Fusion: fission de la CGT?

Publié le 03 mars 2009 par Energie2007

La CGT ne nous avait pas habitués à cela: plusieurs syndicalistes estampillés CGT et Sud énergie appellent à une "diversification des sources d’approvisionnement électrique", entendez: une réduction de la part du nucléaire.

C'est un appel passé relativement inaperçu. Et pourtant: une quinzaine de syndicalistes, estampillés CGT et Sud énergie, appellent à une "diversification des sources d’approvisionnement électrique en France, ne serait-ce que pour réduire les risques de black-out et d’interruptions de la fourniture de courant aux usagers, et garantir ainsi le maintien d’un service public de qualité".

Il s'agit en l'occurrence de réduire la part du nucléaire dans le bouquet énergétique de la France qui représente "près de 80% de sa production électrique (...) contre, respectivement, 30%, 20%, 15% et 2,2% pour le Japon, les États-Unis, la Russie et la Chine". Les signataires soulignent qu'il s'agit d'une "source d’électricité peu modulable et donc inadaptée aux pointes de consommation", et mettent en cause la sécurité d'approvisionnement en raison de son "extrême centralisation (qui) outre qu’elle entraîne des pertes d’énergie sur le réseau, constitue une cause supplémentaire de vulnérabilité potentielle de l’approvisionnement électrique, dans un contexte de multiplication des incidents et accidents, notamment liés à l’âge du parc et à certaines erreurs de conception mais aussi aux logiques de financiarisation et de privatisation qui touchent à la fois les secteurs du transport et de la production d’électricité – logiques dont on voit hélas mal comment les infléchir à très court terme".

Les signataires y ajoutent d'autres éléments à charge comme le bilan des émissions de CO2 qu'il faut réexaminer au regard des besoins en électricité de pointe ("notre parc électronucléaire surdimensionné amène en pratique la France à externaliser, vers des états comme l’Allemagne ou la Pologne, des émissions massives de CO2") mais aussi le ressenti du personnel des centrales nucléaires: "dès 2003, une étude réalisée pour EDF par le centre de recherche en gestion de l’École polytechnique révélait que «92% des salariés du nucléaire souhaiteraient quitter le secteur. Déjà, certains partent, ce qui pose des problèmes de sûreté pour certaines activités». Il s’agit d’un signal d’alarme qu’il serait dangereux de négliger et que nulle campagne de communication interne ou externe ne peut suffire à effacer. Le décalage se creuse de plus en plus entre l’image officielle de haute technologie et de culture de sûreté du secteur, et la réalité de terrain des «soutiers de l’atome». L’industrie nucléaire n’a certes pas le monopole des suicides de salariés, mais les nouveaux modes de management, avec les tensions sociales et les souffrances humaines qu’ils induisent, risquent de provoquer là, bien plus que dans d’autres secteurs, des catastrophes susceptibles d’avoir des conséquences tragiques à très long terme".

La charge est donc sévère - et inattendue de la part d'une confédération syndicale, la CGT, attachée de longue date à la filière nucléaire.

L'appel se conclut par la proposition d'une "réduction rapide et volontariste de la part du nucléaire dans le bouquet électrique français" pour passer de 80% à 60% de l’électricité consommée en 5 ans, par la fermeture des "réacteurs atomiques les plus anciens, les plus coûteux en maintenance, les plus générateurs de rejets et effluents radioactifs et chimiques, les plus irradiants, démotivants et anxiogènes pour les personnels qui y travaillent et les populations environnantes, tout en assurant le maintien sur site ou la reconversion des travailleurs (ainsi que la substitution de) moyens de production électrique moins centralisés, adaptés aux ressources locales".

PS: Que disait-on il y a peu? Ah oui, the times they're changin'...

Lire l'appel complet et la liste des premiers signataires sur le site de l’institut ALECOSO.