De l’utilisation de Twitter avec ses clients : le cas FedEx

Publié le 22 janvier 2009 par Michael Pierlovisi

L’histoire aurait pu être cocasse si elle n’avait pas pris une telle ampleur. Le 16 janvier dernier, James Andrews, VP Ketchum et directeur de Ketchum Interactive à New York se rend au siège mondial de FedEx (l’un de ses principaux clients) à Memphis afin d’effectuer une présentation sur l’utilisation des médias sociaux. L’intéressé avait d’ailleurs clairement exposé la raison de sa visite sur son Twitter

on digital media to the worldwide communications group at FedEx (150+) people.

A son arrivée à l’aéroport de Memphis, il se fend de la remarque suivante

True confession but i’m in one of thoses towns where I scratch my head and say “I would die if I had to live here”.

En gros, “plutôt mourir que vivre dans une ville comme celle-ci”. Problème, parmi les 1493 personnes qui le suivent régulièrement sur Twitter, l’une d’elle est employée par le transporteur.

Visiblement choquée par ce sentiment personnel, elle se fend d’une réponse à James Andrews mettant en copie non seulement l’ensemble des dirigeants de son entreprise mais également ceux de Ketchum…

Mr. Andrews,

If I interpret your post correctly, these are your comments about Memphis a few hours after arriving in the global headquarters city of one of your key and lucrative clients, and the home of arguably one of the most important entrepreneurs in the history of business, FedEx founder Fred Smith.

Many of my peers and I feel this is inappropriate. We do not know the total millions of dollars FedEx Corporation pays Ketchum annually for the valuable and important work your company does for us around the globe. We are confident however, it is enough to expect a greater level of respect and awareness from someone in your position as a vice president at a major global player in your industry. A hazard of social networking is people will read what you write.

Not knowing exactly what prompted your comments, I will admit the area around our airport is a bit of an eyesore, not without crime, prostitution, commercial decay, and a few potholes. But there is a major political, community, religious, and business effort underway, that includes FedEx, to transform that area. We’re hopeful that over time, our city will have a better “face” to present to visitors.

James, everyone participating in today’s event, including those in the auditorium with you this morning, just received their first paycheck of 2009 containing a 5% pay cut… which we wholeheartedly support because it continued the tradition established by Mr. Smith of doing whatever it takes to protect jobs.

Considering that we just entered the second year of a U.S. recession, and we are experiencing significant business loss due to the global economic downturn, many of my peers and I question the expense of paying Ketchum to produce the video open for today’s event; work that could have been achieved by internal, award-winning professionals with decades of experience in television production.

Additionally Mr. Andrews, with all due respect, to continue the context of your post; true confession: many of my peers and I don’t see much relevance between your presentation this morning and the work we do in Employee Communications.

Pour résumer, Jame Andrews se voit reprocher son manque total de respect envers les employés de FedEx (dont la majorité sont natifs de Memphis) mais également envers la politique sociale mise en place par l’entreprise afin de revaloriser la ville et enfin, son manque de professionnalisme. L’employé en question enfonce d’ailleurs le clou puisqu’il remet explicitement en cause la qualité du travail de l’agence (trop cher et qui aurait pu être internalisé) ainsi que la présentation de James Andrews, jugée inadéquate avec le travail de communication effectué en interne.

Les retombées ne se sont pas faites attendre :
- Après la publication de ce que l’on appelle aujourd’hui le “Memphis Fiasco” sur le blog de Peter Shankman, James Andrews s’est fendu d’une courte note sur son blog, arguant qu’il s’agissait d’un sentiment personnel et non d’un point de vue professionnel. De plus, il estime que la limite des messages de 140 caractères imposée par Twitter laisse peu de place à une argumentation détaillé de ce “sentiment”. Sa femme, également blogueuse, a également tenu à défendre son mari.
- Ketchum s’est confondu en excuses sur le très sérieux Brand Republic mettant en avant un “malencontreux faux pas” de James Andrews (”Lapse in judgement”).
- Si FedEx a décidé de ne pas donner suite à cette mésaventure, un porte parole de l’entreprise en a toutefois profité pour prêcher pour sa paroisse

This is an unfortunate situation and demonstrates very poor judgment by Mr. Andrews. The reaction by our employees proves once again that FedEx takes great pride in our hometown of Memphis.

- L’histoire s’est ensuite propagée sur Adrants, Gawker ou encore BNet…
- … pour finalement atteindre les autres grands acteurs de la communication Online aux Etats-Unis qui n’hésitent pas à ériger cette mésaventure en exemple du respect dû aux clients et à la responsabilité pour chacun de comprendre leurs situations sociales et économiques.

Mais finalement, que doit-on en retenir ?

1) Sans aucun doute, James Andrews aurait mieux fait de se taire. Cette habitude (quasi maldive) qu’ont certains évangélistes de détailler en long en large et en travers leur vie tant professionnelle que personnelle conduit inévitablement à ce genre dérapage.

2) Comme l’a justement souligné Zdnet, cet exemple est la parfaite illustration du décalage entre les agences et les entreprises. James Andrews tweet, un employé lui répond par email en n’omettant pas de mettre en copie tout ses supérieurs. N’aurait-il pas été plus simple (et plus judicieux) de dialoguer avec lui directement sur Twitter ? A moins qu’il ne s’agisse que d’une opération dudit employé visant à se faire bien voir auprès de la direction. Nous n’en saurons jamais rien…

3) On parle beaucoup du devoir de transparence dont doivent faire preuve consultants, agences et entreprises lorsqu’ils communiquent sur Internet. Trop de transparence serait-elle finalement néfaste ? Il semblerait que oui… Et si, finalement, derrière ce problème ne se cachait pas simplement une question de “politiquement correct” ? Dans ce cas, la transparence s’arrêterait là ou commence le “politiquement correct”. Autant dire pas très loin…