Mais le destin en décide autrement (ou le doigt de Dieu puisque l’Irlande du 7ème siècle est quasi christianisée). Poussés par la tempête sur les côtes du royaume breton de Dyfed, au pays de Galles, ils se réfugient en une abbaye. Là, comme rien ne se perd, ils y sont reconnus comme enquêteurs hors pair et juristes habiles. Le roi Gwlyddien leur confie une étrange mission.
Il s’agit de savoir pourquoi une abbaye d’une trentaine de moines, dont le fils du roi devenu frère, s’est vidée de tous ses habitants sans que rien ne soit dérangé ni qu’aucune violence ne signale un quelconque forfait. Serait-ce le diable ? Fidelma l’irlandaise, comme Eadulf le saxon sont positifs : ils réservent cette hypothèse audacieuse au cas où rien ne viendrait la démentir. En attendant, ils ne renoncent pas et se mettent en piste.
Ils arrivent à proximité des lieux alors qu’une foule villageoise en colère s’apprête à pendre un jeune berger, trouvé à proximité du cadavre de son amie de 16 ans, étranglée et couverte de sang sur le sexe. Pour les simples, manipulés à merci par les haineux, la cause est entendue : les jeunes gens se sont disputés, il l’a violée, puis étranglée, qu’on le pende ! Ainsi vont les mœurs médiatiques de ce temps. Le nôtre n’a guère changé, même si la pendaison s’effectue plutôt par polémiques médiatiques et petites phrases venimeuses…
Un seigneur local étrangement laxiste, un forgeron qui joue les gros bras, des femmes battues ou délaissées, des jeunes trop soumis, des pirates saxons qui rôdent au bord des côtes, sur leur esnèque rapide, un royaume voisin envieux, de louches brigands dont le chef cite les classiques latins… Voilà tout le décor de ce pays sauvage où les passions humaines tournent autour du sexe et du pouvoir comme il se doit – et comme partout ailleurs.
L’enquête sera difficile, les pistes embrouillées, les dangers réels. Les 350 pages sont bien conduites jusqu’au théâtre final. Règne sur la contrée une atmosphère de maléfices et les deux amis se querellent à tout propos. Jusqu’à ce que l’un trouve dans son gâteau de Samain (la Toussaints pré-chrétienne) un anneau d’acier, tandis que sa promise trouvera une noisette… Devinez à qui cela arrive ? Dès lors, ne sont-ils pas voués l’un à l’autre ?
Peter Tremayne, Les disparus de Dyfed (Smoke in the wind), 2001, 10/18 Grands Détectives, 2008, 348 pages, 7.51€