Logique des universités

Par Christophefaurie
Qu’est-ce que cela signifierait de faire ressembler les universités françaises et américaines ?
  • Le discours officiel mélange deux fonctions de l’université. La première est de former une partie de la population (jusqu’à la licence, aux USA, chez nous plutôt à l‘équivalent du Master américain soit bac + 5). La seconde est la recherche.
  • Ensuite, le modèle américain repose sur un corps enseignant bien payé. Il semblerait que les salaires moyens des professeurs soient de l’ordre de 100K€ contre 37 en France. En outre, si j’en juge par là où j’enseigne, la France utilise beaucoup de vacataires qu’elle ne paie quasiment pas, mais qui donnent des cours attribués ailleurs à un professeur en titre. Je soupçonne donc que l’université française a une structure de coûts extrêmement faible.
  • Probablement, en conséquence, faire des études aux USA est cher. http://web.mit.edu/facts/tuition.html explique qu’au MIT : Nine months' tuition and fees for 2008–2009 is $36,390. Additionally, undergraduate room and board is approximately $10,860, dependent on the student's housing and dining arrangements. Books and personal expenses are about $2,850. Ce qui fait 50.000$ par an (plus que le PIB moyen par habitant). Soit 200.000$ pour avoir une licence. Bien sûr, il est possible d’emprunter, mais il faut pouvoir obtenir des salaires élevés pour rembourser de telles sommes. Ce qui signifie qu’il ne peut pas y avoir une grosse partie de la population diplômée, puisque la proportion de la population recevant de tels salaires est faible.
  • À ce point on nous dit que les universités américaines se financent en levant des fonds. C’est juste, mais ces fonds alimentent essentiellement la recherche, pas les « under graduates ». Et je ne suis pas sûr qu’il y ait là le mécanisme économique vertueux que l’on pense. J’ai noté que les anciens élèves anglo-saxons font souvent de très grosses donations à leur université. Il leur arrive, par exemple, de financer une chaire. On peut aussi imaginer qu’ils orientent les versements des entreprises qu’ils dirigent. Ils le font parce qu’ils sont reconnaissants à leur université de la richesse qu’elle leur a donnée. Mais cette richesse est-elle due à l’excellence de l’enseignement ou à la rareté des diplômés, et à ce que, du fait de cette rareté, les puissants se connaissent, ce qui facilite l’établissement des relations d’affaires ?
Je me demande donc si le cercle vertueux qu’induit l’université anglo-saxonne n’est pas simplement dû au fait qu’elle permet à une petite élite de monopoliser toutes les ressources économiques du pays, ce qu’elle lui rend en partie. Je me demande aussi la fonction de l’université à privilégier. Si c’est l’intelligence collective, l’épanouissement du citoyen, plutôt que la performance économique, alors la fonction de formation domine. Et là le modèle français paraît bien meilleur que l’américain : il forme beaucoup plus de monde de manière satisfaisante. D’ailleurs, ce qui compte encore plus est probablement l’enseignement initial, la qualité des instituteurs, puis des enseignants de collèges et de lycées, et, finalement, celle de l’élite des universités.