Le groupe européen reconnaît que la visibilité
est Ťmitigéeť.
Bien sűr, EADS n’affiche pas la rentabilité exemplaire qu’appellent de tous leurs vœux ses actionnaires privés et étatiques. Mais ses résultats 2008 ne sont pas médiocres pour autant avec un chiffre d’affaires en hausse de 11% ŕ 43,3 milliards d’euros et un résultat net de 1,57 milliard, ŕ comparer ŕ une perte de 446 millions en 2007.
Une précision fera plaisir aux analystes les plus sourcilleux, la position nette de la trésorerie, 9,2 milliards, correspond ŕ un record qualifié d’historique. En langage vulgaire, c’est une poire pour la soif ou encore une cagnotte qui, le cas échéant, permettrait de procéder en toute autonomie ŕ une opération de croissance externe.
Cela étant dit, tout n’est pas rose dans le Ťpetitť monde (118.340 personnes !) du groupe européen. On constate une fois de plus que sa bonne santé dépend largement du marché civil, ŕ un point tel que l’on n’ose plus vraiment attribuer ŕ EADS une place de choix dans le complexe militaro-industriel. Son imposant carnet de commandes, 400,2 milliards d’euros, ne comprend en effet que 54,8 milliards ŕ la rubrique Défense. Dans ces conditions, les difficultés croissantes des transports aériens l’inquičtent ŕ juste titre en męme temps que les équipes dirigeantes y trouvent une raison supplémentaire d’arracher ŕ la concurrence de nouveaux contrats militaires. Le but ultime, en arriver ŕ une répartition ŕ 50/50.
En cette matičre, les mois ŕ venir seront décisifs. Tout d’abord parce qu’il faudra bien sortir l’A400M de l’orničre, une tâche extraordinairement complexe et délicate. Au-delŕ des problčmes techniques qui clouent le prototype au sol, c’est le contrat lui-męme qui doit ętre entičrement renégocié et, entre-temps, EADS continue de perdre de l’argent (une charge supplémentaire de 704 millions est inscrite au bilan 2008).
Louis Gallois, président exécutif et Hans Peter Ring, directeur financier, font de leur mieux pour positiver dčs qu’ils sont interrogés sur l’A400M. Aucune possibilité n’est exclue, pas męme des annulations, néanmoins considérées comme hautement improbables. Une seule chose est certaine, martčle Louis Gallois, qu’il s’adresse aux analystes ou aux médias : il faut renégocier.
Par ailleurs, EADS espčre plus que jamais vendre 179 ravitailleurs en vol au Pentagone dans le cadre du désormais célčbre programme KC-X. Il ne suffit pas pour autant ŕ l’A330-200 militarisé d’ętre plus performant que le concurrent proposé par Boeing. Il s’agit plus que jamais de faire valoir que l’avion proposé n’est pas un méchant Airbus français généreusement subventionné par d’impuissants contribuables victimes d’une stratégie Ťsocialisteť (un mot inconvenant outre-Atlantique). C’est plutôt un Northrop Grumman, made in USA ŕ hauteur de 59%, et qui serait assemblé en Alabama.
Quoi qu’il en soit, Airbus civil continuera longtemps ŕ tirer la grosse machine EADS. La crise est lŕ, certes, mais les prévisions sont néanmoins de 300 ŕ 400 commandes nouvelles cette année. L’ascension de l’avionneur s’est poursuivie l’année derničre, son chiffre d’affaires a progressé de 9% pour atteindre 27,4 milliards. En revanche, sa rentabilité avant taxes et intéręts a nettement progressé (1,79 milliard, ŕ comparer ŕ une perte de 881 millions en 2007), et cela bien que les compagnies aériennes aient cherché ŕ obtenir des rabais importants. Elles aussi luttent contre la vie chčre.
L’objectif de 2009 n’a pas varié un iota, ŕ savoir livrer 483 avions et terminer l’année sans une seule Ťqueue blancheť. Louis Gallois ne s’engage jamais ŕ la légčre et s’il confirme aussi clairement cet engagement, c’est qu’il est certain de le tenir.
Pierre Sparaco - AeroMorning