Emploi: Sarkozy dans d'impasse

Publié le 13 mars 2009 par Juan

Les nouvelles se confirment. Un emploi qui se dégrade, un pôle emploi qui n'est pas (encore) à la hauteur, et un paradigme sarkozyen inchangé. Là est la vraie suprise. Quand Nicolas Sarkozy se résoudra-t-il à reconnaître que ses "heures sup" sont un échec anachronique et les 35 heures un amortisseur contre les secousses du travail salarié pour nombre d'entreprises ? Sans doute jamais. Aussi est-il bon de le rappeler à tous.
Des précaires qui trinquent
Fin décembre 2008, la France comptait quelques 18 millions de salariés, soit 100 000 de moins en un an. Le seul 4ème trimestre 2008 a perdu 106 800 emplois, un signe supplémentaire de la dégradation accélérée de l'économie française. L'intérim, l'industrie et la construction ont particulièrement souffert. Cette annonce, jeudi 12 mars, du ministère de l'emploi est une nouvelle douche froide. "2008 ressemble à 1991, année d'un fort retournement avant les fortes baisses d'emploi de 1992 et 1993", a renchérit le directeur des statistiques de Pôle emploi, Bernard Ernst. Si 2009 s'annonce donc plombée, l'année 2010 fait déjà grise mine.
Mercredi 11 mars, l'UNEDIC a publié de nouvelles prévisions : l'organisme a réévalué à 454 000 (contre 282.000 il y a quelques semaines) le nombre de demandeurs d'emplois (de catégorie 1) supplémentaires cette année. Et l'essentiel de cette dégradation concerne les salariés les plus précaires, des fins de CDD ou d'intérim, marginalement concernés par la réforme de l'assurance-chômage qui entrera en vigueur le 1er avril: avec de faibles droits à indemnisation (inférieurs de 30% à la moyenne), ils tombent rapidement dans le RMI. Ils sont également exclus du bénéfice de la prime de 500 euros, réservée aux jeunes primo-demandeurs d'emploi, et du nouveau dispositif en faveur du chômage partiel.
Les incohérences du Pôle Emploi
En début d'année, le gouvernement s'est félicité de la création du "pôle emploi", issu de la fusion des Assedics et de l'Unedic. Interrogé jeudi 12 mars par les Echos, son directeur général fait des révélations surprenantes: le nombre de contrats aidés conclus depuis le 1er janvier 2009 reste très faible. Pourquoi ? A cause de la fusion Assedic-Unedic("Il y a aussi sans doute eu des retards liés à la fusion"), des collectivités insuffisamment aidées ("Les collectivités locales et les associations ont des difficultés financières"), et des administrations immobiles ("les grandes administrations comme l'Education nationale et la Justice doivent sans doute plus se mobiliser"). En début de semaine, le même Christian Charpy expliquait que la fusion du pôle emploi aggravait les difficultés des 45 000 agents du pôle emploi à maîtriser l'afflux de nouveaux chômeurs. 50 à 55 000 chômeurs sont en attente, "un niveau normal" d'après lui, et la plate-forme téléphonique ("3949") n'arrive toujours pas à traiter un tiers des appels reçus.
M. Charpy confirme aussi que "l'Offre Raisonnable d'Emploi" n'est pas appliquée. Comme le note Actuchômage, "La machine tourne à vide, le nombre de propositions inadéquates avec obligation de postuler s'étant multiplié. On nage dans l'absurde."

"Les agents appliquent-ils la nouvelle législation sur l'offre raisonnable d'emploi ?

Je me suis engagé auprès de Christine Lagarde et de Laurent Wauquiez à leur remettre fin avril un rapport sur l'application de ce dispositif, mis en place fin octobre. Il y a aujourd'hui un nombre limité de sanctions : 10 par mois en cumulé avec les refus d'élaboration du plan personnalisé d'aide au retour à l'emploi. C'est lié à la crise qui se traduit par une baisse importante du nombre d'offres d'emploi."


Les heures sup', mesure-symbole inutile et coûteuse
Bizarrement, le gouvernement n'ose pas reconnaître que la défiscalisation des heures supplémentaires a accéléré les destructions d'emploi. "La crise a un effet extrêmement brutal sur l'emploi, parce que les intérimaires, premiers sacrifiés, sont bien plus nombreux qu'il y a une vingtaine d'années, près de 750.000 mi-2008 contre 300.000 au début des années 1990", expliquait le directeur général de Pôle emploi, Christian Charpy. Le plongeon de l'intérim a débuté en mars, bien avant la crise financière et le chômage dans les autres secteurs. Mois après mois depuis mars 2008, la fédération patronale de l'intérim confirme la chute de l'emploi dans son secteur: la baisse du nombre de salariés intérimaires s'est encore aggravée en février, avec - 35 % par rapport au même mois de l'année précédente.
La défiscalisation des heures supplémentaires coûte quelque 2,8 milliards d'euros par an d'exonérations (sans compter le manque à gagner de recettes fiscales). "travailler plus pour gagner plus" ? Pour qui ? "La stabilité du nombre d'heures supplémentaires et le niveau élevé de leur volume montrent que le recours au dispositif n'a pas été affecté par le retournement de l'activité économique aux troisième et quatrième trimestres 2008" note Le Monde. Effectivement, les heures supplémentaires sont devenues une trappe à emploi. Pourquoi embaucher quand l'Etat subventionne les heures sup des travailleurs restants ? Par souci d'affichage idéologique, il faut bien cacher l'échec de ces mesures. Eric Heyer , directeur adjoint de l'Observatoire français des conjonctures économiques, explique :

"Le gouvernement se rend bien compte qu'augmenter le temps de travail dans une période de destruction d'activité n'est pas une bonne solution. Mais au lieu de revenir sur son dispositif en faveur des heures supplémentaires, il préconise un recours au chômage partiel qui est bien une forme de réduction du temps de travail.

En fait, les 35 heures ont permis une flexibilité énorme pour les chefs d'entreprise en annualisant le temps de travail. Dans la dernière période, les entreprises ont pu jouer avec la souplesse des "RTT" et éviter ou retarder le recours au chômage partiel. Lors de la crise de 1993, avant les lois sur les 35 heures, le chômage partiel a été trois fois plus important."

Le régime des 35 heures, amortisseur de la crise de l'emploi ?

Et oui.

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