La dynamique d’évolution autour de la directive européenne « Solvency II », qui vise à optimiser et harmoniser les pratiques de gestion des risques des acteurs de l’assurance, commence à avoir des retombées au Maroc. En effet, une première étape de
transformation du secteur a été amorcée avec la diffusion le 26 aout 2008 par la Direction des Assurances et de la Prévoyance Sociale (DAPS) de la circulaire relative au Contrôle Interne des compagnies d’assurance.
Une première étape vers la règlementation Solvency II
Première étape vers une maitrise de la gestion des risques par les compagnies d’assurance, la circulaire de la DAPS du 26 aout 2008 définit les principes du système de contrôle interne devant être mis en œuvre (cf. tableau ci-dessous). Par la suite, la déclinaison de la règlementation Solvency II devrait démarrer (pas de date prévisionnelle à ce jour).
Ces principes sont abordés suivant les volets organisation et gouvernance, conformité et contrôle des processus opérationnels, gestion des risques aussi bien sur les engagements envers l’assuré que sur les placements, et enfin contrôle du risque informatique.
Chaque compagnie d’assurance devra mettre en place une gouvernance de sa fonction contrôle interne permettant une séparation claire des différentes responsabilités, une implication de toutes les entités de pilotage de l’établissement, ainsi qu’une structure de contrôle adéquate.
Cette dernière devra s’appuyer sur une formalisation des processus opérationnels, mais aussi sur les outils mis à disposition des collaborateurs préalablement sensibilisés au contrôle interne.
La formalisation de politiques de gestion des risques sera nécessaire à la mise en œuvre du suivi de ces risques sur les activités d’engagements, de souscriptions, de collecte de primes et de placements et permettra la mise en œuvre d’une gestion de bilan (ALM – Asset Liability Management) en accord avec le règlement et la stratégie de chaque établissement.
Un coût de mise en place comparable à celui des autres pays
Selon les analyses menées par Sia Conseil, le coût complet de mise en œuvre de ces mesures va s’étendre de 4 à 7 millions de dirhams selon les compagnies d’assurance, le coût total pour le secteur s’élevant à 90 millions. Ce coût est une estimation complète des charges pour l’établissement : les spécificités en termes de produits ont été prises en compte pour chaque compagnie d’assurance, les processus IARD étant par exemple généralement plus complexes que les processus VIE. Le coût analytique des ressources retenu correspond à celui en vigueur sur le marché du travail marocain au troisième trimestre 2008.
Le bénéfice de retours d’expérience internationaux…
Les établissements du Maroc vont en effet bénéficier du retour d’expérience de l’ensemble des acteurs ayant récemment travaillé sur ces aspects, en Europe notamment. Cela se traduit aussi bien en termes de compétences humaines que d’outils informatiques. Les principes et les exigences en termes de contrôle interne (traduits dans le décret du 13 mars 2006 en France) sont désormais parfaitement maîtrisés par les compagnies d’assurance, mais aussi par les éditeurs de progiciel et sociétés de conseil. Cet atout permet donc une mise en conformité plus rapide de la place du Maroc comparée aux établissements européens qui ont été les premiers à transposer ces réformes.
…mais dont la dynamique de transformation est toujours forte
L’application de la règlementation relative au contrôle interne se poursuit en Europe, notamment grâce aux enseignements de la crise financière qui remettent sur le devant de la scène l’importance clé des dispositifs de contrôle interne existants, mais surtout leur bonne application. Les différentes « affaires » issues des cas de fraudes et de manipulation des expositions des établissements financiers ont mis en exergue l’importance de la gouvernance et du « facteur humain » dans ces dispositifs, afin de les rendre réellement opérationnels.
Par ailleurs, pour le cas particulier de la France, à la suite des travaux menés par les compagnies d’assurance depuis le décret du 13 mars 2006, l’Autorité de Contrôle des Assurances et des Mutuelles (ACAM) a, en sa qualité d’observateur privilégié, émis plusieurs recommandations afin d’améliorer l’organisation et la gouvernance des acteurs de l’assurance. Parmi ces conclusions, figurent le renforcement de la formation des administrateurs afin que ceux-ci soient en mesure de jouer pleinement leur rôle dans la gouvernance des compagnies d’assurance, la bonne prise en compte des filiales dont la gestion est trop souvent opaque vis-à-vis de la maison-mère, ainsi que la mise en œuvre d’un contrôle permanent en complément de la fonction d’audit (contrôle temporaire). Autant de bonnes pratiques dont les compagnies des autres pays peuvent s’inspirer, notamment celles du Maroc, ce qui pourra venir en complément de la circulaire d’août 2008.
Si la mise en œuvre au Maroc de la circulaire relative au contrôle interne représente l’étape initiale vers l’application de la réforme « Solvency II », il n’en reste pas moins que cette première règlementation est une transformation à elle seule. Afin d’être en mesure de réaliser les travaux nécessaires, les compagnies d’assurance doivent dès maintenant identifier, cadrer et lancer les chantiers d’évolution leur permettant de s’aligner avec les principes du contrôle interne, notamment en termes de gouvernance et d’organisation, aspects les plus critiques et les plus complexes à mettre en œuvre.