Interdire ? Mais pourquoi au juste ?

Publié le 11 mars 2009 par Jarousseau

Interdire. Le gouvernement et les parlementaires de droite n’ont que ce mot à la bouche quant il s'agit des jeunes. Il suffit qu'un fait d'actualité, un sujet fasse la une des médias et voilà aussitôt une proposition de loi qui sort pour interdire. L’Assemblée nationale et le Sénat croulent sous les textes à visées contraignantes. Mais au fond, à quoi servent-ils ? Soient inadaptées, soient inapplicables, soient aisément contournables. Il en va ainsi de plusieurs projets de loi en discussion actuellement au Palais Bourbon.


La loi Hadopi vient de passer, sanctionnant les téléchargements "peer to peer". L’opération, “copie privée” est autorisée lorsque vous achetez un CD et que vous le copiez. Elle est interdite en-ligne. Qui est principalement pénalisé ? Les jeunes, car, à 15 ans ou 16 ans, on a généralement pas les moyens de se payer un à deux CD par mois ou payer ses musiques sur Itunes. Ce sont les mêmes jeunes qu’on “responsabilise” avec l’interdiction d’acheter des cigarettes si l’on est mineur, les mêmes à qui l’on interdit la vente d'alcool, l'accès à certains jeux vidéos, interdiction de manifester...
Certes, je ne suis pas adepte d’une société où l'on encouragerait les jeunes à se "défoncer". Si je ne suis pas spécialement adepte d’une société outrageusement “permissive”, je m’interroge. A la veille du second tour de l'élection présidentielle, Nicolas Sarkozy annonçait qu'il voulait en finir avec "l'héritage de mai 68". Résultat, en marge d'une politique anti-sociale, qui éteint à petit feu ce qui hier était considéré comme des acquis sociaux, on assiste aujourd'hui à une frénésie législative et réglementaire, une accumulation d’interdictions et d’obligations de toutes sortes, essentiellement centrées sur les jeunes.
Cette frénésie législative permet aux députés de la majorité de faire illusion, de retourner devant leurs électeurs et d'une certaine manière prouver qu'ils servent encore à quelque chose. Mais l'on oublie un peu vite que la jeunesse est une couche sociale dont la raison d’être est la subversion, l’évolution, et la création sociales. Les jeunes sont là pour amener un peu de désordre pour faire bouger les choses et, nous en avons sacrément besoin dans un pays vieillissant.
Non seulement, cette dérive est inopérante et inefficace, mais en plus on fabrique une société transparente et standardisée où chacun aurait sa place numérotée et ses comportements autorisés, en oubliant que le désordre social est aussi nécessaire que l’ordre pour éviter, dans les deux cas, les totalitarismes intellectuels précédant les autres. Or, on sait depuis longtemps qu’ordre et désordre s'équilibrent pour réguler la vie en société. Il devient urgent ne pas laisser normaliser à outrance notre quotidien.