A la lecture du blog « Les RG analysent l’exception marseillaise » et du site officiel de la MILDT (Mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie), on a une piste intéressante (et plutôt paradoxale) de réflexion sur le calme relatif de Marseille lors des émeutes des banlieues de l’automne 2005 et sur la raison profonde de l’arrêt de ces émeutes dans tout le pays, in fine. Les émeutiers auraient eu finalement le même réflexe de bon sens que les « bourges » qu’ils sont censés honnir : s’en remettre à la sagesse du dicton « pour vivre heureux, vivons cachés » ! Autrement dit, les dealers (qui contribuent à faire la pluie et le beau temps dans ces zones présumées ‘‘de non droit’’, à tort ou à raison) auraient imposé le retour au calme pour poursuivre tranquillement leur « business » rémunérateur : pas de calme, pas d’« affaires » ; paix sociale, les trafics peuvent reprendre ! Extrait d’un reportage de l’AFP cité par la MILDT : « aux Mureaux, M, 21 ans, traîne dans la rue, attendant la fin des émeutes pour ‘‘re-continuer’’ son ‘‘business’’. Il affirme ‘‘même en bas de chez moi, y’a des jeunes qui balancent des pierres. Je descends pour leur dire de partir. Ça attire les flics’’. Un policier déclare ‘‘les plus impliqués dans les trafics ne bougent pas’’, ce qui, selon l’agence, signifie qu’ils ne brûlent pas les voitures ni ne se heurtent à la police. (…) M attend la fin des émeutes pour reprendre ce ‘‘travail’’ lucratif ». En clair, il y aurait une convergence d’intérêts entre les « bons citoyens » (représentés par les autorités officielles) et les dealers, moins marginaux et plus enclins à la paix civile qu’on ne le croirait a priori, car animés eux aussi, comme les gens ordinaires, par l’appât du gain. Sauf que le travail est dans leur cas souterrain et orienté vers une « activité » pour le moins discutable (le commerce de substances illicites). Mais ayant du moins avec l’économie normale ce point commun d’avoir besoin du calme pour prospérer. Dans cette conception, les vrais émeutiers seraient les plus marginaux de facto, c’est-à-dire ceux que les violences ne priveraient même pas d’une quelconque activité souterraine. Cette surprenante convergence d’intérêts entre des populations si différentes n’est pas sans rappeler la collusion historique entre l’Armée américaine et la mafia, pour faciliter le débarquement allié en Sicile (opération Husky de juillet 1943).