Resté dans l’incompréhension de la manifestation du 29 janvier, le président de la République entretient la posture de l’empathie : il ne s’agit pas d’un plan « anti crise » mais d’un plan d’aide aux « victimes de la crise ». A part la suppression partielle de l’impôt sur le revenu (premier et deuxième tiers) pour les 2 millions de ménages soumis à la première tranche d'imposition, tout n’est que « premiers secours ».
Saler la route pour les ambulances« Bons d’achat » de 200 euros pour l’aide à domicile aux familles comportant un enfant handicapé ou bénéficiaires de l’allocation d’autonomie, prime de 400 euros pour les chômeurs pouvant justifier de 2 à 4 mois d’activité, prime de 150 euros aux familles bénéficiant de l’allocation de rentrée scolaire… Saupoudrage partout, à l'exception notable de l’indemnisation du chômage partiel, qui fait un vrai bond de 60 à 75% du salaire brut.
Pour renforcer le côté « justice sociale » de ses mesures, le Président éthique propose d’étendre l’interdiction de toucher des bonus aux patrons ayant recours aux licenciements économiques ou au chômage partiel. Quant à la réflexion sur les « trois tiers », expression à laquelle il a préféré substituer « partage de la valeur ajoutée », elle fait l’objet d’une millième commission ad hoc dirigée par Philippe Cotis, président de l’Insee, dont le rapport publié ce mercredi matin dans Les Echos révélait que seuls 5,5% des bénéfices des entreprises revenaient aux salariés. Même sort pour le débat sur la rémunération, qu’il confie aux syndicats et aux patrons. Beau courage politique sur les salaires !
« Garder le cap »… des réformes !La seule mesure sociale de circonstance a été inspirée par la CFDT : créer un fonds d’investissement social pour coordonner les efforts dans la lutte contre le chômage. Comme le reste du plan, le financement est à minima : 1,5 milliards. Des clous !
Le montant total des mesures annoncées paraît lui-même ridicule : 2,6 milliards d'euros — à peine le double de la dotation de 1,4 milliard, annoncée du bout des lèvres pendant sa dernière intervention télévisée. 2,6 milliards d'euros c'est seulement 10% du tonitruant « plan de relance », déjà perdu dans les limbes de la crise.
Car, Raymond Soubie l’avait dit dès le lendemain de la manifestation du 29 janvier, il faut « garder le cap », celui des réformes. Alors que les faillites se multiplient, du constat même de Laurence Parisot, alors que le chômage explose et que l’inquiétude augmente, Sarkozy dépense de moins en moins pour lutter contre une crise de plus en plus réelle.
Cautères sur une jambe de boisDe l’autre côté de l’Atlantique, c’est 400 milliards de dollars que le gouvernement américain a débloqué pour aider les seuls magnats de l’immobilier et de la finance Fannie Mae et Freddy Mac. Le Japon aligne pour sa part un troisième plan et l’Inde commence à se trouver à court de crédit.
Seul Nicolas Sarkozy se comporte comme s’il s’agissait simplement de soigner la petite toux de l’économie et de l’emploi français alors que la finance prépare sa tuberculose. A l’étranger, la presse révèle chaque jour de nouveaux foyers d’actifs pourris, cachés au fond des coffres : le FMI aurait calculé que les banques européennes seraient exposés à 75% du taux d’infection des Etats-Unis, recélant 294 milliards de dollars de créances douteuses, contre 738 pour les Américains.
Mais en France, tout va comme sur une île gelée dans sa certitude au milieu de l’Atlantique qui croit que l’aide apportée à ses banques l’immunise contre tous les fléaux. Bercé par la douce musique de l’optimisme sarkozyien, on en viendrait à se souvenir qu’une autre île avait sombré dans la même indolence. C’était l’Islande. Et elle a coulé.Philippe MARX - Agir ! Réagir !