Ce matin, France-Info me réveille en annonçant que les « évadés de Moulins » ont été arrêtés dans le Val-de-Marne, à côté de Nogent-sur-Marne, près de Paris… Mais pas à Paris, bourgeois et bobos parisiens, dormez tranquilles même rétrospectivement ;-) Et cela me renvoie directement à l’article que le Figaro publiait lundi dernier. Le Figaro nous apprenait que la Préfecture de police de Paris bossait depuis un an sur un logiciel pour identifier « le lieu de résidence des voyous qui écument la capitale ». Et Christophe Cornevin, l’auteur de l’article auquel il aurait été dommage de ne pas décerner un mur de çon de Paris est sa banlieue* continue en expliquant que « l’enjeu est de taille pour cette ville mastodonte (sic) théâtre de quelque 236 527 crimes et délits l’année dernière. », et de préciser que ce « travail de bénédictin » permet de dire de façon statistique que « le franchissement du périphérique est devenu un sport habituel pour les malfaiteurs venus de banlieue ou de province. ». Bref, tout ça pour dire que « seules 47% des personnes mises en cause dans les vingt arrondissements sont originaires de la capitale » et que « Paris importe donc plus de la moitié de ses délinquants. » Après le slogan “vivre et travailler au pays”, l’ineffable Christophe Cornevin, va-t-il lancer un “vivre et braquer au pays” ? A moins qu’il ne regrette dans un style “c’était mieux avant” lorsqu’il écrit « les métamorphoses de l’agglomération francilienne, qui compte désormais dix millions d’habitants, ont inversé la donne : la délinquance parisienne intra-muros représentait 1,5 fois celle de la banlieue en 1972. Elle ne cumule plus à présent que 25% des délits régionaux depuis que les bassins de délinquance ont germé dans le terreau des cités “sensibles” ! »
Etrange analyse, car dans son décompte, le rapport précise que 20% proviennent de proche banlieue, 10% de la grande couronne et le reste soit 22,5% « sont composés d’individus débarquant de province, de l’étranger ou sans domicile connu. » Et finalement, on pourrait aussi bien écrire que la plus grande partie de la délinquance à Paris intra-muros provient des 20 arrondissement avec 47% pour 2 millions d’habitants, alors que la banlieue n’arrive qu’en seconde position avec seulement 30% pour 8 millions d’habitants, et que par le nombre, la proximité géographique et la facilité des déplacements on pourrait s’attendre au contraire…
Etrange et surtout mauvaise analyse, symbole du NIMBY (not in my backyard, pas derrière chez moi), cultivé par certains avec étroitesse d’esprit et égoïsme, qui aimeraient ignorer les autres, ceux de l’autre côté du périphérique, incapables de reconnaître la réalité métropolitaine et ses conséquences aujourd’hui. La Ville est une, de part et d’autre du périphérique. Ce qui n’échappe pourtant pas à la Ministre de l’intérieur, Michèle Alliot-Marie qui demande une « pratique de la coordination qui soit systématique, quotidienne, permanente et renforcée », et qu’est mis en place un plan régional anti braquage.
Alors on peut se demander pourquoi le Figaro, sous la plume de Christophe Cornevin juge utile un pareil article qui ne fait que stigmatiser une partie de la ville contre l’autre, le Paris intra-muros, sans doute peuplé d’anges, et le Paris extra-muros peuplé de démons… Et il serait certainement plus intelligent et même urgent de se demander pourquoi la violence dans le 15ème, le 13ème, le 19ème et le 20ème la délinquance est à plus de 60% et même 74% pour le 20ème le fait de « locaux ». On peut aussi se demander parmi les causes de cette violence pourquoi il y a des guerres de territoires, pour défendre les trafics de drogue notamment, et se poser la question de la consommation de la drogue y compris dans Paris intra-muros, plutôt que de dresser d’autres frontières mentales, alors qu’elles sont déjà suffisamment fortes, rappelons-nous un article du Monde qui voyait dans le 19ème arrondissement “une banlieue intra-muros” !
à suivre…
Jean-Paul Chapon
* Merci au commentateur qui a suggéré cette attribution ;-)