Souvent, les Français se gaussent des Suisses, ne retenant que les clichés sur l’Helvétie (secret bancaire, argent blanchi, refuge des Dictateurs, antichambre de Paradis Fiscaux etc). Mais il n’y a pas que des coffre-forts en Suisse, il y a aussi des hommes fort courageux qui ont du coffre. Et Bernard Bertossa en est un. Il vient de se raconter en un livre passionnant «La Justice, les affaires et la corruption ». Rendons justice aux Editions Fayard et à la journaliste Agathe Duparc de nous avoir éclairé sur le bonhomme et sur son travail de juge et de procureur qui ne voulut pas se laisser impressionner par les Puissants.
Bernard Bertossa est resté à la tête du Parquet de Genève de 1990 jusqu’à 2002. Il est aujourd’hui retraité. Sans lui, sans ses équipes de fonctionnaires et de magistrats, beaucoup d’affaires se seraient enlisées. Il est à la croisée des scandales qui ont émaillé l’avant- dernière décennie : l’Affaire Elf, dossier des frégates de Taïwan enterré par trois gouvernements successifs, affaire Mabatex qui fit vaciller Eltsine etc. Bernard Bertossa, interviewé par une journaliste sans complaisance, parcourt l’Europe, ses potentats à l’argent douteux. Il passe en revue l’Allemagne (un dégoût pour la reconversion du socialiste Gerhard Schröder) et le Lichtenstein, l’Italie et son Chef («Sa méthode consiste à changer la loi pénale à son profit et à celui de ses proches»), il scrute la criminalité russe (Borodine) qui lui a laissé un goût amer, celle d’Ukraine et du Nigeria, il pointe du doigt les paradis fiscaux et Chypre, place financière numéro Un sur la liste noire. Il est très acerbe sur Londres-plaque-tournante et sur le socialiste Tony Blair, a des mots durs sur Marcos, Omar Bongo (pages 180-181), Sani Abacha, Benazir Bhutto.
Et bien entendu, il s’arrête sur la Justice de France, Grande Donneuse de leçons en matière de justice mais si peu indépendante du pouvoir politique. Dans les propos du Juge, on voit passer Jacques Vergès, Alain Minc, Daniel Mitterand, Jacques Toubon, Gérard Longuet, Alain Carignon qui, tous, font de la résistance devant les Commissions rogatoires. On se rend compte de l’effacement du Parquet (et BiBi voit de là ce qui se dessine avec l’effacement… du juge d’instruction : «Quand un parquet n’ouvre pas d’enquête, écrit le juge suisse, la justice pénale n’existe pas»). Bernard Bertossa dit aussi sa grande inquiétude vis-à-vis des projets de Little Nikos lorsque celui-ci veut «dépénaliser le droit des affaires». Il s’interroge sur ces politiques qu’il qualifie de populisme : «On demande à la justice des résultats tangibles dans le présent. Le message adressé aux juges ou aux procureurs pourrait être : cessez de perdre votre temps dans la poursuite de la délinquance d’affaires et débarrassez-nous des petits délinquants qui polluentnotre vie quotidienne. C’est une politique criminelle absurde et la démonstration a été faite qu’elle ne fonctionne pas ».
Bernard Bertossa est signataire de l’Appel de Genève en 1996, appel impulsé par Denis Robert (à qui il rend hommage). BiBi fait lui aussi son appel des rives du Léman : «Courez vite acheter La Justice, les affaires, la corruption de Bernard Bertossa ».
BiBi a aussi aimé (re)lire ce qui concerne :
- Antoine Bernheim, l’ami fidèle du Président. Mercredi 7 janvier 2009
- Jean-Claude et Silvio. Mardi 16 décembre 2008
Tags : Agathe Duparc, Appel de Genève, Bernard Bertossa, Denis Robert, Little Nikos
Cet article a été publié le Mercredi 18 février 2009 à 23:31 et a été classé dans Livres de lecture & Poésie. Vous pouvez suivre les commentaires sur cet article en vous abonnant à ce flux RSS 2.0. Vous pouvez laisser une réponse, ou un trackback depuis votre propre site.