Fondée au demeurant sur un postulat que nombre de médecins et de nutritionnistes battent aujourd’hui en brèche : la consommation quotidienne de 5 fruits ou légumes (à un moment, l’on parla même de 10 !) n’a aucun fondement scientifique ni médical - pas plus d’ailleurs que de boire systématiquement deux litres d’eau par jour… tout dépendant de l’ensemble des apports hydriques.
Il suffit d’avoir une alimentation suffisamment variée et le nombre de fruits et légumes importe peu à partir du moment où les apports en fibres et en vitamines naturelles sont suffisants. De surcroît, s’il est évident qu’une carence en fibres ne peut qu’avoir des conséquences fâcheuses notamment pour les intestins et favoriserait les cancers du colon par divers mécanismes, il est non moins évident qu’une alimentation trop riche en fibres peut avoir de fâcheuses répercussions sur le transit intestinal !
Sur le mode «T.G.V.» - transit à grande vitesse ! Il me suffit de me souvenir de quelques orgies de cerises ou de prunes du jardin dans ma jeunesse… coliques garanties. Encore une fois, en matière d’alimentation tout est question de bon sens et d’équilibre. A quoi bon manger deux pommes après avoir consommé un cheeseburger gras à souhait ?
«Oui, enfin, ne sont concernés que les fruits et légumes immédiatement consommables, comme les pommes, les cerises ou les salades préparées», rectifie l’Union nationale des syndicats de détaillants en fruits, légumes et primeurs (UNFD), qui soutient cette mesure. «Vous ne pourrez pas, en principe, acheter vos poireaux et vos courgettes avec un titre restaurant.» «En principe», car en pratique, on voit mal l’épicier retirer les aubergines du panier.
Valérie Boyer et ses collègues UMP ont beau plaider que les boucheries-charcuteries, boulangeries-pâtisseries et «autres sandwicheries» acceptent déjà les titre-restaurant, j’y vois un «détournement d’institution» car précisément ces commerçants offrent des produits dont on sait bien qu’ils constituent un repas de substitution pour beaucoup et, dans ce cas, l’utilisation du chèque restaurant est parfaitement justifiée…
Je suis bien contente de lire dans Libération que la Commission nationale des titres restaurant partage mon point de vue. «Il ne faut pas tout mélanger : les titres restaurants ont une vocation bien particulière, à savoir la prise en charge des repas pris sur le temps de travail. Ils sont pensés pour pallier l’absence de restaurant d’entreprise, pas pour faire ses courses de la semaine !».
Mais l’enjeu économique est sans doute la clef du mystère, à en croire Libération qui rappelle «qu’avec 585 millions de tickets distribués en 2007, le marché est en effet très juteux, estimé à quatre milliards d’euros en 2007. Les titres restaurant représentent 15% du chiffre d’affaires des 160.000 restaurateurs et assimilés (boulangeries, traiteurs…).
J’ai beau savoir que les fruits et légumes deviennent hors de prix, tout de même ! Même en achetant deux pommes, deux bananes et quelques kiwis, je ne pense que l’on atteigne 8 euros dont on me dit que c’est la valeur moyenne d’un ticket-resto… Du reste, je vous défie de travailler 7 ou 8 heures par jour (plus le temps des transports pour beaucoup) en n’ayant que ça dans le ventre… malaise lypothymique garanti !
Il faudra donc que les employés achètent le double de tickets : les uns pour un sandwich ou quelque plat à emporter qu’ils mangeront sur le pouce (s’ils les utilisent dans un resto ou un Mc Do, il serait nettement plus simple de mettre des fruits et des légumes au menu…) les autres pour les fruits et légumes. Drôle d’économie !
Mesure inepte donc mais aussi profondément inéquitable…
En effet, selon les articles que j’ai lus cette mesure concernerait «les 2,8 millions de salariés qui bénéficient de titres restaurant»… Or, le nombre total de salariés – toutes catégories confondues – était en 2006 d’un peu plus de 13 millions d’après les chiffres de l’Insee… Donc, si je sais compter, il restera environ 10 millions de salariés qui pourront se brosser !
C’est d’ailleurs la première pensée qui me soit venue ce matin en entendant sur France-Info l’annonce de l’adoption de cet amendement : il favorise les «inclus» +++ : entendre les salariés en CDI qui travaillent de surcroît dans une entreprise assez grande pour avoir un Comité d’Entreprise (50 salariés au minimum).
Rien pour les salariés des entreprises plus petites où les avantages sociaux sont peau de chagrin, rien pour les plus exclus d’entre eux : intérimaires et CDD – pour ce qu’il en reste après les «dégraissages» massifs de ces derniers mois.
Quant au reste de la population de la Planète pauvre qui n’est pas intégré dans le monde du travail, chômeurs – qui seront en nombre croissant – Rmistes, petits retraités, etc… ils continueront de payer les fruits et légumes «plein pot» sinon bien davantage !
Possible effet pervers de la mesure : une nouvelle augmentation des prix !
Bien au contraire ! L’augmentation possible et prévisible sera nettement plus «indolore» pour les bénéficiaires des chèques-restaurants qui ne débourseront en fait qu’une partie du prix réel, il est à craindre que les commerçants ne majorent les prix.
J’en veux pour preuve l’exemple des tarifs des transports en commun de la Région parisienne : les salariés ne déboursent en fait que 50 % de leur Carte Orange (Navigo aujourd’hui). Les autres payent plein pot et les tarifs sont en augmentation perpétuelle, pour un montant non négligeable.
SOURCES
Payer fruits et légumes avec des tickets-restaurantLEMONDE.FR | 10.03.09 ©
20 minutes
Plus d’alcool pour les jeunes, mais des fruits et légumes pour tout le monde
Le Figaro
Faire son marché avec des tickets resto’
LIbération
Mes tickets restos pour acheter fruits et légumes
Payer ses tomates en tickets restaurant ?