Pire qu’en Guadeloupe
Depuis le 20 janvier, des milliers de Guadeloupéens manifestent leur mécontentement contre la vie chère. A la Réunion, un collectif a décidé de passer à l’action en annonçant une grève générale le 5 mars prochain. La situation est-elle comparable ?
Mots-clés
- carburant
- pouvoir d’achat
- prix
- solidarité
On dirige La Réunion à travers les métropolitains ! » Joël Mongin, président de la FNTR (Fédération Nationale des Transporteurs Routiers) ne craint pas de prendre à son compte les slogans des manifestants guadeloupéens dénonçant la domination des « Békés » (descendants blancs des premiers colons) à la tête de l’économie antillaise. C’est justement Joël Mongin qui avait lancé le mouvement de novembre et décembre : réseaux routiers paralysés, écoles fermées, économie ralentie. Tout a commencé à La Réunion avec la grève des transporteurs. Ils réclamaient alors une baisse de 20 centimes sur les prix des carburants. En quelques jours, ils obtenaient satisfaction et levaient les barrages. Le 5 décembre, c’est au tour de la Guadeloupe de réagir en formant un collectif, le LKP, avec la même attente. Les Guadeloupéens obtiennent, eux, une baisse de 11 centimes sur l’essence. Pour aider les ménages modestes, le RSA (Revenu de Solidarité Active) sera applicable en Guadeloupe dès la fin 2009 avec une année d’anticipation sur les autres départements nationaux. Idem à la Réunion. Fort de cette avancée, le LKP revendiquait une baisse de 20% sur les denrées alimentaires, une hausse de 200 euros sur les bas salaires ainsi que le gel des loyers sociaux. Avant d’obtenir gain de cause, la Guadeloupe a été paralysée depuis le 20 janvier, stations services, écoles et commerces sont restés fermés. Le mouvement s’est durci et a tourné au drame, dans la nuit de mardi à mercredi, avec le décès par balle d’un syndicaliste. Aujourd’hui, le LKP a accepté de reprendre les négociations avec le gouvernement, qui a accordé, semble-t-il, la totalité des augmentations demandées.
Manque de solidarité
La Réunion s’est appropriée, à son tour, les revendications antillaises. Un collectif de 25 associations vient d’être créé. Membre du collectif, le PS local propose, de son côté, 10 mesures en faveur du pouvoir d’achat, tels que l’alignement des prix insulaires sur ceux de la métropole pour 100 produits de consommation courante. Plus de 20% de la population active au chômage, un coût de la vie supérieur d’au moins 30% par rapport à la métropole, la situation est quasiment identique dans les deux îles. Ce sont également les banques des Dom qui facturent le plus cher leurs services : selon l’association « Consommation, Logement et Cadre de vie », quatre banques réunionnaises figurent parmi les cinq plus chères de France, juste derrière… la Banque des Antilles Françaises. Les prix des denrées alimentaires ? Suivant l’exemple guadeloupéen, le collectif réunionnais a investi samedi dernier une grande surface de Sainte-Clotilde pour dénoncer la cherté des produits. Alors que la grande distribution a cédé 10% sur 100 produits de base à la Guadeloupe (sur les 20% espérés par le LKP), aucune révision chez nous malgré une charte signée en juillet en présence d’Yves Jégo. Le dernier relevé du chariot type mis en place par la préfecture montre même une hausse générale de 2% sur les étiquettes. Ce système de mesure a été copié-collé en Guadeloupe par le ministre Yves Jégo, alors qu’il laisse les syndicats et la grande distribution pour le moins insatisfaits.Le collectif réunionnais appelle à la grève générale et à la manifestation pour le mois prochain. « Attendre jusque-là c’est trop loin, il faut réagir tout de suite ! » gronde Joël Mongin. Mais des manifestations à l’échelle des Antilles peuvent-elles être observées chez nous ? « Non » selon Denis Charini, Réunionnais d’origine guadeloupéenne et président de l’association « Soleil Caraïbes ». Les raisons évoquées : le manque de solidarité et de ténacité des Réunionnais. « Quand il y a des manifestations aux Antilles, tout le monde bouge, ce qui n’est pas le cas à la Réunion. En plus, renchérit Denis Charini, ici, on se contente souvent du minimum ». Verdict le 5 mars prochain…
Anaïs BARTH et Yannick PITOU
Etudiants en journalisme à Info-Com