Cette semaine, Le Monde a consacré un dossier aux difficultés du secteur
automobile expliquant que celles-ci ne datent pas d’hier et que faute d’avoir
écouté les consommateurs, les constructeurs américains et européens ont
continué à produire toujours les même voitures, trop couteuses, trop
gourmandes, trop polluantes, trop rapides…en bref, trop semblables à celles
qu’ils produisaient il y a 10 ans ou 20 ans !
Déjà en 2006, Pascal Roussarie « Responsable de l'Observatoire de
l'automobile » évoquait une surproduction pour l’Europe, de 2 millions de
véhicules par an.
Déjà il y a 3 ans, il faisait le constat suivant : « Concernant
maintenant les marques européennes et les marques américaines, c'est vrai
qu'elles souffrent énormément, car elles n'ont pas suffisamment écouté les
consommateurs. On reste dans une logique, à fabriquer des produits, et à se
demander par la suite comment les vendre, alors qu'il faudrait faire le
contraire.
Et il concluait ses propos par un fort pertinent : « Il ne s'agit
pas de vendre ce que l'on produit, mais plutôt de produire ce que l'on
vend. » !
Manifestement, pour le secteur automobile comme pour d’autres, la crise
économique et financière que nous vivons n’a été que le détonateur qui a fait
exploser une industrie dont les fondamentaux étaient pourris.
Pourtant, le mois dernier Nicolas Sarkozy a annoncé, dans le cadre d'un
"pacte automobile", des aides au secteur totalisant 7,8 milliards d'euros, en
contrepartie d'un engagement sur l'emploi et sur la pérennité des sites
d'assemblage en France.
On apprend, dernièrement, que le patron de Général Motors Europe appelle les
Etats « à la rescousse » pour sa filiale européenne OPEL. Il demande
la coquette somme de 3,3 milliards d'euros de prêts ou de participations
directes d'ici à 2014 pour assurer « le sauvetage de tous les sites »,
dit-il !
Protéger ces secteurs en les portant à bouts de bras à coup de milliards
d’euros d’argent public, sans exiger de leur part une transformation en
profondeur, ne fait que retarder une échéance inéducable que la crise n’a fait
que précipiter. Pire encore, en se focalisant sur ces industries on se prive
des moyens nécessaires d’aider ceux qui sont véritablement l’avenir en
commençant par l’éducation, la recherche, les énergies nouvelles, la santé et
beaucoup d'autres encore !
Même les chinois l’ont compris : « Il n'y aura pas un centime de
dépensé sur les projets qui favorisent la production de masse, ou les secteurs
hautement polluants et gourmands en ressources » (Zhang Ping, chef de
l'agence de planification chinoise).
D’une certaine manière cette crise est comme la météorite qui aurait
entrainé la fin des dinosaures. Seuls ont survécus les petits mammifères
capables de résister au froid, de se protéger sous terre et d’adapter leur
alimentation.
Or, au lieu d’utiliser cet argent pour aider les petits mammifères à se
développer pour qu’ils deviennent au plus vite de vigoureux moutons, cochons,
vaches ou ornithorynques, on préfère soutenir les dinosaures dont la fin est
pourtant inéluctable tant ils ont fait la preuve de leur incapacité à
évoluer.
Pourquoi cet attachement à tout prix aux stégosaures, brontosaures,
iguanodons et autres tyrannosaures ? Une des réponses à cette question se
trouve certainement dans l’introduction d’un récent
billet de Jacques Attali :
« Il est très difficile, pour la plus part d’entre nous, d’admettre que
nous sommes en train de changer de monde. Et, même ceux qui disent le
reconnaitre, en sont encore, pour la plupart, à demander « combien de
temps durera la crise ? ». Comme si l’après-crise ne pouvait être qu’un
retour à l’ordre antérieur. »
Et oui, admettons que les dinosaures sont morts, et souhaitons longue vie aux mammifères !