Ce paradoxe est généralement connu à tort sous l’appellation de paradoxe du gruyère, mais comme il convient d’être précis, seul l’emmental a des trous !
Plus il y a de fromage, plus il y a de trous ;
or plus il y a de trous, moins il y a de fromage ;
donc plus il y a de fromage, moins il y a de fromage.
C’est le plus célèbre des paradoxes construit selon un mode de syllogisme appelé Barbara (ou syllogisme en A-A-A). Il met en évidence que l’application sans discernement du syllogisme est source d’aberrations.
En réalité, il s’opère ici un subtil glissement sémantique entre les termes moyens des deux prémisses ; ce qui interdit la conclusion. Ce glissement est dû à une différence contextuelle. En effet, pour chaque prémisse, il existe un contexte sous-entendu qui rend possible l’acceptation de la prémisse en tant que vérité. Cependant ces contextes implicites s’opposent et invalident le syllogisme.
Il faut alors considérer le contexte en tant qu’axiome. La conclusion est alors un théorème relatif à une axiomatique contenant nécessairement la conjonction des contextes.
Ainsi, on déduit ici que, lorsque volume et densité de fromage sont constants, on a bien « plus il y a de fromage, moins il y a de fromage ». Ce qui peut se réduire à un truisme ou à une lapalissade assez stupide : « autant il y a de fromage, autant il y a de fromage ».
En définitive, la conclusion doit être considérée invalide plutôt que fausse car les deux occurrences du mot « fromage » sont liées à deux notions distinctes :
Dans la première (celle de la majeure), les vides font partie du fromage. Le fromage se définit alors par son apparence externe.
Dans la seconde (celle de la mineure), le fromage se définit comme une matière, et par là même, exclut le vide.
Ainsi ces deux notions antagonistes ne doivent pas être amalgamées dans une même phrase. Il s’agit là d’une forme sournoise de polysémie et avant tout d’un raisonnement fallacieux.