A neuf mois du grand rendez-vous des politiques, qui devront, à Copenhague, s'accorder (ou pas) sur les réductions de gaz à effet de serre, plus de 2000 scientifiques, venus du monde entier, se sont réunis cette semaine pour dire et redire l'urgence de la situation, pour démontrer que le doute n'est plus permis...
"Imaginez un avion dont la probabilité d'arriver à destination est de 10 %. Monteriez-vous à bord ? Evidemment non..." Stefan Rahmstorf, de l'Institut de recherches de Potsdam sur le climat, aime bien cette métaphore pour expliquer ce qui est en train de se passer... tout se passe comme si les gouvernements s'interrogeaient encore sur la possibilité d'embarquer dans cet avion promis à la catastrophe !
"Les implications de mes travaux m'empêchent parfois de dormir", reconnaît Katherine Richardson, de l'université de Copenhague. Le constat fait l'objet d'un très large consensus: un réchauffement de la planète d'autant plus périlleux que "la stabilité du climat a été un des moteurs du développement de nos civilisations depuis 10.000 ans", rappelle le climatologue français Jean Jouzel.
"La science est excitante quand vous faites des découvertes importantes. Mais lorsque vous regardez ce qui se profile pour l'humanité, cela fait plutôt peur", explique Konrad Steffen, directeur de l'Institut de recherche sur les sciences de l'environnement (CIRES), basé à Boulder (Colorado).
Au-delà du constat purement scientifique, la lenteur des réactions face au caractère de plus en plus alarmant des travaux publiés inquiète. "Peut-être que la société a réalisé la gravité du sujet mais elle n'a certainement pas réalisé l'urgence", juge l'Australien John Church, qui travaille sur la montée des océans.Le glaciologue français Claude Lorius, dont les travaux ont fait la Une du magazine Nature en 1987, ne cache pas un pessimisme profond. "Au début, je pensais qu'on allait convaincre, qu'on allait y arriver. Mais il y a une inertie considérable", explique-t-il. "C'est le comportement de la société, de l'homme, qui n'est pas à la hauteur pour répondre à une crise comme celle là".
Nombre de scientifiques interrogés résistent cependant à la tentation d'une vision trop sombre.
"Même si vous êtes pessimiste - et je le suis parfois - cela ne sert à rien. Si vous suivez cette voie, qu'allez-vous faire, vous couper les mains ?", dit John Church, convaincu que son rôle consiste, inlassablement, à "rendre la science plus solide, plus convaincante".
En outre, soulignent certains, une posture trop alarmiste peut avoir des effets pervers."Ce qui m'inquiète le plus, c'est que les gens soient dépassés, psychologiquement, par l'énormité du problème et qu'ils choisissent de ne rien faire", concède William Howard, de l'Université de Tasmanie."Il y a un risque de faire la politique de l'autruche et de passer du camp du déni à celui du désespoir", note Johan Rockstrom, qui dirige l'Institut de l'environnement de Stockholm.
"C'est faux qu'on ne peut rien faire d'autre!", tempête Jean Jouzel. "Il faut une véritable volonté! Je ne sais pas si on a cette volonté, mais il ne faut pas dire que c'est impossible!"
Les conclusions de ces trois jours de réunion (10-12 mars), pendant lesquels climatologues, économistes, sociologues, se sont exprimés, seront synthétisées dans un document qui sera publié en juin 2009. Ce document permettra aux pays participants aux négociations internationales sur le climat de mettre à jour leurs connaissances.
La capitale danoise accueillera en décembre prochain le grand sommet international sur le climat (UNFCCC), sous l’égide de l’ONU, qui doit permettre d’accoucher d’un nouvel accord prenant la suite du protocole de Kyoto, qui s’achève en 2012.
Source : AFP
GC.
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