- Moi : Pourquoi les lapins y sont morts ?
- Ma mère : Hé bien parce que tout le monde meurt un jour…
- Moi : Mais toi aussi tu vas mourir un jour alors ?
- Ma mère : Bien sûr que je vais mourir un jour, c’est comme ça…
J’ai du mal à comprendre ce qui m’arrive. Sans doute je dois souffrir d’hypersensibilité. Je n’en sais rien. Je m’émeus d’une manière totalement démesurée de la mort d’un parfait inconnu. Vendredi dernier nous apprenions le décès de l’époux d’une de mes collègues et ce matin un dernier hommage lui était rendu, hommage auquel nous avons assisté. Ce n’est pas du mélodrame et je n’ai d’ailleurs pas versé une larme pour cet homme que je n’avais jamais vu, c’est juste plus intérieur, une sorte de réflexion et un frisson qui, depuis ce matin, me parcourt l’échine.
D’entendre des discours et des musiques religieuses, j’en viens à me demander si je n’aurais pas préféré pouvoir comprendre tout ça. Comprendre pourquoi des hommes et des femmes trouvent important d’embrasser la croix. Comprendre pourquoi une phrase, un verset ou la simple parole d’un homme d’Église peut apaiser la souffrance des familles et des proches du défunt. Au contraire de certains non croyants, je n’ai jamais eu “l’injure” facile pour ces cérémonie et la hiérarchie écclésiastique mais je ne les ai jamais totalement comprises.
Ma mère est croyante protestante mais elle n’a plus fréquenté le Temple depuis bien longtemps. Mon père ne croit en rien. Ils ont choisi de ne pas m’imposer d’opinion. Inconsciemment, j’ai choisi la solution la moins engageante, celle de ne rien refuser mais de ne rien accepter non plus. “Je ne sais pas“. C’est la résiliation mais aussi la reconnaissance qu’il y a des choses qui nous dépassent. La voie la moins rassurante mais aussi la plus grisante. Parfois je voudrais croire que le “divin” est en chaque être et dans une transcendance “horizontale” représentée par l’amour, l’amitié, la compassion et tous les sentiments humains. Parfois je voudrais avoir la certitude que la mort c’est comme éteindre une lumière, “on” tu es là, “off” tu n’es plus. Je voudrais tellement ne rien en attendre et embrasser dans la joie et l’insouciance le chemin que j’ai déjà fait et celui qu’il me reste à parcourir.
Je voudrais témoigner ma sympathie à cette dame qui se retrouve seule aujourd’hui. Les premier mois que j’étais ici elle ne m’aimait pas trop. Derrière mon dos, elle m’appellait le “jeune con” parce que dans certaines circonstances j’avais été améné à lui faire quelques remarques. Avec le temps, j’ai appris à la connaître et cette appellation est devenue une sorte de blague entre elle et moi. Aujourd’hui, quand je lui ai présenté mes condoléances, elle m’a embrassé, m’a souri et m’a dit du haut de son accent tournaisien : “merci petit con“. J’ai trouvé ça touchant.