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L’Union européenne et les coffres du Vatican: Les marchés du temple se défendent…

Publié le 30 août 2007 par Danielriot - Www.relatio-Europe.com
DECRYPTAGE RELATIO par William PETITJEAN : Les papes, l’Eglise et l’argent…  Les coffres du vatican font fantasmer autant que les caves…Un vieux feuilleton. Toujours d’actualité. L’argent du Vatican  refait polémique…sous pression (justifiée) de la Commission de Bruxelles qui en l’occurrence est tout à fait dans son rôle de gardienne de traités.

La Commission européenne a adressé au gouvernement italien une demande d’informations pour avoir des détails sur les avantages fiscaux concédés par l'Etat aux diverses confessions religieuses. Aussitôt, ce fut aussitôt, en Italie, un concert de protestations. Et sur internet bien des alertes au scandale… Pour défendre le Vatican d’une façon aveugle ou pour renouer avec l’anticléricalisme de bas étage. Comme si dans cet ordre du temporel, les règles communautaires n’étaient pas applicables à tous…

Paradoxe : Principale visée, l'Eglise catholique a été la première à nourrir la polémique en dénonçant, par la voix du président de la Conférence épiscopale italienne, Mgr Angelo Bagnasco, "une attaque à visée idéologique". Diable ! Comme si en la matière l’Etat du Vatican n’avait des comptes à rendre qu’à Dieu. On manque un peu de sang-froids sur certains sujets dans les milieux proches des « marchand du temple »…

A droite, un porte-parole de l'Union des démocrates du centre, d'origine démocrate-chrétienne, a assimilé la requête de l'Union à "une régurgitation d'anticléricalisme". Pour l'euro-parlementaire d'Alliance nationale (droite), Adriana Poli-Bortone, "l'Union ferait mieux de faire son mea culpa pour les centaines de milliards d'euros distribués sans contrôle à des ONG fantômes ou de complaisance". Deux ministres du gouvernement Prodi ont également critiqué l'initiative européenne comme étant "une instrumentation politique".

C’est fou. Voilà quelques années déjà, ce fut une levée de boucliers de ce type quand la banque du Vatican (née du Denier de Saint-Pierre  ) avait été accusée d’être l’un des centres les plus appréciés par les spéculateurs spécialisés dans le blanchiment de l’argent

« Le Vatican est le principal destinataire de plus de 55 milliards de dollars US d’argent sale italien et se place à la huitième place des destinations utilisées à travers le monde pour le blanchiment d’argent, devant des paradis fiscaux comme les Bahamas, la Suisse ou le Liechtenstein. Une enquête récente du "London Telegraph" et du "Inside Fraud Bulletin", cite la Cité du Vatican  comme étant un des principaux États "cut out" au même titre que des paradis fiscaux tels que Nauru, Macao et l’Ile Maurice. Un État "cut out" est un État dans lequel la législation sur le secret bancaire rend impossible la traçabilité de l’origine des fonds qui y sont déposés ». La même banque avait été aussi citée dans  les années 1980, dans des affaires financières où elle a semblé plus victime que coupable,(loge P2  et banque Ambrosiano  )

L’enquête n’a pas été conduite à son terme. C’est dommage. Au nom de la justice et dans l’intérêt même d’une religion qui en matière de biens terrestres est trop fidèle au sacro-saint : « faites comme je dis et pas comme je fais ».

Devant ces réactions, la Commission s'est défendue de tout acharnement contre l'Eglise. Il s'agit en effet d'un non-évnément... Pour l'instant, du moins. Saisie par des plaignants, Bruxelles cherche à vérifier si les exemptions de taxe immobilière dont bénéficie le clergé italien pour certaines de ses activités commerciales (restauration, hébergement), ainsi que la réduction de 50 % de la taxe professionnelle dans ses établissements scolaires et hospitaliers, constituent une distorsion de concurrence, comme le prétendent plusieurs plaignants. "Il y a une plainte, qu'il faut traiter comme une autre plainte, c'est dans l'intérêt de tout le monde", a déclaré un porte-parole de la Commission.

Le sujet est évidemment sensible dans un pays où l'Eglise possède un patrimoine immobilier estimé à 100 000 immeubles pour une valeur de 8 à 9 milliards d'euros. Le vote catholique étant convoité à gauche comme à droite, peu de voix s'élèvent contre un système qui représente un manque à gagner de 1 à 2 milliards d'euros pour les collectivités locales. Annulée par la Cour de cassation en 2004, l'exonération de taxe immobilière avait été rétablie en 2005 par le gouvernement Berlusconi.

Dès son arrivée au pouvoir, en juin 2006, Romano Prodi, catholique pratiquant, a pris un décret pour supprimer à nouveau cet avantage. Mais la situation est restée inchangée en raison de la rédaction ambiguë du texte : seuls les immeubles "à usage exclusivement commercial", c'est-à-dire ne comportant pas de lieu de culte, sont soumis à la taxe. Les nombreux couvents qui proposent des prestations hôtelières aux touristes (avec ventes de souvenirs, bien sûr) continuent, par exemple, à en être exonérés.

L'anomalie du texte de loi a été soulevée par un député du Parti radical, une formation laïque appartenant à la majorité de centre-gauche, lors du vote de la loi de finances 2007, mais son amendement, après de longues palabres parlementaires, a été massivement rejeté (435 voix contre 29). Avec la grâce du ciel…

Au nom du respect de la concurrence, l'UE imposera-t-elle une mesure qu'aucun gouvernement italien n'est en mesure de prendre ? Bruxelles a aussi demandé des éclaircissements à Madrid au sujet d'exemptions fiscales dont bénéficie l'Eglise espagnole pour ses activités de construction et de travaux. Une réponse est attendue en septembre.

William PETITJEAN

RAPPEL 1: La principale controverse, qui a longtemps opposé la Commission et l'Espagne, a été éteinte il y a un an. Elle portait sur l'exemption de TVA dont bénéficiait l'Eglise espagnole et dont Bruxelles demandait la suppression. Madrid faisait valoir que cette dérogation résultait des accords passés avec le Vatican en 1979, après la mort de Franco et avant l'entrée de l'Espagne dans l'Europe. Après des années de polémiques, le gouvernement socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero a finalement supprimé l'exemption de TVA en septembre 2006 dans le cadre d'un accord global avec l'Eglise sur son financement public, qui a réduit ses avantages.

RAPPEL 2 : L'État de la Cité du Vatican n'est pas membre de l'Union européenne, mais entretient des liens étroits aux travers de ses accords douaniers et monétaires avec l'Italie. Suite à une nouvelle convention monétaire entre la République italienne, au nom de la Communauté européenne, et la Cité du Vatican, cette dernière est autorisée depuis le 1er janvier 1999 à utiliser l'euro comme monnaie officielle. Le Vatican n'a pas le droit d'émettre des billets en euros, mais peut frapper des pièces en euros avec face nationale spécifique à la Cité à compter du 1er janvier 2002.

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