Jean-Paul Huchon remporte un manche a titré sur son blogue un journaliste de l’Express, une bataille peut-être mais pas la guerre. La temporisation apportée par le président de la République, Nicolas Sarkozy, à la question du débat sur le Grand-Paris n’est certainement pas un report sine die comme on a pu le lire ici et là. L’adhésion de l’UMP et du 92 à Paris-Métropole à la veille de la publication du Rapport Balladur est un cadeau qui devrait inciter ceux à gauche qui condamnent en bloc les propositions du Rapport Balladur, à réviser leurs classiques entre victoire à la Pyrrhus et Guerre de Troie, et répéter avec Virgile timeo danaos et dona ferrentes *, face à une UMP qui fera payer cher son ralliement à Paris-Métropole, sorte de sauvetage d’un syndicat mixte d’études qui patinait et risquait de se transformer à Paris-Est, « syndicat des frustrés qui se réunissent pour essayer de piquer du pognon aux autres » comme l’avait dit Bernard Gauducheau, le maire NC de Vanves lors d’une séance de la Conférence Métropolitaine le 5 novembre 2008.
Du côté de l’UMP, le président du Conseil général des Hauts-de-Seine, Patrick Devedjian, a déclaré dans le Figaro que “rien n’est abandonné” des propositions du Comité Balladur sur le Grand Paris, et préconise une consultation des Franciliens sur ce projet. “Le président de la République a simplement voulu donner du temps à la réflexion“, ajoute-t-il, et “nous attendons notamment les conclusions” du secrétaire d’Etat au Développement de la région-capitale, Christian Blanc.
Et pendant ce temps, le piège de Nicolas Sarkozy se met en place. On voit ces images distillées les unes après les autres du Grand-Paris des 10 cabinets d’architectes : “intéressant” me disait un ami socialiste, responsable local, qui est séduit par de belles études d’urbanisme, des tours ici, un parc de la Courneuve façon Central Park, un métro sur le périph… Des images mises en scène sans trop de commentaires par les journaux. Bref, du teasing et de la séduction. Loin de moi de critiquer les travaux des dix équipes dont Paris est sa banlieue avait salué l’intérêt des pistes préliminaires (le métro sur le périph tout de même, plus nul comme prise en compte des besoins de la métropole, mérite un mur du çon urbanistique alors qu’on aura déjà dépensé un milliard ou à peu près pour un tram à 200 mètres, et qu’on enterre Métrophérique ;-). Mais là, il s’agit d’une campagne de presse habile, on vend de l’image, du rêve et de la modernité, chose que n’a pas su faire le Comité Balladur avant de dévoiler son rapport (mail envoyé par Paris est sa banlieue au contact du site du comité et resté sans réponse à ce jour). Nicolas Sarkozy est en train de se construire son image positive du Grand-Paris, séduisante et moderne, visionnaire et tournée vers l’avenir alors que les adversaires du Rapport Balladur sont en train de se ringardiser dans une attitude corporatiste et archaïque, de défense des intérêts d’élus repliés sur eux-mêmes et sur le passé.Aujourd’hui, Nicolas Sarkozy temporise, le climat ne se prête pas à la réforme, pas tout de suite. Mais après, à la première opportunité, il ne restera plus au président qu’à refermer son piège et créer Son Grand-Paris…
* timeo danaos et dona ferrentes je crains les grecs, surtout quand ils apportent des cadeaux, Virgile - Eneide (II 49), j’ai toujours aimé cette citation de la mise en garde de Laocoon devant le Cheval de Troie, que l’on retrouve également dans différents Astérix dans la bouche du vieux pirate ;-)
** Paris Métropole, formes et échelles du Grand-Paris - Philippe Panerai - Editions de la Villette - 2008
Jean-Paul Chapon