Nicolas Sarkozy avance le principe de réalité pour justifier l’injustifiable.
Ce n’est pas la première fois. A la différence près cependant qu’un effet boomerang est non seulement possible, mais prévisible. Sans réelles perspectives, déçus pour nombre d’entre eux, les
Français étaient hier inquiets. Beaucoup sont maintenant désespérés et il n’y a qu’un pas pour qu’ils deviennent exaspérés. A partir de là, le rapport Balladur servira d’étincelle et le
big-bang annoncé n’est peut-être pas celui qu’imagine le Président de la République.
Chacun a, en effet, compris qu’au moment où les chiffres du chômage du 4e trimestre traduisent une nouvelle dégradation avec une hausse de 8,2 % et 2,2 millions de demandeurs d’emploi, les
économies avancées ne parviennent pas à dissimuler une réalité même érigée en principe.
Démanteler la Picardie pour justifier la suppression de Poitou-Charentes, faire disparaître les cantons pour mieux couper les Conseillers généraux de leurs électeurs, jumeler le mode de scrutin
des Cantonales et des Régionales dans un soi-disant souci de cohérence alors que Sénateurs et Députés sont toujours élus différemment : les incohérences se multiplient. Avec une seule raison
d’être : réduire le contre-pouvoir le plus dangereux.
En Picardie, le redécoupage proposé s’apparente davantage à un charcutage. Trop à Gauche, la Picardie ne figure pas, il est vrai, dans les régions éventuellement gagnables. Autant la faire
disparaître. Ce que la Commission Balladur n’a cependant pas mesuré, c’est l’impact d’un coup de couteau vécu comme une agression.
Certes la main mise présidentielle sur les régions et les départements s’en trouvera facilitée. César s’appuyait sur ses Proconsuls. Nul doute que le locataire de l’Elysée rêve de réécrire
l’Histoire à son profit, mais en quoi les Axonais gagneraient-ils à quitter Amiens pour Châlons-en-Champagne ?
Le seul point susceptible de réunir les Français reste celui de la péréquation entre riches et pauvres. Mais que les Hauts-de-Seine paient pour l’Aisne, la Commission Balladur n’y a même pas
pensé. Plutôt que de découper le millefeuille n’y a-t-il pas plutôt urgence à le partager ?
Par Jean-Jacques THOMAS,
Premier Secrétaire Fédéral de l’Aisne du Parti Socialiste.