J'ai lu pour vous...

Par Aurélien Boillot
Les mystères de Bruxelles… une fois

Daniel-Charles Luytens nous embarque à travers une série d’histoires mystérieuses sur la capitale européenne...
Compilant des faits réels mais méconnus, c’est une Bruxelles parallèle qui nous est conté. Dans un style simple voire simpliste, nous partons à la découverte d’une secte luciférienne, on se prend dans la toile d’araignée du Roi de Jérusalem, nous faisons la rencontre d’un diable en soutane et nous sommes surpris d’apprendre que l’affaire Dreyfus prend ces racines à Bruxelles…
Hésitant entre un ton narratif et un ton didactico-fantastique, les histoires s’enchainent plus ou moins facilement. Sans véritable lien entre elles, hormis un pseudo ordre chronologique, on tente de se divertir à voir comment les mêmes légendes urbaines françaises d’antan ont fait ricochet dans le "plat pays". Une bonne connaissance de l’Histoire belge est dès lors indispensable pour saisir toute la saveur de ces récits emprunts de faits historiques.
Si Bruxelles possède de nombreux secrets, le curieux insatiable restera sur sa fin avec cet ouvrage qui vaut le mérite d’exister. Pour la bonne bouche voici l’un des mystères de Bruxelles faisant la part belle à un certain Comte de Saint-Germain, toujours en quête d’immortalité…
Chapitre : Le Comte de Saint-Germain à Bruxelles
Charles de Lorraine fait appel à Monsieur de Surmont et l’invite dans son palais à Tervuren. Cobenzl l’apprend, puisqu’il surveille la correspondance. Le ministre est installé dans l’actuel Hôtel de Mérode à la rue aux Laines. La salle de réception est décorée de gobelins représentant des sujets ésotériques, dont la fable d’Eros et de Psyché, tirée de l’Ane d’or d’Apulée. Cobenzl s’arrangera pour détourner M. de Surmont et le recevoir le premier en son hôtel dès son arrivée à Bruxelles. Tous leurs entretiens furent retransmis à l’Impératrice Marie-Thérèse.
« J’ai trouvé en Surmont, l’homme le plus étrange que j’ai connu dans ma vie. Il possède de grandes richesses et vit très simplement ; il est d’une probité étonnante et possède une bonté digne d’admiration. Il a une connaissance approfondie de tous les arts. Il est poète, musicien, écrivain, médecin, physicien, chimiste, mécanicien, peintre, bref, il a une culture générale, comme je n’en ai pas trouvé chez aucun homme. Et comme il était intéressant avec toutes ses connaissances, j’ai passé des heures agréables avec lui… »

Le comte de Saint-Germain propose à Cobenzl une série d’expériences ? Tous deux conviendront avec Charles de Lorraine de procéder à une transmutation. La séance ne se tiendra pas à l’hôtel de la rue aux Laines mais à Tournai, chez une des membres du groupe des Supérieurs Inconnus, un nommé Rasse, homme d’affaires, expert dans la techniques des fours. Cobenzl assistera à la démonstration et ne pourra retenir ses applaudissements. Il envoie une lettre enthousiaste au prince de Kaunitz et il termine cette lettre en disant :
« Il ne dépend que de nous de nous approprier ses procédés secrets. Il n’y a pas d’autres moyens de la faire que de consentir l’installation d’une usine. »

Avec l’aide d’une banquière dont l’hôtel se trouvait à la rue des Eperonniers, la vicomtesse de Nettine, qui possédait la banque la plus puissante des Pays-Bas, une société verra le jour. L’acte sera rédigé au nom d’un groupe secret dont Saint6germain fait partie. La banque Nettine verse des arrhes à Saint-Germain tout en lui soumettant un projet de convention aux termes duquel, en contrepartie de ses secrets, il participera à vie aux bénéfices produits par l’usine à construire. Il eut à peine dévoilé ses formules qu’il se vit proprement piégé par un conseil d’administration composé exclusivement de parents et d’amis de la financière, dont le propre fils de celle-ci, âgé de quinze ans !

Entre aussi chez ces Supérieurs Inconnus quelqu’un qui ne vient de nulle part, dont on ne connaîtra jamais ni le nom, ni les origines, ni la date de naissance, ni celle de son décès. Il a pourtant sa rue à Bruxelles. N’ayant jamais voulu donner son nom, il prendra celui d’une danseuse d’opéra à la mode : la Guimard.
S’agissait-t-il de M. de Surmont, alias comte de Saint-Germain, alias Barnabé Guimard, et bien d’autres ? … Tout porte à le croire. Il commencera par dessiner le plan d’un obélisque aux proportions parfaites qu’on a pu voir servir de fontaine, jusqu’en 1824, devant l’église de la Chapelle. En quelques années, il va d’autorité bouleverser complètement le visage de Bruxelles. Puis, il quittera la ville, aussi mystérieusement qu’il y était arrivé, cette même année 1783, où l’on annonçait la mort du comte de Saint-Germain.

« Les Roses-Croix, s’ils meurent, s’écartent à la manière des éléphants et quittent cette vie sans qu’on sache où, ni quand, ni comment, ni où reposent leurs os… »


Vous avez dit bizarre ?


Lien : Les Mystères de Bruxelles. Daniel-Charles Luytens. 2005. Edition Noir Désir Production. Website : www.noirdessin.be