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Orléans et le Loiret rattachés à la Région parisienne ? ou comment Eric Doligé «sarkonne» allègrement !

Publié le 27 février 2009 par Kamizole

orleans-loire-pont-georges-v-cathedrale-beffroi.1235716210.jpgJ’ai beau habiter depuis 25 ans à Montmorency - ville bien agréable où je me plais… je rassure tout de suite mes amis de la nouvelle municipalité ! – je suis néanmoins restée orléanaise de cœur… On ne vit pas 30 ans dans une ville (quand j’y suis arrivée j’avais 4 ans ½) sans y laisser son coeur, beaucoup de souvenirs et une grande part de nostalgie. C’est notamment pour cela que je fréquente assidûment le site de Libé-Orléans dont au demeurant j’apprécie beaucoup les articles de l’excellent Mourad Guichard.

Cherchant ma pâture dans mes habituels quotidiens, et voulant traiter sur le fond le sujet de la «réforme Balladur» - dont je peux d’ores et déjà vous dire que j’en pense le plus grand mal ! – je vois sur Libé le titre d’un article qui, bien entendu, m’interpelle au plus haut point : Comité Balladur: Éric Doligé favorable à un Loiret déCentré… auquel répond un autre, avec lequel je subodore immédiatement que je serais nettement plus d’accord Comité Balladur : Jean-Pierre Sueur choqué par la position d’Éric Doligé…

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Bingo ! en effet Eric Doligé – sénateur (UMP) du Loiret et président du Conseil général du Loiret ne propose rien moins que de détacher le Loiret de la Région Centre pour le rattacher – en énième route du carrosse ! – à la Région Ile de France…il prêche notamment pour un rapprochement économique avec le Plateau de Saclay :

«Si le Loiret, qui est le principal département de la région, quitte le Centre, nous ne serons plus le leader, certes, mais ça n’est pas important. Il vaut mieux être l’un des joueurs de l’équipe numéro un, plutôt que le premier d’une équipe de huitième division». Lui vise un partenariat concerté avec le sud de l’actuelle Ile-de-France, et plus particulièrement le plateau de Saclay (Essonne et Yvelines). «Nous travaillons depuis longtemps avec la chambre de commerce et d’industrie (CCI) du Loiret au rapprochement du pôle cosmétique de Saclay. Plutôt qu’un axe Indre-Loiret qui n’aurait que peu de sens, je préfère m’ouvrir à cette possibilité».

Ajoutant que «Ce schéma du comité Balladur, qui pourrait être «exactement» le sien» il le verrait enfin comme un révélateur des volontés cachées: «Si l’on offre aux départements et aux régions cette possibilité d’évolution, il sera intéressant de connaître les positions de chacun. Ceux qui s’ouvriront à l’avenir et les autres, qui resteront bien au chaud».

Ah ! Il nous ressort cette nouvelle querelle des «Anciens et des Modernes» versus ultralibéralisme…

Encore faudrait-il que l’on me démontrât en quoi l’ultra-libéralisme – «le libre renard dans un libre poulailler» - représenterait le progrès, là où je ne vois que régression aussi bien sociale qu’économique :

les effets pervers de la globalisation des échanges viennent d’éclater au grand jour avec l’implosion de la Planète finance et si le must de la mondialisation consiste à supprimer l’industrie française pour déloca-liser en Chine et tenter d’esclavagiser les salariés français afin de les faire passer sous les fourches caudines des salaires, avantages et sociaux et condi-tions de travail du «Pire du Milieu», bref : son progrès, «il peut se le carrer où je pense» !

Merci aux incultes de ne pas me faire un procès en vulgarité et autres impolitesses… la formule est sans doute empruntée au parler populaire mais via le grand Marcel Aymé qui a des lettres de noblesses littéraires…

Je ne pense pas qu’Eric Doligé risque de prendre froid aux vents mauvais de la mondialisation. Il est bien au chaud dans ses fonctions politiques sans risques…

Tout à l’heure, étant allée dans la cuisine me préparer un café et mes œufs brouillés du petit-déjeuner – assortis d’un bon paquet de gruyère râpé… la maison ne se refuse rien ! – je pensais précisément à l’inusable Kléber Malécot – sénateur du Loiret de 1974 à 2001 - dont le nom m’est revenu du diable Vauvert de l’arrière-fond de ma mémoire…

Bingo ! Vérification faite sur Wikipedia, Doligé lui a précisément succédé à la tête de l’exécutif du Loiret en 2001… Avouez que se faire élire dans le canton rural de Meung-sur-Loire n’est guère plus difficile que cela ne l’était pour Malécot à Neuville-aux-Bois…

Quant aux «volontés cachées» je reviendrais – ailleurs - sur ce «dépeçage de la France»… entre la constitution de baronnies qui rappelleront furieusement autant l’Ancien Régime que la féodalité, sur arrière-fond uni-quement économique – au détriment de la démocratie et des citoyens qui seront encore davantage éloignés des centres de décision – auquel vous ajouterez un «charcutage électoral» sans précédent : y aurait-il autant de précipitation dans cette volonté de réforme territoriale si la gauche n’avait remporté la quasi totalité des régions en 2005 et la présidence de la moitié des conseils généraux en 2007 ?

