Lady Susan

Publié le 23 février 2009 par Lael69
Jane Austen
Editions Gallimard
Collection Folio 2 euros
N° 4396
115 pages
Quatrième de couverture: Une veuve spirituelle et jolie, mais sans un sou, trouve refuge chez son beau-frère, un riche banquier.Est-elle dénuée de scrupules, prête à tout pour faire un beau mariage, ou juste une coquette qui veut s'amuser ? Le jeune Reginald risque de payer cher la réponse à cette question. Grande dame du roman anglais, Jane Austen trace le portrait très spirituel d'une aventurière, dans la lignée des personnages d'Orgueil et préjugé et de Raison et sentiments.
Lady Susan est une veuve et une mère peu conforme aux bienséances sociales. Son éducation raffinée lui vaut compliments dans la haute société de Londres mais Lady Susan est une femme pour le moins méprisable et méprisée. Sa réputation est mal assurée notamment auprès de Mme Vernon, sa belle-soeur. Elle affiche une apparence exemplaire, une morale à toute épreuve et un comportement en phase avec les exigences de la mondanité. Mais au fond, si on fouille bien la personnalité de Lady Susan, la mort de son mari ne l'affecte pas et ne l'empêche pas de se faire courtiser. En tant que mère, c'est un échec total puisqu'aucun instinct maternel ni aucune affection ne transparaît dans ses liens et ses échanges avec sa fille. Au contraire, Lady Susan ne tarit pas d'odieux propos quand il s'agit de parler d'elle : "bonne à rien" et "sotte". Oui, on peut dire que Lady Susan cache bien son jeu et mène son monde selon ses intérêts et ses désirs. Seulement tout le monde n'est pas dupe de son air de mère apitoyée et de femme remarquable car si la beauté, du moins l'apparât peut éblouir la galerie d'hommes fortunés, jeunes ou voire déjà mariés, il se peut que sa perfidie se découvre au fil de ses mensonges érudits.
Pourquoi "mensonges érudits"? Assurément, Lady Susan possède un talent indiscutable: mentir et manipuler les esprits à sa volonté. Cela tient du prodige et son savoir en la matière est grandiose, et cela me rappelle une réplique de Monsieur Bennet à sa femme concernant ses talents d'entremetteuse relevant de l'occulte!!! Mais Jane Austen trompe aussi son lecteur. Ne vous attendez pas à voir une flamme d'héroïne briller en Lady Susan. Point d'Elisabeth Bennet à l'horizon car Lady Susan est aux antipodes de la gentille héroïne qu'affectionne tant Jane Austen dans Raison et sentiments, Orgueil et préjugés ou Emma. Lady Susan, certes, nous amuse: sa perfidie, ses plans calculateurs et sa profonde hypocrisie font d'elle une femme toute bouffie de médiocrité et de malveillance. Jane Austen surprend également ses lecteurs en nous composant un roman épistolaire. Les lettres se succèdent et esquissent une galerie de personnages amusants, découvrant au fil de leurs correspondances leurs intérêts, leurs ambitions et leurs médisances. Il en va des vacheries, entourloupes et autres petites jalousies qui ponctuent les échanges et les rendent croustillants. L'art des potins est à son apogée et ma foi, j'ai bien aimé. Ce n'est pas le meilleur Austen mais on retrouve le côté critique de cette société à travers un personnage tout en laideur mais non dénué de malice. Car la vérité n'est pas bonne à dire: en cela Lady Susan révèle une réalité marquante de la société anglaise du XIXe siècle: Mieux vaut se taire qu'attirer la disgrâce et s'il faut médire que cela se fasse dans le confort de l'intimité...
Une lecture plaisante à tenter pour tous les amateurs de notre Austen adorée!

5/5 champignons