Nicholas Aberstadt, le 16 février 2009 - Le Président Obama a mis un terme à l’interdiction, imposée par l’administration Bush, de subventionner avec des fonds fédéraux d’une part les organisations qui font la promotion ou pratiquent des avortements en dehors des Etats-Unis et d’autre part le Fond des Nations Unies pour la Population (UNFPA). C’est une opportunité pour exercer une pression sur l’UNFPA pour qu’il se concentre sur la santé des femmes et des bébés, et arrête de gaspiller de l’argent en assaillant littéralement les pauvres avec des programmes bornés de contrôle de la population.
Dans une déclaration quelque peu inquiétante le Jour de la population en juillet dernier, l’UNFPA a indiqué « la croissance rapide et continue de la population représente une plus grande menace à la réduction de la pauvreté dans la plupart des pays que le Sida ». Ce message est faux : ce n’est pas les chiffres de la population qui causent la pauvreté, mais les mauvaises politiques économiques, les mauvaises lois et les mauvaises institutions.
Les Pays-Bas ou le Japon sont densément peuplés mais pauvres en ressources, alors qu’en Afrique, riche en ressources, la population est éparpillée. Les Etats-Unis ont décollé avec un des taux de croissance de long terme de la population les plus élevés du monde. Il paraît donc clair que ni les indicateurs de population ni les ressources naturelles ne sont les clés de l’histoire moderne de la richesse et de la pauvreté mondiales.
Ces idées fallacieuses remontent à l’économiste Thomas Malthus au 19ème siècle. Comme de nombreux groupes de pression et ONG, l’UNFPA continue de s’accrocher à des erreurs d’analyse élémentaire, contre l’évidence des faits.
Le vingtième siècle a vu la démographie humaine multipliée par quatre et atteindre plus de six milliards d’individus, mais la production alimentaire a largement dépassé la croissance de la population, l’espérance de vie moyenne a doublé étant désormais au dessus de 60 ans, alors que le PIB par tête a plus que quintuplé.
Dans les années soixante les alarmistes tels que Paul Ehrlich prédisaient une famine de masse dans le monde entier. Il est vrai que ces deux dernières années les prix alimentaires ont brièvement augmenté, le maïs, le blé et le riz ont vu leur prix doubler ou tripler, pour ensuite redescendre. En fait, la tendance de long terme des prix réels des céréales sur le dernier siècle est une baisse régulière, en moyenne de 7 à 10 % par décennie (en fonction des produits).
Bien sûr, un nombre terrifiant d’individus vivent toujours aujourd’hui dans une misère abjecte, accablé par la maladie et la faim, mais le qualificatif correct pour décrire cela est « pauvreté » et non pas « surpopulation ». Dans des pays où les individus ne peuvent être propriétaire en toute sécurité, ne peuvent librement vendre leurs productions et ne peuvent être protégés par le droit, alors l’Etat y est le servant de la pauvreté.
Les alarmistes des catastrophes démographiques et leurs alliés aux Nations Unies se bercent d’illusions lorsqu’ils déclarent que les interventions publiques peuvent réduire les taux de fertilité et « stabiliser » la population. Leur credo est que l’éducation, un taux d’alphabétisation élevé et un contrôle des naissances peu couteux mènent à des taux de natalité plus bas.
La santé, l’alphabétisation, et la contraception volontaire sont des objectifs méritoires, quel que soit leur impact sur la croissance de la population. Mais il est trompeur de déclarer qu’ils réduisent de manière prévisible les taux de natalité.
Prenons d’abord le cas de l’alphabétisation. Le taux de l’alphabétisation des adultes en 2006 était d’un tiers plus élevé au Malawi qu’au Maroc (54% contre 40%), et pourtant les niveaux de fertilité au Malawi sont le double du Maroc. Les campagnes de planning familial sont tout aussi imprévisibles : en 1974 le Mexique a commencé une campagne énergique pour ralentir la croissance démographique et a obtenu une baisse des niveaux de fertilité de 56% alors qu’au Brésil ces mêmes taux tombèrent de 54% sans aucune campagne, sur la même période de vingt-cinq ans. Ce ne sont pas des exemples choisis à dessein : il n’y a en fait pas de moyen de connaître à l’avance l’impact de programmes de planning familial sur les taux de natalité.
Il apparaît que le meilleur indicateur pour prédire les niveaux de fertilité au plan international est le nombre d’enfants qu’une femme dit vouloir avoir. La seule manière efficace de ralentir la croissance de la population est la coercition, comme en Inde brièvement durant les années 70 ou en Chine, un bon client de l’UNFPA, aujourd’hui. Il n’y a pas d’autre manière politique d’obtenir des réductions rapides et importantes des naissances.
De nombreuses organisations, comme l’OMS ou l’UNICEF, travaillent déjà à la promotion de la santé des femmes et des enfants au niveau international. Il est très clair que de nombreuses menaces globales à la santé, de morts durant grossesse ou néonatales, aux morts du fait de diarrhées, du paludisme et autres maladies infectieuses, sont des créations de la pauvreté. Seules la croissance et la liberté économiques, et non les programmes de l’UNFPA, pourront rendre les femmes autonomes et leur épargner la pauvreté et une mort prématurée.
Nicholas Eberstadt est économiste à l’American Enterprise Institute à Washington DC.