Paul Valet, un poète insoumis
De son vrai nom Georges Schwartz, né à Moscou en 1905, dans une famille aisée
et cultivée, il apprend le piano très jeune et donne des concerts. Il assiste à
la révolution de 1917, à la suite de laquelle avec sa famille il part en Pologne avant de s’installer en
France en 1924. Il renoncera à la vie de musicien et deviendra médecin à
Vitry-sur-Seine en 1936 (généraliste puis homéopathe).
Durant la guerre il s'engage dans la résistance dès 1941, devient un des
responsables du réseau Libération en Haute Loire. Il perd son père, sa mère et
sa sœur à Auschwitz.
Revenu à Vitry-sur-Seine, il publie en 1948 son premier
recueil de poème. Il prend le nom de Paul Valet pour signifier qu'il est au
service de la poésie. Il peint également et au fil des publications et des
expositions, il entretient des relations avec Éluard, Prévert, Char puis
Cioran, Michaux, Dubuffet.
Au milieu des années 60 il traduit les poèmes du futur prix Nobel Joseph
Brodsky.
Il cesse d'exercer la médecine en 1970, et malgré les troubles neurologiques
graves qu'il commence à éprouver et qui ne cesseront plus, il continue la
pratique du piano (il aime particulièrement Albeniz et Scriabine), il écrit de
plus en plus, laissant des inédits, et meurt le 8 février 1987.
François Bon écrit à propos de lui : « Paul Valet est dans cette
insoumission de l’écriture, ce qu’elle implique pour les choix de vie et des
risques, que le besoin vital d’écrire inscrive cela aux frontons sans cesse réeffacés
de notre histoire. La littérature proteste, la littérature fait peur, la
littérature vous met en bascule, et ceux qui s’y risquent pour eux nous
poussent à notre tour vers le lieu de danger, le lieu où on crie, où il y a
folie. Pour cela qu’ils sont si rares, si précieux, si nécessaires, les poètes
: pour leur refus. »
Mêlant sagesse et révolte, Paul Valet reste contemporain dans un monde plus que jamais dominé par la surface des mots et qui a besoin de retrouver leur force. Jacques Lacarrière écrit : « Il est vrai que lire Valet donne parfois le vertige. Mais ce vertige est salutaire puisqu'il remet précisément l'esprit en place. Au terme des chemins parcourus, depuis les appels de Diogène, les cris gnostiques, les chants d'Achrab et les murmures de maître Dogen, éclot l'oeuvre gnostique et benthique de Paul Valet. À ce stade, il n'est nullement exagéré de proposer le mot de chrysalide. Celle où dort encore l'Homme à venir, l'Homme-avenir. »
Biblio (non exhaustive)
Sans muselière, GLM, 1949
Poésie mutilée, GLM, 1951
Poings sur les i, Julliard, 1955
La parole qui me porte, Mercure de
France, 1965
Paroles d’assaut, Minuit, 1966
Vertiges, Granit, 1987
À propos de :
Paul Valet - Soleil d’insoumission de Jacques Lacarrière , Jean-Michel Place,
2001
Paul Valet, Le Temps qu'il fait / Cahier cinq, 1987
Sur Internet : Éditions Jean
Michel Place
Sur le blog de
l'écrivain François Bon
La parole qui me porte
La parole qui me porte
Est l’intacte parole
Elle ignore la gloire
De la décrépitude
La parole qui me porte
Est l’abrupte parole
Elle ignore le faste
De la sérénité
La parole qui me porte
Est l’obscure parole
Dans ses eaux profondes
Ma lumière se noie
La parole qui me porte
Est la dure parole
Elle exige de moi
L’entière soumission
La parole qui me porte
Est une houle de fond
C’est une haute parole
Sans frontière et sans nom
La parole qui me porte
Me soulève avec rage
in Paul Valet - Soleil d’insoumission de Jacques Lacarrière, Jean-Michel Place, 2001- p.63
Note de lecture et choix proposés par Pierre Kobel