Dijon-Wichita-Shenyang

Publié le 08 mars 2009 par Toulouseweb
Cessna revient en force avec un détour par la Chine.
Quel contraste ! Jack Pelton, directeur général de Cessna, ŕ peine ébranlé par la récession, continue de tracer sa route. La nouvelle jeunesse de l’avionneur de Wichita (Kansas) passe par la mise sur le marché d’un nouvel avion par an et, comme jadis, la suprématie américaine en la matičre est ainsi réaffirmée.
Cessna a récemment confirmé que les premiers SkyCatcher 162 seront livrés au tout début de l’année prochaine. Mieux, plus de 400 exemplaires du nouveau petit biplace sortiront d’usine en 2010 et plus du double en 2011. Ce démarrage en fanfare, que permettent des ventes trčs soutenues ŕ travers le monde entier, y compris en France, est lourd de signification.
Cessna a retrouvé le grand dynamisme qui lui a permis de jouer un rôle exceptionnellement important dans l’essor de l’aviation privée et d’affaires. Cela sans nécessairement se positionner aux limites de l’état de l’art mais, tout au contraire, en optant le plus souvent pour des solutions techniques simples et éprouvées de bon pčre de famille.
Dčs l’annonce du lancement du SkyCatcher, nous l’avions dit : cet avion ŕ moins de 100.000 euros a tout d’un grand et il vise une cible bien choisie. A savoir la catégorie des appareils dits non complexes qui bénéficient désormais d’un traitement propre de la part des autorités américaines et européennes, dans le cas présent Light Sport Aircraft et European Light Aircraft. Le petit Cessna affiche une masse maximale au décollage de 599 kg exactement et sa vitesse de croisičre frise les 220 km/h grâce ŕ un Teledyne Continental de 100 ch ŕ 2.800 tours/minute entraînant une hélice bipale en matériaux composites.
D’ores et déjŕ, il ne fait pas de doute que ce 162 est promis ŕ un bel avenir. Une réussite déjŕ amorcée qui, replacée dans son juste contexte, appelle aussi un commentaire doux-amer.
On doit tout d’abord rappeler que le SkyCatcher sera produit en série ŕ Shenyang, ville du Nord-Est chinois plus connue pour son imposante industrie aéronautique que ses palais impériaux. C’est la premičre fois que Cessna délocalise de cette maničre, condition sine qua non du low-cost.
Le démarrage commercial en trombe de l’avion Ťaméricainť nous rappelle par ailleurs la grande misčre française en cette matičre. L’agonie et la liquidation judiciaire d’Apex, intervenues l’année męme du décollage du SkyCatcher, ont donné un retentissement d’autant plus grand ŕ l’échec hexagonal. Une caisse de résonance qui n’était de toute maničre pas nécessaire pour mettre en évidence une affaire profondément malheureuse.
En effet, quels que soient les fondements du crash financier d’Apex et de la saga judiciaire qui en a résulté, quelles que soient les raisons de ce psychodrame indigne de l’aviation française, c’est une filičre historique tout entičre qui a été carbonisée. On entend dire, ces jours-ci, que des solutions se mettent en place, in extremis, pour enfin assurer l’approvisionnement en pičces de rechange des trčs nombreux utilisateurs d’avions Robin, on cite Aérodif et Dyn’Aviation parmi les artisans de ce sauvetage. On ne peut que leur souhaiter de réussir.
Reste le fait que le SkyCatcher aurait pu, aurait dű ętre français. Il aurait pu naître ŕ Reims ou ŕ Pau, par exemple et, délocalisé ou pas, en tout ou en partie, il se serait inscrit dans une tradition historique qui est en train de mourir ŕ petit feu, sous nos yeux, dans l’indifférence.
Il est apparemment moins difficile de contrer Boeing que Cessna. Bien sűr, les enjeux économiques et industriels ne sont pas tout ŕ fait les męmes, ce qui interdit d’autant d’avancer des excuses. Ce qui n’enlčve évidemment rien aux mérites du sympathique petit SkyCatcher.
Pierre Sparaco - AeroMorning