Je reproduis ci-dessous la chronique de l’économiste Bernard Maris de ce matin sur France Inter reprise sur le site de marianne.
C’est plutôt pas mal à vous de juger…
“Enfin, la vedette, n’exagérons rien. Seuls 44% des français consomment au moins un produit bio en un mois. L’agriculture bio reste encore quelque chose de marginal, méprisé réservé au Parisiens et aux bobos, à ceux qui ont les moyens…
Les moyens de quoi d’ailleurs ? De rester en bonne santé ? de donner de la nourriture saine à leurs enfants au lieu de nourriture empoisonnée ? Telle Ministre de la République avouait, un peu gênée, ne consommer que bio. Pourquoi, lui demandait-on ? « Pour des raisons de santé » disait-elle du bout des lèvres…
Mais ne boudons pas notre plaisir : on commence à comprendre que l’industrie agricole, l’industrie agro-chimique intensive et productiviste, celle qui a tranformé les paysages en déserts de terres complètement stériles, qui ne deviennent productives que grace aux engrais, qui a créé les élevages concentrationnaires, hors-sol et en batterie, celle qui fait que 80% des légumes sont produits sous serre et hors sol, celle qui pollue l’eau des rivières ou des nappes phréatiques, commence à être critiquée…
Mais c’est vrai, cette agiculture-là est moins chère. Enfin : beaucoup moins chère : un peu moins chère. Les salades gorgées de pesticides et d’engrais sont moins chères. Les pommes de terre non. Le riz non plus. Le lait ? A peine moins. La viande beaucoup moins chère, certes, mais le œufs et le lait non bio sont à peine moins chers. Mais que veut dire « moins cher », quand le « moins cher » ruine l’environnement et la santé ?
7 milliards d’euros pour les céréaliers
Et la surface bio devrait augmenter.. Elle n’est aujourd’hui que de 2% (ce qui veut dire que 98% de la malheureuse terre agricole est soumise aux engrais et aux pesticides, et elle devrait tripler d’ici 2012. Le gouvernement envisage de fournir les cantines et les restaurants en bio à hauteur de 20% toujours d’ici 2012. C’est très bien. Ce qui veut dire que 80% de la nourriture sera de moins bonne qualité. Mais on peut penser que les agriculteurs, les vrais, reviendront petit à petit en France, pour récupérer le terrain face aux industriels de l’agro-chimie. Lesquels vendent moins cher… Mais l’agriculture reçoit 10 milliards d’aides européennes par an, dont les 2/3 vont aux céréaliers. Peut-être faudrait-il aider un peu plus le bio. L’agro industrie produit pour la grande distribution. . Peut-être aussi faudrait-il regarder ce que la grande distribution a fait de notre vie, en détruisant les villes. Mais la vraie question est : l’agriculture bio pourrait-elle nourrir la planète. Et la réponse est ? Oui bien sûr, et en plus en la respectant ! L’an dernier, 2000 agriculteurs sont devenus bios. C’est un petit signe, mais un bon signe.
La phrase : « Regardez l’entrée des villes. Comment les politiques ont-ils pu les enlaidir à ce point ! » Michel Serres.