Si Eric Doligé était une «intelligence» cela se saurait… Il a – comme Nicolas Sarkozy – une mentalité de petit bou-tiquier. Pour vivre depuis 25 ans en Région parisienne – et qui plus est, dans la «Grande Couronne» (Val d’Oise) fût-ce seulement à 15 km de Paris – je sais très bien qu’il «sarkonne» allègrement…

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Ni Orléans ni le Loiret n’y auraient avantage… en perdant son statut de capitale régionale, Orléans perdrait toute maîtrise de son destin et de l’organisation territoriale des infrastructures… écrivis-je ce matin en commentaire de l’article de Libé-Orléans.

Jean-Pierre Sueur (sénateur PS du Loiret, ancien maire d’Orléans) dit exactement la même chose (je n’ai consulté sa réaction qu’après avoir écrit ces lignes) et bien entendu, ses propos sont frappés au coin du bon sens : «Le Loiret et Orléans n’ont rien à gagner à être une périphérie de la périphérie parisienne».

Il suffit de penser - entre autres problèmes - à la merde actuelle dans les transports d’Ile de France - métro, RER et SNCF - où l’absence d’entretien et de rénovation depuis 25 ans sont responsables des dysfonction-nements à répétition.

Quant au Plateau de Saclay, il est peut-être proche sur une carte géographique mais sur le plan du train ou des autoroutes, Eric Doligé qui doit se faire conduire par un chauffeur n’a sans doute pas d’égard pour le petit enfer de l’autoroute ou des grandes voies, les embouteillages, etc… Même sur le plan strictement économique, Doligé se fiche «ditigo in oculo» ! Alors imaginez sur le plan historique et culturel régional…

J’ai vécu 30 ans à Orléans. La plus grande partie de mon enfance et de ma jeunesse. Je n’ai jamais pensé que nous fassions partie de l’Ile de France. Même si à une époque j’ai fait le trajet Paris-Orléans quasi quotidiennement pour travailler… en arrivant aux Aubrais à une heure du matin, j’étais contente de me retrouver «chez moi» ! Ne serait-ce que l’air nettement plus sain… déjà ! et c’était au début des années 70…

J’allais très souvent et facilement à Tours, Blois ou Châteauroux. Sans oublier bien évidemment Loches et la Sologne. Bourges et Chartres sont de regrettables exceptions sur le plan des transports ferroviaires en ce qui concerne les liaisons avec Orléans.

Doligé a tout à fait tort de prétendre que la Région Centre s’est construite «avec ce qui restait»… Pour très bien connaître la région, j’ai au contraire toujours trouvé une très grande cohésion géographique, économique et culturelle à ce regroupement. Si un département devait être rattaché à la Région parisienne ce serait plutôt l’Eure-et-Loir…

A contrario de ce que prétend Eric Doligé, si des coopérations économiques et culturelles doivent être recherchées, c’est évidemment d’une part du côté du Val-de-Loire : Blois et Tours, et vers le sud de la région : Châteauroux et Vierzon, en «désenclavant» Bourges sur le plan des transports ferroviaires.

Dire qu’Orléans n’a pas sa place naturelle dans la Région Centre est de surcroît une pure contre-vérité historique. Je doute d’ailleurs que s’agissant du «sentiment d’appartenance» la plupart des Orléanais partagent le point de vue d’Eric Doligé.

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Pour qui s’intéresse à l’Histoire, il est évident que la Région Centre – dont Orléans et le Loiret – ont comme le souligne Jean-Pierre Sueur, «une réalité culturelle, naturelle, géographique et historique» laquelle me semble échapper tout à fait au sieur Doligé qui regarde tout par le petit bout de la lorgnette de l’économisme le plus étroit.

Pour la culture : prière de repasser ! ou selon la formule consacrée : «ne jamais dire du mal des absents», lesquels «ont toujours tort».

Il faut en effet beaucoup d’inculture crasse pour oublier que Paris n’est devenue vraiment capitale – et d’un royaume encore étriqué - que sous Henri IV – «Paris vaut bien une messe» et qu’en effet les rois de France – parfois à cause de la Guerre de Cent ans – se déplaçaient de château en château, non seulement ceux du Val de Loire mais aussi Loches et Romorantin où la cour élut domicile à une époque. De même, Louis XI à Loches et Tours. François 1er dans tout le Val de Loire et la Sologne, Catherine de Médicis à Blois…

Mais je doute que pour un Doligé, le «sentiment d’appartenance» - culturel au sens très large - veuille dire quelque chose… Sa vision restrictive est «la France des marchands», bien alignée sur celle de l’Europe ultralibérale.

Pendant que je lisais tout à l’heure sur l’ordinateur - entre 3 h et 4 h du matin - des articles consacrés à la réforme Balladur, j’écoutais sur France-Culture une rediffusion de la «Fabrique de l’histoire» précisément consacrée à ce projet et ses implications politiques et culturelles… qui confirmaient pratiquement en tous points mes sentiments et réflexions.


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