Un « Comité d’Eminents Juristes », réuni sous la bannière de la Commission Internationale de Juristes (CIJ - réseau créé en 1952 et composé notamment de soixante éminents juristes censés représenter les systèmes juridiques du monde entier), a rendu public, le 16 février 2009, un intéressant rapport au sujet des conséquences du terrorisme et de la lutte antiterroriste sur les droits de l’homme dans le monde (« Assessing Damage, Urging Action - Report of the Eminent Jurists Panel on Terrorism, Counter-terrorism and Human Rights »).
Lettre Droits-libertés par Nicolas Hervieu
Dans son long et détaillé rapport, le Comité dresse un état des lieux inquiétant des mesures et instruments juridiques mises en place partout dans le monde à la suite des attentats du 11 septembre 2001 (décrit comme un véritable tournant, concrétisé notamment par l’émergence du concept, très critiqué par le Comité, de « war on terror » ou guerre contre le terrorisme - pp. 49-66). Il souligne surtout le caractère excessif de ces mesures qui, loin de permettre une conciliation entre lutte anti-terroriste et droits de l’homme, annihile trop souvent les seconds au nom de la première (voir à ce sujet les deux analyses remarquables sur la conciliation entre sécurité et droit de l’homme - pp. 16-25 - et sur les apports des exemples historiques à cette dialectique - pp. 26-48). L’extension considérable des pouvoirs accordés aux services secrets et de renseignements dans la lutte contre le terrorisme (pp. 67-90) et l’affaiblissement corrélatif des systèmes et garanties judiciaires au sein de ces Etats (pp.123-158) sont aussi examinés. Mentionnons aussi les quelques développement accordées aux «Preventive Mechanisms », ou mesures destinées à prévenir des actions terroristes, qui ont affecté les droits et libertés de façon exponentielle dans leur étendue comme dans leur portée (contrôle de l’immigration, détentions administratives, fichiers… pp. 91-122).
A l’aune de ces constats, le Comité propose différentes lignes directrices afin de rééquilibrer - et même restaurer - la protection des droits de l’homme face à la lutte anti-terroriste (pp. 159-167. Notamment : replacer le droit international et ses garanties au centre des préoccupations étatiques ; renforcer les mécanismes judiciaires ; encadrer et contrôler plus efficacement le pouvoir exécutif, grand “bénéficiaire” des législations anti-terroristes).
Rapport du Comité d’Eminents Juristes du 16 février 2009 - « Assessing Damage, Urging Action - Terrorism, Counter-terrorism and Human Rights » - En anglais
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- Commission internationale des juristes sur wikipédia
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voir aussi:
Le Comité d’Eminents Juristes est un organe indépendant, composé de huit juges, avocats et académiciens de renom international. Le Comité enquête sur l’impact des mesures anti-terroristes sur les droits de l’homme et l’état de droit et évalue si ces mesures sont justifiées à la lumière des menaces terroristes actuelles. Le Comité est composé de Georges Abi-Saab (Egypte), Arthur Chaskalson (Afrique du Sud), Robert K Goldman (Etats-Unis), Hina Jilani (Pakistan), Vitit Muntarbhorn (Thailande), Mary Robinson (Irlande), Stefan Trechsel (Suisse) et Raúl Zaffaroni (Argentine)