Olusegun Sotola et Kayode Olowookere – Le 19 février 2009. L'année dernière, les dirigeants des banques nigérianes ont demandé au Etat fédérald'intervenir dans le secteur financier du pays afin de minimiser l’impact que la crise financière mondiale pourrait avoir sur le Nigeria. Jusqu'à présent, le gouverneur de la banque centrale a toujours assuré aux Nigérians que les banques du pays sont en bonne santé et n'ont pas besoin d’assistance. Pourtant, il existe des informations selon lesquelles l’Etat fédéral pourrait bientôt faire partie des propriétaires de certaines banques. L’Etat nigérian a-t-il intérêt à céder à la tentation d’intervenir dans le secteur bancaire ?
Parmi les 25 principales banques du pays, aucune n'avait exprimé publiquement le désir d'être aidée - ou du moins leurs états financiers et les énormes primes versées discrètement à leurs cadres supérieurs ne le laissaient pas penser. Il est donc inquiétant de voir soudainement que les mêmes banques prétendument en excellente santé demandent maintenant à l’Etat des renflouements, voire dans certaines circonstances une prise de contrôle partiel par l’Etat. Il est clair que le public a été manipulé en croyant aux chiffres produits en série chaque année par les banques.
Comme les renflouements et l’appropriation partielle sont insuffisants, il reste la suggestion selon laquelle l’Etat devrait réinvestir dans les banques. En vertu de cet arrangement, l’Etat acquerrait une participation majoritaire de 30% dans certaines banques. Alors que la ligne d'action de l’Etat fédéralest prévisible, au vu de la tendance mondiale, la question générale posée par de nombreux Nigérians est quel modèle produire par l’Etat pour remédier à la maladie que les banques se sont infligées?
Avant la libéralisation du secteur bancaire en 1992, la mauvaise gestion dans les banques était répandue sur une grande échelle. Les banques sont devenues des appendices des partis politiques suivant celui qui était au pouvoir. Les rémunérations des dirigeants d'un grand nombre de banques n’étaient pas fondées sur le mérite. Les bonnes pratiques bancaires ont été délaissées et, par conséquent, la survie des banques est devenue tributaire du cycle des renflouements publics.
La privatisation a, cependant, modifié le paysage bancaire dans la mesure où elle a mis fin à l'intervention publique dans les banques, contribuant ainsi à la lutte contre la mauvaise gestion et l'inefficacité. La bureaucratie a cédé la place à un processus de décision amélioré et rapide, en particulier, en matière de marketing et d'innovation, impliquant une concurrence accrue sur le marché et une amélioration de la qualité des actifs.
Mais tous ces gains ont été rognés par les fissures profondes qui ont sous-tendu l’industrie libéralisée pendant cette période. C'est peut-être la beauté du fonctionnement d'une société ouverte : une société libre si elle récompense, punit également, de sorte que nous pouvons tous apprendre de nos erreurs. L'appel à l’Etat pour réinvestir dans des banques à un tel point est donc en grande partie infondé et au mieux une folie économique. Le devoir principal de l’Etat est de fournir le cadre réglementaire sous lequel les banques opèrent et de créer un climat favorable les incitant à contribuer de façon significative à la croissance de l'économie.
L'expérience a montré que les banques partiellement ou totalement publiques sont incitées à la mauvaise gestion. En effet, comme l’Etat est considéré comme ayant des sources de revenu illimitées, qui constitueront toujours un filet de sécurité, la futilité et l’extravagance sont encouragées. Elles ont été le grand ennemi des entreprises parrainées par l’Etat, Fannie Mae et Freddie Mac, aux États-Unis d'Amérique.
Mais il y a un plus grand danger. L’acquisition par l’Etat d’actions dans certaines banques créera évidemment une « ségrégation » entre les bonnes et les mauvaises banques à moins qu’il ne réinvestisse dans toutes les banques. En conséquence, les déposants retireront leurs épargnes des « mauvaises » banques. Ca a été l'expérience du Royaume-Uni l'année dernière lorsque les déposants ont instantanément transféré leurs fonds aux banques cautionnées par l’Etat irlandais.
Malheureusement, le réinvestissement de l’Etat dans les banques aura un effet dévastateur sur l'ensemble du secteur bancaire. Un changement de gouvernance compromettra en fin de compte et affectera la composition du conseil d'administration et la performance. En plus de raviver la perte de confiance dans nos banques, comme ça a été le cas dans les années 90, prendre des décisions bénéfiques à long terme sera un mirage. De manière prévisible, les querelles internes et la bureaucratie fleuriront et occuperont le centre de la scène.
L’interventionnisme de l’Etat dans le système bancaire annihile les gains des réformes dans le secteur financier. C'est un chemin que nous avons emprunté auparavant. Il ne mène nulle part. Si l’Etat a cédé à des institutions financières et d’autres entreprises publiques c’est en partie parce que ces investissements ont été une perte de richesse nationale.
Malheureusement, l'intervention de l’Etat dans le secteur bancaire sera une récompense pour certains dirigeants de banques qui sont devenus plus riches que leurs banques. Ce serait une incitation aux dirigeants à poursuivre ce qui a conduit la plupart des banques à leur état actuel.
Olusegun Sotola et Kayode Olowookere font partie du think-tank nigérian, l'Initiative pour l'analyse des politiques publiques, un partenaire de www.AfricanLiberty.org