Les incidents (le mot est faible) de Guadeloupe ont de quoi nous faire réfléchir.
Il n’est pas si loin, le temps du commerce triangulaire qui a fait de la France l’un des marchands d’esclaves du monde. Souvenons-nous de l’itinéraire des ces grands bateaux transporteurs de « charbon » ou de « bois d’ébène » qui, de nos ports de la côte Atlantique, partaient livrer à Dakar des tissus, des armes et de l’alcool puis, débordants d’esclaves, prenaient la route du grand large pour les Caraïbes, lieu des marchés, pour revenir à leur point de départ, chargés de sucre, tabac et café ! Certes, nous n’étions pas les seuls ! Les Anglais ont largement contribué eux aussi à exporter la marchandise humaine, et les États-Unis à la consommer ! Il en reste aujourd’hui de somptueux hôtels particuliers et monuments publics dans nos ports atlantiques, et d’importantes populations issues de ce commerce dans les pays d’Amérique. Toujours malmenées, toujours écartées de la vie publique et des décisions économiques qui, pourtant, la concernent d’abord, ces populations souffrent de pauvreté croissante et d’un constant manque de respect. Nés esclaves ou enfants et petits-enfants d’esclaves, nombreux sont celles et ceux qui, aujourd’hui encore, sont victimes d’une exploitation éhontée par des enfants et petits-enfants de maîtres. Sans compter le joug imposé à eux comme à tous les autres, de métropole ou d’ailleurs, par les nouveaux maîtres de l’économie dite moderne !
Les grandes manifestations de prétendue repentance, si elles donnent un instant bonne conscience à quelques-uns, ne changeront rien à la situation. Elles ne redonneront pas à ces Français de là-bas la dignité qui leur est toujours refusée par quelques héritiers d’une féodalité d’hier.
Bien sûr, il est urgent de redonner aux plus démunis la possibilité de vivre décemment et de profiter justement du fruit de leur travail, mais les aides financières ne seront pas suffisantes !
C’est d’une véritable mise en harmonie avec notre République que ces populations ont besoin, comme l’ensemble du peuple de France de Pointe-à-Pitre à Nouméa, en passant par Cayenne et… Maubeuge !
Cette République que nous avons encore à enraciner davantage dans nos pratiques quotidiennes, dont les valeurs vraies doivent nous assembler, à des années-lumière du postulat pervers de l’un de ses « pères fondateurs », le Tonkinois Jules Ferry, qui prétendait que « les races supérieures ont des droits sur les races inférieures » (postulat qui nous encombre encore la tête aujourd’hui, et pervertit bien des responsables de notre temps, quels que soient leur champ d’action et la couleur de leur peau !)
Bien plus que du devoir de mémoire, c’est du devoir de strict respect de sa devise LIBERTÉ-ÉGALITÉ-FRATERNITÉ que notre pays a besoin en tous les points de son territoire et pour tous ses citoyens !
Merci, sœurs et frères de Guadeloupe de nous le rappeler !
Si vous réussissez à nous le faire comprendre et admettre, alors votre souffrance n’aura pas été vaine ! Et ce sang versé, et cette misère supportée auront été… les derniers !
Méditons et agissons !