Bellamy

Par Rob Gordon
Quinze ans que Claude Chabrol déçoit encore et encore, échouant à se renouveler et montrant des signes de vieillissement accéléré. Si Bellamy n'est pas le plus mauvais de ses derniers films, il accentue cette terrible impression d'essoufflement d'un cinéaste qui semble non seulement être resté bloqué dans les années 80, mais qui de plus a fait le tour de ses sujets de prédilection. De sa traditonnielle peinture de la bourgeoisie, il ne reste plus que des miettes, tout ayant déjà été dit ailleurs - et en mieux. L'intrigue policière ayant elle aussi du plomb dans l'aile, Bellamy ne vaut que pour ses comédiens, qui s'en donnent à coeur joie malgré une façade un peu morose.
Pour son premier film avec un Chabrol qui a écrit le rôle pour lui, Gérard Depardieu est assez savoureux de bonhommie pantouflarde, commissaire casanier qui sort enfin de sa routine pour une dernière enquête. Le couple qu'il forme avec la douce Marie Bunel est l'un des vrais points forts d'un film sachant se faire tendrement vache. Quant à Jacques Gamblin, dans un rôle multiple pas franchement évident, il n'est visiblement pas aussi à l'aise que d'habitude mais joue habilement de son regard perçant. Cornillac fait du Cornillac, mais il le fait plutôt bien ici. Dommage que tous les efforts mis en oeuvre soient au service de cette toute petite intrigue dont on comprend difficilement qu'elle donne lieu à un film d'une heure cinquante.
Car on connaît quasiment les tenants et les aboutissants de l'enquête policière en à peine trois quarts d'heure, le reste n'étant que rabâchage et coupage de cheveux en quatre. Quant aux rapports conflictuels entre Bellamy et son frère, ils sont plus intéressants mais ne trouvent pas vraiment leur place dans l'ensemble. Heureusement que Bellamy est un Chabrol plutôt rigolard, tranchant avec le relatif sérieux de ses derniers films : cela permet de faire passer le temps plus vite, d'apprécier les échanges entre des acteurs ravis d'être là, et de dédramatiser le relatif échec du film à nous faire prendre des vessies pour des lanternes. « Il y a toujours une autre histoire, il y a plus que ce que l'oeil peut saisir », nous dit le film en guise de conclusion. Seulement voilà : la seconde lecture envisagée par cette citation de W.H. Auden (poète et critique britannique, merci Wikipedia) semble bien difficile vu la maigreur du matériau de base.
4/10