Photo : Seated bird map - Rebecca Veit
Qu’est-ce que je pourrais bien raconter ? Je suis exténuée. Travailler c’est trop dur. Quand est-ce qu’on s’amuse vraiment dans la vie ? Pour oublier que je trouve que je travaille trop, je regarde les colonnes de la bourse dans les pages « Bourse » du journal Les Echos. Je lis les articles relatifs aux dégringolades et aux remontées des cours des principales places boursières du monde. J’ai beau lire, lire en essayant de comprendre quelques petites choses, en essayant d’imaginer à quoi ça peut bien correspondre tous ces chiffres, j’ai toujours la même impression qu’un autre monde existe. Subprime, je comprends à peu près, voilà, il y a des gens, un peu comme moi, qui n’ont pas beaucoup d’argent mais qui veulent quand même acheter un appartement avec les 3 must (parquet, cheminée, moulures). Ils vont voir le banquier auquel il présente leur projet immobilier.
- Oui, mais vous n’avez pas d’argent !
Le banquier magique et aimable trouve un arrangement quand même.
- Ok pour un prêt, mais à taux variable.
Avec le taux du jour où les gens pauvres ont signé avec le banquier, le remboursement du prêt, s’avérait équivalent à se couper le bras gauche. Enfin, il restait le bras droit. Et puis l’année d’après, le taux du prêt a été relevé. Aïe, ça se grippe. Moins un bras gauche, plus une grippe. Deux ans après l’accord, le taux du prêt augmente encore un peu. Houuu, une rage de dent se profile. Un bras gauche en moins, des relents de grippe et une rage de dent, c’est plus vivable. On vend la baraque. Enfin pour être exacte, le banquier auquel les gens pauvres doivent beaucoup d’argent prend la baraque en guise de remboursement. Mais il la revend moins chère que le montant du prêt qu’il a accordé et additionné au montant des remboursements cumulés des gens pauvres. En gros il perd du fric. Sauf que c’est pas vraiment ou forcément lui qui perd du fric parce que il aura refilé la créance à un autre créancier entre temps. Bref, il y a quelqu’un quelque part qui perd du fric (en plus des gens pauvres qui n’ont plus de baraque). Et les chiffres des pages « Bourse » des journaux veulent dire quelque chose, quelque chose de négatif qui a à voir avec ça. Moi, chez mon boulanger la baguette de pain hier à un Euro est passée à un Euro et 10 centimes. C’est le cours du blé qui augmente. Faut bien que les créanciers se remboursent.
Voilà, ce que je voulais dire ce soir et je m'en fous si c'est pas vraiment vrai !
PS Demain je parle des hommes qui aiment les chiffres.
Publié par les diablotins