Mon commentaire d’analyse sur la situation en Afghanistan tel que posté sur le blogue (tout nouveau) de Jean-Luc Mongrain. Vous remarquerez que j’ai écrit ce texte de la manière la plus neutre possible, alors la subtilité dans mes propos était de mise. Bonne lecture:
Bonjour monsieur Mongrain,
Pour ma part, je pense que la “mission afghane” n’est rien de plus qu’une énorme farce. Le bilan et les faits parlent d’eux-mêmes, ainsi que mes amis ex-soldats: Cette guerre ne peut être gagnée militairement.
Le maire Labeaume a beau se lancer dans des attaques aussi démagogues qu’inutiles contre les pacifistes, qui, au fond, se soucient bien plus du bien-être de nos soldats que notre classe politique qui se sert d’eux comme de la chaire à canon pour remplir leurs sombres agendas, discours qui a probablement été ridiculisé par ces mêmes soldats le soir venu, mais ce n’est pas ça qui va changer la situation. Quelqu’un devrait aller rappeler au maire de Québec que les “barbares” dont il parle ont été financés, armés et entraînés par la CIA dans le seul but de piéger, de blesser, puis d’expulser une puissance mondiale étrangère de leur territoire. Si les russes n’en sont pas venus à bout avec 200 000 hommes et la propagande de “mission humanitaire” qu’ils faisaient gober à leurs soldats, les chances sont assez faibles pour que l’OTAN, anachronique et querelleuse, puisse y arriver avec pratiquement la même stratégie et le même message hypocrite, mais seulement avec 60 000 soldats, dont la moitié préfèrent se cacher dans leurs bases fortifiées plutôt que de faire face à une armée de “barbares en sandales” qui contrôlent encore, à ce jour, environ 50% du territoire afghan.
L’Afghanistan est, géographiquement, l’un des territoires les plus propices de la planète pour la stratégie de “guérilla fantôme” qu’utilisent les talibans et autres “insurgés” (terme générique pour désigné toute résistance aux puissances étrangères, qu’il s’agisse de talibans ou de simples habitants qui en ont leur claque du gouvernement corrompu et brutal que les “libérateurs” gardent au pouvoir par les armes), stratégie qui consiste à miner le territoire la nuit et à frapper l’occupant à l’endroit où il s’y attend le moins au moment propice. Les combats engendrés par cette stratégie sont très courts et très rares.
Parlant du gouvernement, voilà le gros “hic” de cette guerre: Étant presque aussi brutal que les talibans, mais deux fois plus corrompu et tout aussi rétrograde à l’égard des femmes (voir le cas de Malaya Joya), en plus de donner une place de premier plan aux seigneurs de guerre détestés de l’Alliance du Nord (soutenus par la minorité ouzbek), qui ne sont qu’une copie conforme des talibans du sud (soutenus par les patchounes, ce peuple qui a vaincu l’empire britannique à trois reprises à l’époque coloniale), à l’exception près que l’Alliance du Nord a choisi l’occident comme allié dans ce conflit, tandis que les talibans sont allés voir du côté des milliards de dollars des services secrets pakistanais et des renégats de Ben Laden, un autre outil désuet de la CIA, tout comme eux.
Bref, le gouvernement fantoche d’Hamid Karzaï, soutenu par à peine 14% de la population afghane, est moins populaire que le gouvernement pseudo communiste soutenu par Moscou dans les années ‘70 et ‘80, une dictature mensongère, mais qui a au moins eu le mérite de lancer des programmes qui visaient l’égalité totale entre les hommes et les femmes, ainsi que le droit d’aller à l’école pour tout le monde, garçons et filles inclus… des idées qui ne semblent même pas avoir effleuré l’esprit du gouvernement criminel que NOUS défendons avec NOS sacrifices.Et puis, selon le témoignages de mes bons amis ex-soldats, l’armée canadienne n’a passé qu’UNE seule journée pour aider à la reconstruction du pays… dans la dernière année. Le reste du temps peut se résumer à des patrouilles qui ne donnent pratiquement aucun résultats, à des combats sporadiques contre des insurgés sortis de l’ombre pour quelques instants et à des “bavures” qui coûtent la vie à des civils, dont de nombreux enfants, et qui continuent de faire s’effriter toujours un peu plus notre “crédibilité” au près des populations locales.
En conclusion, soyons réalistes: À moins que des efforts diplomatiques majeurs ne soient entamés dans la prochaine année, la défaite de l’OTAN en Afghanistan sera irréversible. Il y a une grande différence entre se soucier de la sécurité des hommes et des femmes que nous envoyons en Afghanistan, et soutenir aveuglément un “effort de guerre” qui ne mène visiblement nulle part. Pour ceux qui tiennent vraiment aux vies de nos soldats, il y a deux options: La diplomatie, ou les préparatifs en vue de la retraite. Toute autre option ne pourrait qu’être formulée par des individus ayant plus à coeur une victoire militaire irréaliste que la vie de nos soldats.
De toute façon, nous n’avons rien à faire là-bas. Envahir un pays étranger avec une culture totalement différente de la notre pour soutenir une faction fanatique contre une autre faction fanatique, ça n’a rien d’une “mission humanitaire” si vous voulez mon avis.Merci à l’avance d’avoir pris le temps de lire mon commentaire d’analyse,
Gabriel Proulx