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L'année 2008 se termine et je constate avec surprise que j'ai quelque peu délaissé les auteurs sud-américains. Pourtant, jusqu'à présent, j'ai toujours trouvé un parfait plaisir à me plonger dans les textes d'Amérique latine, dont les thématiques sont souvent très proches de celles des lettres africaines.
La solitude lumineuse s'inscrit dans ce cheminement heureux où la poésie embrase la magie des mots tout en portant un regard lucide sur des réalités délicates. Nous avons là une succession de très courts récits de voyage du poète et diplomate Pablo Neruda en Orient. Au gré de ses nominations comme consul du Chili qui le conduisent au Ceylan (actuel Sri Lanka), à Singapour, à Batavia ou de ses déplacements en Inde ou au Cambodge.
Ces notes de voyage mettent en scène l'Asie des années 1920-1930 en pleine colonisation anglaise. La découverte des temples hindous, de la chasse puis du dressage de l'éléphant sont intéressantes tout comme la méditation qu'inspirent les statues bouddhistes gisantes, et qui se traduit par une analyse pertinente sur les différentes formes de représentations du divin en Orient et en Amérique latine. Pablo Néruda, chilien, jete un regard neutre sur la stratification sociale dans l'Empire coloniale britannique, en particulier à Ceylan, et ainsi que sur le cloisonnement systématique entre les différentes couches s'ignorant toutes parfaitement. C'est dans une fumerie d'opium qu'il mesure, dans un état second, toute la condition misérable du petit peuple de Ceylan... Le poète soigne sa solitude en allant à la rencontre de l'autre et en réalisant des rencontres désopillantes voire dangereuses... Une solitude qui s'est avèrée lumineuse et qui a éclairé quelques uns de ses plus beaux poêmes.
On croit reconnaître une forme d'écriture qui a surement inspiré un autre auteur chilien contemporain, j'ai nommé Luis Sépulvéda dont les récits de voyage ont également cette richesse. Par un art maîtrisé de narrer la nature humaine avec concision et poésie. Ce texte est extrait de J'avoue que j'ai vécu.
Bonne lecture,
Pablo Neruda, La solitude lumineuseFolio 2 euros, Traduit de l'espagnol par Claude Couffon.Une critique par le Biblioblog