Shoegzing Kids, par Stuck in the Sound

Stuck in the Sound...Pour moi, et très certainement à tort, c'était le groupe d'un, il est vrai, excellent single, "Toyboy". Et c'est vrai que c'est le genre de titre qui claque, reste en tête et fout la pêche, tout ça en même temps. Le reste de "Nevermind the Living Dead", je suis passé à côté. Puis il y a eu ce single, annonçant le deuxième opus du groupe, au titre primal : "Ouais". Puis toujours bien, mais pas forcément envie de pousser plus loin, malgré une production de toute évidence très costaud (signée Nick Sansano, qui a collaboré avec Sonic Youth entre autres), une rythmique sur la corde raide et des influences qui s'entrechoquent dans une furie réjouissante.
Puis j'ai écouté l'album...Et là, la claque. Parce que "Ouais", c'est presque "bof" par rapport au reste du disque. On sent que le groupe a décidé de passer la surmultipliée, tout est plus fort, plus rapide, mais aussi mieux écrit, mieux chanté, joué. "Zapruder" ouvre le disque sur une guitare cristalline à laquelle se greffent une batterie qui claque et une basse qui appuie ses coups : fort intelligemment, le groupe pose patiemment les briques de son univers, avec l'impression très forte qu'ils savent où ils vont. On y croise les Pixies ou Sonic Youth mais aussi des touches de new wave, de post punk, de rock indé mais aussi de power-pop : ce titre initital, sans chant ou presque, est un aperçu de ce qui guette l'auditeur par la suite. "Utah" est ainsi un vrai titre pop, mais sa rythmique bondissante et son chant haut perché permet au morceau de décrocher la timbale, sans jamais sonner putassier. "Shoot, Shoot" mise sur l'alternance entre la rudesse du refrain et le côté plus léger des couplets, avant que "Teen Tale" continue à creuser ce sillon, celui difficile d'un rock tendu et classe, mais aussi efficace, sans que le compromis se fasse sentir.
Car c'est un fait, le son est toujours massif, que les guitares rugissent ou brillent, et la rythmique reste toujours dans le ton, sinueuse et précise. La voix de José Reis Fontao peut agacer, mais reste souvent dans les clous, et apporte un contrepoint bienvenu à l'énergie musicale, en misant sur des aigus plutôt bien maîtrisés, même si on n'échappe pas totalement à quelques envolées crispantes. Mais le groupe est suffisamment porécis pour écrire désormais des chansons dans une veine plus pop, comme "Playback A.L." et sa ligne de basse ronflante, ou encore "Beautiful Losers", titre power-pop à la Nada Surf franchement réjouissant. "What ?!" et "Dirty Waterfalls" marchent ensemble, et conjuguent eux aussi efficacité mélodique avec ce sens de la fuite en avant que maîtrise désormais le groupe parisien. Une dernière salve d'électricité et de fureur avec "Erase" et "Gore Machine", qui savent néanmoins se lover dans des breaks moelleux, puis la new-wave éthérée de "I Love You Dark" referme le disque sur un dernier titre tout en tension, que le quatuor prend un malin plaisir à retenir et à dévoiler par subtiles touches.
Finalement, sous leurs airs de jeunes chiens fous, les quatre Stuck in the Sound ont la tête bien remplie, et savent pertinemment où ils veulent aller. S'ils continuent avec des disques de ce calibre, pas sûr qu'ils voient le bout de la route de sitôt : c'est tout le mal qu'on peut leur souhaiter !
Tracklist :
Zapruder / Ouais / Utah / Shoot Shoot / Teen Tale / Playback A.L. / Beautiful Losers / What ?! / Dirty Waterfalls / Erase / Gore Machine / I Love You Dark
Le MySpace de Stuck in the Sound, le site officiel
Merci à Spöka pour le disque :-) !