théâtre, mais de toutes les autres ignominies spectaculaires qui se torchent aujourd’hui en ce monde. Et pas seulement parce que cela explique très bien pourquoi, fascination pour fascination, divertissement pour divertissement, enseignement de la tolérance pour enseignement de la tolérance, les gens préfèrent demeurer devant leur série télé US ou leur téléfilm français idiot que de se faire chier littéralement au théâtre.
Mais surtout parce que, très nettement, c’est Big Brother qui vous parle.
Armelle Héliot est un personnage du 1984 d’Orwell
Et en bonne logique, elle ne le sait pas.
Je crains fort que le pompon de la bêtise en matière théâtrale ne revienne à Armelle Héliot, honorable publicitaire en charge du théâtre au Figaro.
Laquelle tient blog de ses prétendues critiques de spectacles, sous le titre en l’espèce mensonger, et pas seulement parce qu’il serait voisin du mien : Le grand théâtre du monde.
Le petit monde du théâtre eût été bien plus juste, mais il n’y a pas à attendre d’un critique aujourd’hui un minimum de réalisme, ou simplement d’honnêteté, quant à sa pratique mondaine.
(Je précise qu’il m’est déjà arrivé, en de rares occasions, de partager l’avis d’Armelle Héliot ; mais c’est certainement mon tort, n’étant pas encore parvenu à détester tout de ce que produit le théâtre de mon époque, et me refusant par principe, malgré l’évidence, à un tel systématisme.)
Le pompon de la bêtise, disais-je donc, me semble avoir été décroché par cette dame, non pas en tel ou tel article, mais dans sa définition même du théâtre, celle-là qu’on peut voir figurer dans la colonne de droite de son joli blog au titre mensonger ; ainsi dit-elle, après avoir constaté ce fait que son journal est le seul à porter pour titre le nom d’un personnage de théâtre :
La vitalité de cet art est telle, que, pour en rendre compte, un blog sans cesse remis à jour est idéal pour informer sur les spectacles à l’affiche, les projets, pour mettre en lumière tous les artistes qui constituent ce grand théâtre du monde qui fascine, divertit et enseigne la tolérance.
Voilà une phrase admirable de part en part.
D’abord parce que sa syntaxe est assez critiquable, et pour le moins, hétérodoxe ; et conséquemment très moderne.
Ensuite parce qu’elle a le mérite, certainement involontaire, d’être drôle :
1 Pour trouver au théâtre d’aujourd’hui une vitalité, il faut certainement s’appuyer sur les seuls éléments quantitatifs disponibles.
2 Imaginer qu’un blog est idéal pour, entre autres choses, rendre compte de cette vitalité proclamée fait montre d’une foi naïve et conséquente dans la supériorité intrinsèque des outils de la modernité (je puis même voir là une manière habile de plaindre le théâtre des époques antérieures de n’avoir pas connu notre belle technologie : ah, si les blogs avaient pu offrir à Shakespeare et Molière une notoriété comparable à celle dont jouissent auourd’hui Michel Deutsch ou Jean-Luc Lagarce !).
3 Ce blog se veut non seulement égalitaire mais égalitariste, et peut-être même, dans l’égalitarisme, exhaustif, puisqu’il se donne pour mission de mettre en lumière (Aufklärung un jour, Aufklärung toujours) tous les artistes (vous entendez : tous les artistes !) qui constituent ce grand théâtre du monde… Je ne m’étendrai pas ici sur le contresens, dont je ne saurais dire s’il est ou non volontaire, quant au grand théâtre du monde, dont la définition pour ainsi dire canonique est : TOTUS MUNDUS AGIT HISTRIONEM, c’est-à-dire : tout le monde se comporte en comédien, phrase qui rapporte le monde au théâtre et non l’inverse, et devrait en droit imposer à Armelle Héliot de nommer non seulement « tous les artistes », comme elle dit si mal, mais toutes les personnes de ce monde amenées, fût-ce une fois dans leur vie, à prendre la parole en public. Mais passons…
4 … et venons enfin à notre pompon, lequel tient en la définition qu’au passage Armelle Héliot, véritable successeuse de ce ringard d’Aristote, donne de ce prétendu théâtre :
FASCINER
DIVERTIR
ENSEIGNER LA TOLERANCE
C’est tout bonnement extraordinaire.
D’abord parce que c’est vrai.
Et pas seulement du théâtre, mais de toutes les autres ignominies spectaculaires qui se torchent aujourd’hui en ce monde. Et pas seulement parce que cela explique très bien pourquoi, fascination pour fascination, divertissement pour divertissement, enseignement de la tolérance pour enseignement de la tolérance, les gens préfèrent demeurer devant leur série télé US ou leur téléfilm français idiot que de se faire chier littéralement au théâtre.
Mais surtout parce que, très nettement, c’est Big Brother qui vous parle.
Armelle Héliot est un personnage du 1984 d’Orwell
Et en bonne logique, elle ne le sait pas.