Il existe une librairie au monde où vous pourriez chercher des heures durant un exemplaire l'ouvrage d'Asne Seieerstad, Le librairie de Kaboul. C'est justement chez l'intéressé décrit dans le roman.
Devenu le marchand de livres le plus célèbres du Moyen-Orient, il avait accueilli la journaliste norvégienne fin 2001 dans sa famille. Il en découla le livre paradoxal que l'on connaît : la lutte contre l'oppression et la liberté d'expression face aux Talibans et en parallèle la répression dans la vie domestique de ses femmes...
Une plainte et un livre en réponse
Mohammed Rais avait porté plainte contre l'éditeur, réclamant 5 millions $ pour diffamation, mais la justice traîne dans sa décision puisque d'un côté, on souhaite que la loi afghane s'applique, de l'autre, on lui préfère la justice norvégienne.
Mais voilà, en attendant que justice soit faite, notre libraire ne s'est pas démonté : il a publié une riposte littéraire en anglais, qui raconte les événements de son point de vue. À lui. Once Upon a Time There Was a Bookseller in Kabul, publié en septembre, avait eu sur Asne ce commentaire : « J'ai écrit mon livre, il a écrit le sien. C'est très bien, et le lecteur peut juger. » Pour notre libraire, « c'était la seule façon que j'avais de répondre aux choses qu'elle a dites sur moi ».
Famille éclatée
Entre temps, tous deux ont suivi un autre chemin : Asne a écrit un autre livre, passé inaperçu, et Mohammed vit une sorte de drame familial. Sa première épouse est partie avec ses trois enfants au Canada, la seconde, avec deux autres enfants à Oslo. Deux fils lui restent pour tenir la boutique. Pas vraiment une partie de plaisir, lance-t-il.
À quelques jours d'intervalle, un attentat-suicide a frappé le bâtiment où se trouve sa boutique, mais malgré l'incident, et selon les normes afghanes, son entreprise continue de croître. Une notoriété qui n'est pas étrangère au Libraire de Kaboul, Mohammed en a conscience et renforcée par son humble présence sur Internet, ainsi que le bus qu'il fait circuler pour assurer l'approvisionnement de ses clients.
Des clichés plein la tête ?
Reste cependant l'amertume de cette visite, en 2001. Asne serait venue avec ses clichés en tête et se serait appliquée à faire rentrer sa famille dans le cadre qu'elle avait. De son côté, Asne estime qu'elle ne pouvait pas taire ce qu'elle a vu. Ou cru voir ? Voire voulu voir ? Nul ne le saura.
« Comme tant d'autres choses qui ont eu lieu en Afghanistan. Les gens de l'extérieur viennent ici et pensent qu'ils comprennent ce qui se passe. Mais ils se trompent. »