Magazine Politique

Banderille n°286 : Quand la Rupture suppure

Publié le 13 février 2009 par Toreador

Que périssent les faibles et les ratés…

L’opinion publique se plaint souvent de n’avoir que des pleutres, des incompétents et des affairistes en charge des affaires publiques. Elle est en partie aidée par la myopie et la lâcheté bien-pensante qui régit les analyses faites dans le microcosme médiatique ou même la blogobulle.

Banderille n°286 :  Quand la Rupture suppure

J’en veux pour preuve le traitement médiatique relativement clément réservé à Yves Jego, et celui, beaucoup plus critique, dédié à Valérie Pécresse.

Lever de rideau sur la grande scène de théâtre du monde politique.  A gauche nous avons Yves Jego, le pauvre secrétaire d’Etat humilié par l’Elysée, petite Cosette rappelée brutalement à Paris en plein milieu de négociations en Guadeloupe. A droite, la méchante et incompétente Valérie Pécresse (elle est énarque, en plus, comme tout bon Iago) qui met le feu aux poudres dans le secteur universitaire de la Recherche.

Il n’y a qu’à voir l’édition datée de ce jour de Vendredi, qui traite en parallèle des deux affaires : pas un blog pour défendre Pécresse. En revanche, les blogs retenus sur la crise de Guadeloupe et de la Martinique mettent surtout en exergue des causes structurelles au mécontentement des îles.

« Outre-crevée » et mer (de noire)

Et pourtant. c’est injuste. Yves Jego, à mon sens, à atteint son niveau d’incompétence. Lorsqu’on est secrétaire d’Etat à l’outre-mer, on a un champ d’action régional très aisé à délimiter. Aussi, attendre 15 jours pour se déplacer là bas alors qu’un mouvement social s’y déploie est pour le moins déroutant. Le Canard Enchaîné a révélé que Jego avait retardé son départ d’une semaine pour assister à une réunion de son club de réflexion politique groupusculaire, dont j’ai oublié le nom.

Une fois sur place, Yves Jego n’est non seulement pas parvenu à arrêter la crise, mais il a distribué sans compter, démolissant les marges de manoeuvre en matière de négociation. Enfin, il a fini par être rappelé par Paris, puis renvoyé avec 2 médiateurs qui n’ont aucune légitimité politique. Madame Taubira a raison de dire que l’Etat s’est totalement discrédité dans cette affaire.

Bilan des courses : l’incendie s’est propagé à la Martinique, la Guadeloupe, la Réunion, la Nouvelle Calédonie…

Ministère amer

De son coté, Valérie Pécresse, en bon petit soldat, a accepté de porter une réforme ambitieuse tout en étant sceptique sur le calendrier imposé par l’Elysée. Elle a réalisé une importante concertation, et obtenu l’accord unanime des présidents d’université sur le sujet. Et voilà maintenant que parce qu’une poignée de chercheurs – tous affiliés au P.S ou au PCF – cherchent à bloquer la réforme, celle-ci serait devenue totalement mauvaise.

Les syndicats contestataires représentent tout au plus 15% de la communauté des chercheurs. Les présidents d’université, sentant le vent tourner, se sont mis à défendre « la fronde » et, faisant cela, ont donné de la légitimité au mouvement qui a pris de l’ampleur. D’après eux – et c’est quand même incroyable de se déjuger aussi rapidement d’une année sur l’autre – il faudrait écouter les contestataires, alors que ces derniers justement sont les premiers à critiquer le pouvoir trop grand détenu par les mandarins de l’Université.

Avec des alliés comme cela, Pécresse n’a pas besoin d’adversaires.

Et qu’en est-il de cette réforme infâme ? Il s’agit d’évaluer des gens (dont une partie considère qu’ils sont propriétaires de leur institution) en échange d’une hausse des rémunérations, pour lutter contre la fuite des cerveaux. Le gouvernement se prépare quand même à injecter plus de 700 millions d’euros dans la Recherche.

Selon moi, Pécresse a raison : la réforme du statut des enseignants-chercheurs doit être faite par le patron – le président d’Université – et pas Conseil national des universités (CNU), l’instance disciplinaire nationale  comme le propose un député UMP, Daniel Fasquelle, par ailleurs (ô surprise) doyen d’université. Le CNU est en effet une instance composée d’Enseignants chercheurs, et on voit mal au nom de quel dogme la cogestion devrait s’imposer dans la Recherche.

Question : comment se fait-il que toute réforme de l’Université ou de l’Education Nationale se finisse invariablement en cortèges de manifestants dénonçant des « réformes iniques » ou « la casse » ?

Le magicien d’Oz plus beaucoup de choses

D’un coté un ministre dépassé face à une fronde en grande partie justifiée. De l’autre coté, un ministre lâché face à une fronde qui me semble dangereusement irréaliste et dont le caractère bipartisan montre qu’il s’agit d’un problème corporatiste, et non politique. Je regrette au passage le son de cloche unique donné par les blogs (beaucoup de blogs d’universitaires) et Vendredi sur la question.

On ne peut pas invoquer la Réforme comme formule magique du changement, et en même temps vouloir brûler comme des sorciers du Moyen-Âge les ministres vraiment courageux et réformateurs et compétents de ce gouvernement.

Il y a des Frondes qui sont injustes – celle commise contre Mazarin, par exemple, qui fut l’un des meilleurs ministres que ce pays a connu. Il faut dire qu’Anne d’Autriche, elle, le savait – et elle a tenu bon. Voilà pourquoi, Malakine n’a pas tort. Le problème dans la réforme des Universités, c’est peut-être Nicolas Sarkozy lui-même, … ce qui rejoint mon estocade d’avant hier.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Toreador 41 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines